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Adaptation Atténuation Politique et règlementation
Publié le 30 juin 2025

Les Français bien disposés à l’égard de l’action publique visant à préserver l’environnement, excepté les mesures touchant à l’automobile

Modifié le : 30/06/2025
Réf . : 2025_06_06

Source : Sciences Po – SDES – baromètre Elipss Environnement, 2024

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En 2024, face à un changement climatique devenu plus tangible, les Français s’inquiètent de plus en plus des catastrophes naturelles qui pourraient survenir selon une étude du Commissariat général au développement durable (CGEDD). Les opinions exprimées dans le baromètre Écologie Environnement sont un peu plus nuancées qu’en 2023, même si certains sujets s’avèrent fortement clivants. Conscients des effets négatifs que certaines politiques environnementales pourraient avoir sur leur pouvoir d’achat, les Français sont toutefois nombreux à juger souhaitables les mesures proposées, à l’exception de celles liées à la mobilité automobile. Les questions d’adaptation et d’éco-anxiété sont de plus en plus présentes dans le débat public.

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Contexte

En 2023, le service statistique du ministère chargé de l’Environnement (SDES) s’est associé à Sciences Po pour développer un baromètre consacré aux opinions, attitudes et pratiques des Français en matière environnementale. deux éditions du baromètre Écologie Environnement (BEE) ont été conduites en décembre 2023 puis en octobre 2024. Les données collectées offrent un aperçu de la relation que les Français entretiennent avec les enjeux environnementaux.

Le baromètre s’appuie sur le panel « Elipss », mis en place en 2012 par le Centre des données socio-politiques (CDSP) de Sciences Po. S’appuyant sur un échantillon représentatif de la population française métropolitaine âgée de 18 ans et plus, les enquêtes réalisées dans ce cadre permettent d’étudier l’évolution des comportements, des situations et des opinions dans la société française.

Depuis 2023, une enquête annuelle s’intéresse plus particulièrement aux attitudes, opinions et pratiques des Français à l’égard des enjeux environnementaux. Collectée sur Internet du 3 au 30 octobre 2024, la seconde édition du baromètre a permis d’interroger 1 882 enquêtés, dont 1 740 avaient déjà participé à l’édition précédente en décembre 2023. Les résultats complets de ce baromètre sont présentés dans un document annexe à consulter sur le site du SDES.

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Les catastrophes naturelles comme incarnation de la menace climatique

Source : Sciences Po – SDES – baromètre Elipss Environnement, 2024

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La hiérarchie des sujets d’inquiétude en matière environnementale place, pour la première fois en 2024, les catastrophes naturelles en première position devant le changement climatique, les pollutions, l’épuisement des ressources et l’érosion de la biodiversité (graphique 1).

Comme constaté également dans d’autres baromètres (plateforme environnement de l’enquête « Camme », baromètre climat de l’Ademe), depuis deux ans, ce n’est plus seulement le changement climatique en lui-même qui suscite des craintes, mais aussi ses conséquences, dont les catastrophes naturelles sont la traduction concrète : inondations, sécheresse, tempêtes, feux de forêts, etc.

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Des opinions sur le climat un peu plus nuancées

En 2024, les avis exprimés semblent un peu plus nuancés que l’année précédente, avec une baisse des positionnements extrêmes (très positifs et très négatifs). La part des Français jugeant « qu’il est toujours temps de lutter de façon efficace contre le changement climatique » a ainsi tendance à baisser (51 %, soit 7 points de moins qu’en 2023). Dans le même temps, la part des personnes les moins convaincues par le caractère inéluctable du changement climatique baisse également (15 %, soit 6 points de moins qu’en 2023).

Autre exemple, 81 % des Français sont (tout à fait ou plutôt) d’accord avec l’idée selon laquelle le Gouvernement doit suivre les recommandations scientifiques en matière de changement climatique, même si la population y est opposée. La part des enquêtés étant « tout à fait d’accord » baisse (21 %, soit 2 points de moins qu’en 2023), mais c’est également le cas des enquêtés qui ne sont pas d’accord avec cette opinion (15 %, soit une baisse de 5 points).

Dernier exemple de recentrage des opinions, la part des enquêtés jugeant que les politiques climatiques ne vont pas assez loin a nettement régressé entre 2023 et 2024 (de 42 % à 29 %). Mais dans le même temps, la proportion de Français estimant que ces politiques vont au contraire trop loin a aussi baissé (de 7 % à 4 %). Sur ce sujet, le niveau d’études des enquêtés influe fortement sur les opinions exprimées : les moins diplômés ont en effet deux fois plus tendance à considérer que les politiques climatiques vont déjà trop loin.

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L’émergence d’attentes en matière de technologie et d’adaptation

En 2024, la part des enquêtés estimant que le progrès scientifique et technique résoudra les problèmes environnementaux contemporains est de 47 %, soit 9 points de plus que l’année précédente. Cette progression significative tend à laisser penser que les citoyens comptent de plus en plus sur les solutions technologiques pour faire face aux menaces environnementales, et non plus tant au verdissement des pratiques individuelles et collectives.

