ARTICLE
Air Air
France
Particules Pics de pollution Politique et règlementation Santé
Publié le 07 août 2025

Le trafic routier et le chauffage au bois sont les deux principales sources de particules ultrafines à Paris – Airparif

Par : Sophie Sanchez

Modifié le : 07/08/2025
Réf . : 2025_08_02

Source : Airparif, juin 2025

[

Airparif, l’Observatoire de la qualité de l’air en Île-de-France, a rendu public en juin 2025 un rapport détaillé sur les mesures estivales des particules ultrafines (PUF) à Paris, réalisées du 17 juillet au 15 septembre 2023. Ce rapport fait suite à une première campagne de mesure hivernale et printanière menée en 2022, et s’inscrit dans le cadre d’une étude plus large visant à mieux comprendre la variabilité spatiale et temporelle de ces particules nocives dans la capitale française.

Ces particules solides, en suspension dans l’air, proviennent de sources d’émissions variées, dont les procédés de combustion et de transformations physico-chimiques dans l’atmosphère. Les PUF ne sont pas réglementées à ce jour, bien qu’elles constituent un risque avéré pour la santé, notamment en raison de leur petite taille (leur diamètre est inférieur à 100 nanomètres ou 0,1 micromètre, à comparer à 2500 nanomètres ou 2,5 micromètres pour les particules fines PM2,5), qui leur permet de pénétrer plus profondément dans l’organisme.

[

Calendrier

Depuis la fin 2019, Airparif suit les variations temporelles du nombre de particules ultrafines au centre de Paris (jardin des Halles) et mène un projet d’étude de la variabilité spatiale de ces particules en Île-de-France dans des environnements variés (fond urbain, fond rural, à proximité du trafic routier et des plateformes aéroportuaires) visant à fournir des données granulométriques détaillées.

Cette étude a comporté deux campagnes de mesures qui ont permis d’analyser la variabilité saisonnière. Elles ont été réparties sur deux périodes :

  • Hiver-Printemps : mesures réalisées de fin janvier à début mai 2022 ;
  • Été : mesures réalisées de la mi-juillet à la mi-septembre 2023.

Au total, cinq sites ont été équipés au sein de la capitale :

  • sites en situation de fond urbain (Paris 1er Les Halles et Paris 18ème) ;
  • deux sites à proximité du trafic routier (boulevard Périphérique Est et boulevard Haussmann).

Les mesures ont porté sur les particules ultrafines ainsi que sur le carbone suie (eBC), qui est notamment un indicateur de la combustion d’hydrocarbures et de biomasse.

[

Airparif, l’association agréée pour la surveillance de la qualité de l’air en Île-de-France 

En France, la surveillance de la qualité de l’air est confiée à des associations indépendantes, les AASQA (associations agréées de surveillance de la qualité de l’air). Ces associations, à dimension régionale, composent le dispositif de référence au niveau national.

Ainsi en Île-de-France, Airparif assure des missions de surveillance, d’analyse et d’expertise mais également d’alerte, d’information et de formation sur le champ de la qualité de l’air incluant le lien entre air – climat et énergie.

[

[

[

Contexte

L’étude a été réalisée avec le soutien de Breathe Cities et un partenariat incluant la Ville de Paris. Les résultats de cette étude sont cruciaux, relève Airparif, pour compléter et pérenniser l’acquisition de données sur ce type de particules, comme le recommande l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses) qui en 2018 et 2019 avait émis des avis sur les enjeux sanitaires de ces PUF, en tant que polluant dit « émergent », et sur la nécessité de mieux les surveiller.

En effet, l’Anses rappelle que les particules ultrafines sont encore plus nocives que les particules de taille supérieures, car elles pénètrent plus profondément dans l’organisme : « Les données recueillies depuis 2013 confirment ou renforcent le lien avec des atteintes respiratoires et cardiovasculaires et les décès anticipés. D’autres études, en petit nombre suggèrent des effets sur la santé neurologique – la santé périnatale, le développement des performances cognitives de l’enfant, ainsi qu’un effet du carbone suie sur le faible poids de naissance. La connaissance de leur nature (carbone suie, organique, …) est essentielle pour mieux documenter les effets. »

À l’occasion du Roquelaure de la qualité de l’air qui s’est tenu en mai 2025, la ministre de la Transition écologique Agnès Pannier-Runachier avait souligné en substance que les particules ultrafines font partie de ces polluants sur lesquels nous sommes encore aveugles.

À cet égard, la nouvelle directive européenne sur la qualité de l’air ambiant et un air pur pour l’Europe, directive (UE) 2024/2881, a introduit une obligation de surveillance des nouveaux polluants (lire notre article). Elle précise en effet qu’ « il importe que les polluants émergents, tels que les particules ultrafines, le carbone noir et le carbone élémentaire, ainsi que l’ammoniac et le potentiel oxydant des particules, soient mesurés sur des supersites de surveillance implantés dans des lieux caractéristiques de la pollution de fond rurale comme dans des lieux caractéristiques de la pollution de fond urbaine afin de faciliter la compréhension scientifique de leurs effets sur la santé et l’environnement, comme le recommande l’OMS ».

