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Le fluorure de sulfuryle (SO2F2) : les connaissances de ce « nouveau » GES s’affinent

  • Réf. : 2009_05_a8
  • Publié le: 1 mai 2009
  • Date de mise à jour: 14 mai 2019
  • International

L’Organisation de recherche scientifique et industrielle du Commonwealth (CSIRO) de l’Australie, l’équivalent du CNRS, a annoncé, le 24 mars 2009, les résultats d’un programme de mesure atmosphérique du fluorure de sulfuryle (SO2F2), mené par une équipe de recherche internationale sous la direction de l’Institution Scripps d’Océanographie (SIO, Californie) et du Centre australien de recherche météorologique et climatique (CAWCR). Ces résultats ont été publiés dans le journal scientifique de l’Union Géophysique Américaine (AGU) Journal of Geophysical Research (numéro du 12 mars 2009).

Le SO2F2 est un gaz synthétique qui est de plus en plus utilisé, dans l’hémisphère nord, comme fumigant de substitution au bromure de méthyle dans les bâtiments dans la lutte contre les termites et dans l’agriculture dans le cadre d’applications de post-récolte (fruits secs, graines, farine, noix,…). Son utilisation aux fins de fumigation est autorisée dans quatre pays (Etats-Unis, Canada, Japon, Australie), ainsi que dans l’UE et les Antilles. En raison de son fort potentiel d’appauvrissement de la couche d’ozone, le bromure de méthyle fait l’objet d’une élimination progressive au titre du Protocole de Montréal et de ses amendements successifs(1). Aujourd’hui, le SO2F2 est fabriqué dans quatre pays (Etats-Unis, Chine, Allemagne et Pologne). La production mondiale du SO2F2 s’élevait à environ 2000 tonnes par an à la fin des années 90. Des émissions atmosphériques de SO2F2pourraient également résulter de son utilisation comme agentnettoyant dans l’industrie des semi-conducteurs et comme gaz de substitution au SF6, lui-même gaz à effet de serre (GES) très puissant et figurant dans le panier des six GES visés par le Protocole de Kyoto(2).

L’équipe de chercheurs a réalisé, pour la première fois, des mesures de SO2F2 dans l’air ambiant sur sept stations de mesure à travers le monde, et sur des échantillons prélevés dans des réservoirs de stockage cryogéniques de deux sites (SIO, Californie et Aspendale, Australie). Ceci a également permis de reconstruire l’histoire atmosphérique de ce GES dans les deux hémisphères. Les chercheurs ont en outre estimé la durée de vie du SO2F2 dans l’atmosphère, son pouvoir de réchauffement global (PRG) et quantifié les flux d’émissions. Les résultats montrent que les concentrations de SO2F2 s’accumulent dans l’atmosphère globale, leur taux de croissance se situant à 5% par an depuis 1978. Dans l’hémisphère sud, les concentrations sont passées de 0,3 ppt (parts per trillion, soit 10-12) en 1978 à 1,4 ppt en 2007 (soit une hausse d’un facteur 4,6 en 29 ans). Dans l’hémisphère nord, elles se situaient à 1,5 ppt en 2007 contre 1,1 ppt en 1999 (+36% en 8 ans). En 2005, l’Agence suédoise des produits chimiques (KEMI) avait évalué les émissions
mondiales de SO2F2 d’origine anthropique à 1 800 t par an au cours de la période 1992-2000 sur la base d’estimations de production et de rejets. S’appuyant sur les résultats du programme de mesure et sur les travaux de modélisation, les chercheurs de la SIO estiment désormais que les émissions de SO2F2 en 2007 étaient de l’ordre de 1 900 tonnes
(3) (soit 67% des quantités produites), dont 90% dans l’hémisphère nord. La progression de son utilisation comme fumigant rend probable une hausse des émissions de SO2F2à l’avenir.

Alors que jusque-là, la durée de vie du SO2F2 dans l’atmosphère avait été estimée à un maximum de 4,5 ans, les chercheurs de la SIO l’évaluent dorénavant plutôt à 36 ans. De même, tandis que le PRG du SO2F2 était incertain, sur la base des mesures et de sa durée de vie modélisée, la SIO estime désormais que le SO2F2 a un fort PRG, à savoir 4 780 fois supérieur à celui du CO2 (sur 100 ans), PRG similaire à celui du CFC-11 sur 100 ans (4 750) (source : GIEC, 2007). Les chercheurs concluent qu’il est peu probable que le SO2F2 soit intégré dans l’accord multilatéral climat post-2012, vu les enjeux de quarantaine et de traitement préalable à l’expédition. Néanmoins, soulignent-ils, le GIEC devrait incorporer les émissions de SO2F2 dans ses scénarios.

(1) Voir ED n°165 p.III.6. (2) Voir ED n°160 p.I.121. (3) Soit l’équivalent de9,6 Mt CO2e, c’est-à-dire 0,2% des émissions de GES de la France (536 Mt CO2e – voir encadré p.2).

www.agu.org/pubs/crossref/2009/2008JD011162.shtml (abstrait)

 

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