Cette opinion se retrouve plus fréquemment chez les enquêtés dont le niveau de vie est le plus élevé (54 %, soit 16 points de plus que chez ceux ayant un faible niveau de vie), chez les 56-65 ans (54 %, contre 42 % des 36-45 ans) et chez les hommes (52 %, contre 44 % des femmes).

Face à des changements climatiques souvent perçus comme inéluctables, 28 % des Français jugent que l’heure n’est plus aux politiques d’atténuation et qu’il faut désormais prioriser les politiques d’adaptation. C’est particulièrement le cas chez les moins diplômés (36 %, soit 20 points de plus que chez les enquêtés diplômés du supérieur), les ouvriers (34 %, contre 18 % des cadres et professions intellectuelles supérieures) et les 65 ans et plus (32 %, contre 17 % des 35 ans et moins).

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Effets du changement climatique : une perception différenciée

Source : Sciences Po – SDES – baromètre Elipss Environnement, 2024

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Une large part des Français estime que le changement a d’ores et déjà des effets dans leur vie quotidienne. Une part partie toutefois moins importante des actifs estime également que les conséquences du changement climatique se font déjà sentir dans leur vie professionnelle (graphique 2).

Sur ce sujet, la polarisation des opinions renvoie en premier lieu à des considérations idéologiques : les enquêtés se situant le plus à gauche de l’échiquier politique ont nettement plus tendance à déclarer qu’ils ressentent d’ores et déjà les effets du changement climatique dans leur vie quotidienne (59 %) et dans leur vie professionnelle (39 %). En revanche, les enquêtés se situant plus à droite ont plus tendance que les autres à penser que le changement climatique n’aura pas de conséquences pour eux dans leur quotidien (10 %, contre 5 % en moyenne) ou dans leur activité professionnelle (26 %, soit 8 points de plus que la moyenne).

De manière générale, les enquêtés ayant un niveau d’études élevé et les moins de 36 ans semblent plus sensibles aux conséquences du changement climatique dans leur vie que les personnes peu ou pas diplômées et les 56-65 ans.

Si une majorité des travailleurs estime que le changement climatique va avoir des effets sur leur vie professionnelle à court ou moyen terme, un actif sur cinq estime toutefois que son activité professionnelle ne contribue pas du tout à l’accroissement de l’effet de serre. Par ailleurs, la part de ceux jugeant que leur activité professionnelle a un impact sur le changement climatique a baissé, passant de 40 % en 2023 à 32 % en 2024.

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Des mesures diversement souhaitées

Source : Sciences Po – SDES – baromètre Elipss Environnement, 2024

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Interrogés sur différentes façons d’agir pour protéger l’environnement et lutter contre le changement climatique, les enquêtés semblent globalement bien disposés vis-à-vis de ces modalités d’action publique, à l’exception de celles touchant à l’automobile (graphique 3).

Alors que ces politiques publiques suscitent un vif débat dans la sphère politique, la lutte contre l’artificialisation des sols et le renforcement des normes agricoles semblent susciter une forte adhésion. Il en va de même concernant le subventionnement accru des billets des transports publics et l’obligation faite aux propriétaires de procéder à la rénovation énergétique des logements qu’ils mettent en location. Dans une moindre mesure, les Français jugent aussi souhaitables une augmentation des taxes sur les billets d’avion, le développement de l’offre d’électricité décarbonée (éolien et nucléaire) et l’accroissement de la part des menus végétariens et bios dans la restauration collective.

En revanche, ils se montrent plus réticents à l’égard des mesures qui touchent à la mobilité automobile, ces mesures les concernant souvent très directement (83 % des ménages disposent d’une voiture en 2022, selon le recensement de la population). Ainsi, une majorité des enquêtés ne souhaite pas que la vente de voitures thermiques neuves soit interdite à compter de 2035. Et cette interdiction en 2035 est perçue négativement par 72 % des ruraux (soit 23 points de plus que dans l’agglomération parisienne). De même, la moitié des personnes interrogées ne veut pas que l’accès des centres-villes soit limité aux véhicules électriques ou hybrides. Pour trois Français sur cinq, il est par ailleurs peu ou pas souhaitable d’augmenter les taxes sur les carburants et autres énergies fossiles.

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Craintes sur le pouvoir d’achat

Une part croissante des Français s’inquiète des impacts négatifs que les mesures mises en œuvre pour lutter contre le changement climatique pourraient avoir sur leur pouvoir d’achat (67 % jugent cela probable, soit 4 points de plus qu’en 2023). Environ un tiers d’entre eux estiment que ces mesures pourraient nuire à l’économie française (39 %, + 8 points) ou à leur mode de vie (34 %, + 3 points). Dans une moindre mesure, 16 % des Français craignent que cela mette leur travail en danger.

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Éco-anxiété

Source : Sciences Po – SDES – baromètre Elipss Environnement, 2024

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Environ 11 % des enquêtés font état de « symptômes éco-anxieux » : pour 3 %, le niveau d’éco-anxiété est estimé « très fort » et pour 8 % « assez fort », un résultat proche de celui issu d’une récente étude de l’Ademe sur le sujet. L’éco-anxiété concerne les Français de tous âges même si les 36-45 ans se déclarent un peu plus anxieux que la moyenne.

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En savoir plus

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