[

Résultats de l’étude

L’étude met en évidence trois sources de particules ultrafines à Paris :

  • Le trafic routier émet des particules de très petites tailles, dont une partie sont inférieures à 20 nm, mesurées notamment à proximité du Boulevard Périphérique. Ainsi les mesures de carbone suie ont confirmé que le trafic routier est une source majeure de particules ultrafines (PUF), avec des concentrations plus élevées à proximité des axes routiers. De plus, l’analyse des données de trafic routier recueillies sur le Boulevard Haussmann a permis d’affiner les facteurs influençant les émissions de PUF, tels que le nombre et le type de véhicules, ainsi que leur vitesse de circulation ;
  • Le chauffage au bois émet des particules dont la majorité s’étagent entre 70 et 100 nm. L’augmentation du nombre de particules ultrafines est directement liée à l’augmentation des concentrations de carbone suie ;
  • Les particules secondaires, issues de composés gazeux ayant subi des transformations dans l’atmosphère lors de conditions météorologiques spécifiques, sont également une source de pollution aux particules ultrafines durant l’année. Leur nature diffère selon les conditions de formation et les émissions anthropiques locales.

Plus particulièrement, l’étude a mesuré un nombre de particules ultrafines deux à trois fois plus important à proximité des axes routiers parisiens qu’en situation de fond urbain à Paris. Cet écart est variable tout au long de la journée en lien avec l’intensité des sources d’émissions. Par exemple, les concentrations moyennes en nombre de PUF étaient de 14 200 particules/cm³ sur le Boulevard Haussmann et de 18 800 particules/cm³ sur le Boulevard Périphérique Est, contre 6 400 et 7 900 particules/cm³ respectivement pour les sites de fond urbain de Paris 1er Les Halles et Paris 18ème. Ces résultats confirment l’impact significatif du trafic routier sur les niveaux de PUF dans l’air parisien.

L’analyse granulométrique des particules a révélé que le mode majeur, c’est-à-dire le diamètre correspondant au plus grand nombre de particules, était inférieur à 30 nm pour tous les sites. Ce mode majeur est caractéristique des particules récemment émises, notamment par le trafic routier. Les profils granulométriques moyens ont également montré une variabilité temporelle des PUF, avec des pics de concentration le matin et le soir, correspondant aux heures de pointe du trafic routier.

Un autre aspect important de l’étude a été l’analyse des particules issues de transformations dans l’atmosphère, telles que les aérosols organiques secondaires (AOS). Ces particules se forment sous l’effet de conditions météorologiques favorables, comme un ensoleillement soutenu et des températures élevées. Lors de l’épisode de pollution à l’ozone du 6 au 8 septembre 2023, une augmentation des concentrations en nombre de PUF a été observée, avec un mode granulométrique autour de 100 nm. Cette augmentation a été attribuée à la formation d’AOS, confirmée par l’analyse de la composition chimique des particules.

L’étude a également examiné l’impact des précipitations estivales sur les niveaux de PUF. Les fortes précipitations du 28 juillet 2023 ont entraîné une diminution des concentrations en nombre de ces particules, suggérant un effet d’abattement par les précipitations.

Comme le note l’étude en effectuant une comparaison avec d’autres métropoles européennes, la capitale est classée parmi les villes ayant les plus forts niveaux de particules ultrafines en Europe, à la fois en proximité du trafic routier et en situation de fond urbain, sachant toutefois que les niveaux de PUF à Paris sont globalement similaires à ceux observés dans des villes comme Londres, Amsterdam, Francfort et Dresde. Cette comparaison, précise Airparif, a été rendue possible grâce à une étude européenne pluri-annuelle menée dans le cadre du projet RI-Urbans, qui vise à développer un système de surveillance de la qualité de l’air en se concentrant sur les nanoparticules et les fractions de matière particulaire.

Les prochaines étapes incluront une analyse plus approfondie des données recueillies, et des comparaisons supplémentaires avec d’autres métropoles européennes. Des études complémentaires seront menées pour évaluer l’impact des différentes sources de PUF, telles que le chauffage au bois en période hivernale, et pour affiner les modèles de dispersion des particules dans l’air parisien.

Ces travaux contribueront à une meilleure compréhension des niveaux de particules ultrafines à Paris et à l’élaboration de stratégies efficaces pour réduire l’exposition des citoyens à ces particules nocives pour lesquelles les connaissances doivent encore être affinées.

[

En savoir plus

Synthèse du rapport 

Airparif – Campagne de mesure parisienne sur les particules ultrafines (PUF). Volet n°2 – mesures estivales du 17 juillet au 15 septembre 2023 et enseignements globaux de l’étude – Rapport juin 2025

https://www.citepa.org/particules-ultrafines-airparif-publie-les-resultats-de-sa-deuxieme-campagne-de-mesure/

https://www.citepa.org/polluants-non-reglementes-dans-lair-ambiant-vers-un-suivi-de-trois-nouveaux-polluants/

Particules Pics de pollution Politique et règlementation Santé