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CCNUCC et Accord de Paris Fiscalité, coûts et économie
Publié le 29 octobre 2025

Les dirigeants européens fixent des conditions concernant le nouvel objectif climatique pour 2040 en invoquant la nécessité de combiner protection du climat et compétitivité

Par : Sophie Sanchez

Modifié le : 29/10/2025
Réf . : 2025_10_12

D.R.

À moins de quinze jours de l’ouverture de la COP 30 à Bélem au Brésil, la conférence des Nations unies sur les changements climatiques, les chefs d’État et de gouvernement réunis jeudi 23 octobre dans le cadre du Conseil européen ont réaffirmé « [leur] attachement à l’Accord de Paris », conclu il y a dix ans, tout en convenant « [de la nécessité de faire preuve] de pragmatisme et de souplesse […] pour faire en sorte que les ambitions de l’Europe en matière de climat aillent de pair avec la compétitivité de notre économie et de nos industries », comme l’a déclaré le président du Conseil européen, António Costa.

Pour rappel, au titre de l’Accord de Paris, la «contribution déterminée au niveau national» (CDN en français, NDC en anglais) de l’UE doit être mise à jour, chaque pays devant fournir tous les cinq ans aux Nations unies un objectif chiffré de réduction de ses émissions de gaz à effet de serre, ainsi qu’un plan pour y parvenir. Fixer la cible 2035 nécessite de déterminer l’échéance pour 2040, ce que les Vingt-Sept ne sont pas parvenus à faire en septembre dernier (lire notre article).

Concrètement, jeudi 23 octobre, « le Conseil européen a tenu un débat stratégique sur la manière de soutenir la réalisation de l’objectif intermédiaire de l’UE en matière de climat à l’horizon 2040 » :  les dirigeants européens ont donc donné leur accord à l’objectif de réduction d’émissions de 90 % pour 2040 par rapport aux niveaux de 1990 proposé par la Commission européenne le 2 juillet 2025 (lire notre article) et qui vise à permettre l’atteinte de la neutralité carbone à l’horizon 2050.

Pour autant, les dirigeants ont fixé de nombreuses conditions pour ce nouvel objectif climatique :

– en appelant à tenir compte de « la contribution réaliste que les absorptions de carbone apportent à l’effort global de réduction des émissions, tout en tenant compte des incertitudes liées aux absorptions naturelles » alors que le puits de carbone terrestre de l’UE diminue (lire notre article) ;

– en appelant à « définir un niveau adéquat de crédits internationaux de qualité » sachant que la Commission européenne a proposé pour sa part des « flexibilités » en autorisant « les Vingt-sept à prendre en compte l’acquisition de [ces crédits] à hauteur de 3 % du total, afin de financer des projets vertueux à l’étranger, en dehors du continent » ;

– et en posant « la nécessité d’une clause de révision, compte tenu des données scientifiques les plus récentes, des progrès technologiques et de l’évolution des défis et des opportunités pour la compétitivité de l’UE à l’échelle mondiale. »

Le Conseil européen a aussi invité la Commission à « développer davantage les conditions favorables au soutien à l’industrie et aux citoyens européens dans la réalisation de l’objectif intermédiaire pour 2040 » et, dans ce contexte, « se félicite de la récente lettre de la présidente de la Commission sur le climat et la compétitivité ».

Ainsi le Conseil appelle

  • à « intensifier les efforts collectifs pour assurer le renouveau, la modernisation et la décarbonation industriels de l’Europe d’une manière neutre sur le plan technologique »,
  • à « accorder une attention particulière aux industries traditionnelles, notamment les industries automobile, du transport maritime et aéronautique, ainsi qu’aux industries à forte intensité énergétique, telles que l’acier et les métaux, les produits chimiques, le ciment, le verre et la céramique, et le papier et la pâte à papier, afin qu’elles restent résilientes et compétitives sur un marché mondial et dans un environnement géopolitique difficile».

À cet égard, il salue « l’intention de la Commission de poursuivre l’évaluation prévue par le règlement établissant des normes de performance en matière d’émissions de CO2 pour les voitures et les camionnettes, et demande que cette proposition soit rapidement présentée », laissant ainsi la porte ouverte à une remise en cause de l’interdiction de la vente des voitures à moteur thermique en 2035 prévue dans le cadre du paquet « Fit for 55 » (lire notre article).

Le Conseil européen appelle également « à intensifier d’urgence les efforts afin de garantir l’approvisionnement en énergie abordable et propre et de construire une véritable union de l’énergie avant 2030 », en précisant que cela nécessitera « une électrification ambitieuse utilisant toutes les solutions « zéro net » et à faibles émissions de carbone, ainsi que des investissements dans les réseaux, le stockage et les interconnexions aux niveaux national et de l’UE ».

Concrètement, l’objectif précis de réduction d’émissions de gaz à effet de serre pour 2040, sur lequel les Vingt-Sept doivent s’accorder, conformément à leur loi climat, n’a toujours pas été arrêté.

Les ministres de l’Environnement qui doivent se réunir mardi 4 novembre lors d’un Conseil extraordinaire devraient définir les cibles climatiques 2035 et 2040 à la majorité qualifiée et approuver la contribution déterminée au niveau national (CDN) de l’UE pour l’après-2030, qui sera alors soumise à la Convention cadre des Nations unies sur les changements climatiques (CCNUCC) juste à temps en amont de la COP 30. Ils auront aussi à déterminer la manière dont seront comptabilisées les absorptions de CO2 par les puits de carbone et le pourcentage de crédits carbone internationaux utilisables par les pays.

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