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Publié le 27 mai 2025

Paquet « Omnibus » – le Parlement européen soutient la simplification du mécanisme européen d’ajustement carbone aux frontières (MACF)

Par : Sophie Sanchez

Modifié le : 30/05/2025
Réf . : 2025_05_07

© D.R.

Les députés européens ont adopté jeudi 22 mai 2025 dans le cadre du train de mesures dit « Omnibus » la simplification proposée par la Commission européenne du mécanisme d’ajustement carbone aux frontières. Les petits importateurs (PME, particuliers) en seront exemptés. Le Parlement assure que « L’ambition environnementale est préservée : 99 % des émissions de CO2 liées aux importations de fer, d’acier, d’aluminium et de ciment resteront couvertes » par le dispositif.  Le Conseil de l’UE a adopté à son tour cette proposition la Commission mardi 27 mai 2025.

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Contexte

Le mécanisme européen d’ajustement carbone aux frontières  ou MACF – également connu sous l’acronyme anglais CBAM (Carbon Border Adjustment Mechanism) – est un mécanisme dont l’entrée en vigueur de la phase définitive est prévue en 2026. Cet instrument de l’Union européenne vise à garantir une égalité de prix du carbone entre les produits européens soumis au système d’échange de quotas d’émission (SEQE-UE) et les marchandises importées.

L’accord politique entre la Commission, le Parlement et les États-Membres qui a donné lieu à la mise en place du MACF remonte à décembre 2022. Le texte établissant le règlement (UE) 2023/956 a été publié le 10 mai 2023. Une phase de transition a été prévue, elle a débuté en 2023 et doit se terminer à la fin 2025. Le MACF s’appliquera dans son régime définitif à partir de 2026.

Le MACF vise à éviter les fuites de carbone – qu’elles soient le fait d’entreprises situées dans l’UE qui déplacent leur production à forte intensité de carbone à l’étranger vers des pays où la régulation climatique est moins stricte, ou d’importateurs qui remplacent des produits de l’UE par des importations plus intensives en carbone.

Le MACF est un mécanisme fondamental pour garantir que les efforts de décarbonation de l’UE ne soient pas réduits à néant. Pour ce faire, il est prévu d’appliquer à partir de 2026 un prix du carbone ou « taxe carbone » aux importations équivalent à celui payé par les producteurs européens. Il s’agit à la fois de fixer un prix équitable du carbone émis lors de la production de biens à forte intensité de CO2 entrant dans l’UE, et d’encourager une production industrielle plus propre dans les pays non-membres de l’UE.

En confirmant qu’un prix a été payé pour les émissions de carbone incorporées générées, autrement dit les émissions intrinsèques de carbone, lors de la production de certains biens importés dans l’UE, le MACF doit permettre de garantir que le prix du carbone des importations est équivalent au prix du carbone de la production nationale, et que les objectifs climatiques de l’UE ne sont pas compromis. Le MACF est conçu pour être compatible avec les règles de l’OMC.

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Train de mesures de simplification « Omnibus »

Dans le cadre du train de mesures de simplification « Omnibus » présenté le 26 février 2025, la Commission européenne a proposé un ensemble de modifications afin de simplifier le MACF et réduire les formalités administratives. Ces modifications ont été validées par le Parlement jeudi 22 mai 2025 par 564 voix pour, 20 contre et 12 abstentions. Le Parlement est désormais prêt à entamer les négociations avec le Conseil sur la forme finale de la législation.

Ainsi la Commission a proposé pour réduire la charge administrative des PME et des importateurs occasionnels de simplifier le MACF, en introduisant une nouvelle exemption de seuil de 50 tonnes de masse. 90 % des importateurs seront ainsi exemptés sachant qu’ils importent de petites quantités de marchandises, représentant de très petites quantités d’émissions incorporées en provenance de pays tiers – fait valoir la Commission.

Pour autant, les objectifs environnementaux du mécanisme demeurent atteignables, puisque, de même source, 99 % des émissions totales de CO2 liées aux importations de fer, d’acier, d’aluminium, de ciment et d’engrais resteront couvertes par les règles et seront donc toujours dans le champ d’application du MACF.

En effet, afin de limiter la complexité du dispositif, il est prévu que le MACF s’applique dans un premier temps uniquement à certaines matières premières ou marchandises dites « simples » fortement exposées au risque de fuite de carbone :

  • Acier,
  • Ciment,
  • Aluminium,
  • Engrais azotés,
  • Hydrogène,
  • Importations d’électricité.

Ces secteurs représentent en cumulé environ la moitié des émissions industrielles dans l’UE.

L’analyse de Houssem Belhouane, expert MACF & politiques climatiques internationales au Citepa



© Peter Grunnar

« L’exemption des petits importateurs constitue une avancée pragmatique pour le déploiement opérationnel du MACF à partir de 2026. Elle permet d’éviter de mobiliser des ressources administratives pour des volumes d’émissions négligeables, tout en préservant l’ambition environnementale globale du mécanisme.

Cette simplification ne remet donc pas en cause la couverture des principaux flux à fort contenu carbone, comme les importations industrielles en vrac ou à forte intensité énergétique. À noter que les 50 tonnes évoquées ne sont pas des émissions de CO₂, mais une masse de produits importés – un détail essentiel pour bien comprendre la portée de cette exemption.

Il faudra cependant veiller, dans les prochaines étapes, à éviter les effets de seuil ou les risques de fractionnement artificiel des importations par les opérateurs. Le renforcement des dispositions anti-contournement voté par le Parlement va dans le bon sens. »

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Pour les importations concernées, les modifications simplifient aussi le processus d’autorisation des déclarants (entités souhaitant importer des marchandises soumises au MACF), le calcul des émissions, ainsi que la gestion des obligations financières liées au mécanisme, tout en renforçant les dispositions anti-contournement.

Les prochaines étapes incluront, au cours de l’année 2025, un examen complet du MACF afin d’évaluer son extension potentielle à d’autres secteurs du SEQE (système d’échange de quotas d’émission), aux produits en aval ainsi qu’aux émissions indirectes. La Commission examinera également, dans ce contexte, comment aider les exportateurs européens de produits à risque de fuite de carbone, et fera une proposition législative en ce sens au début de 2026.

À l’issue du vote, le rapporteur Antonio Decaro (Socialistes et démocrates, Italie) a déclaré : « Le MACF est un instrument crucial pour aider l’Union à prévenir les fuites de carbone et à encourager l’action climatique au-delà de ses frontières. Je me réjouis donc que le Parlement ait décidé de ne pas rouvrir d’autres dispositions de la législation relative au MACF. Cette approche nous permet de simplifier les procédures pour les entreprises sans pour autant démanteler ou affaiblir le mécanisme. Nous continuerons à agir rapidement afin d’apporter la clarté juridique et des certitudes à l’ensemble des parties prenantes du MACF ».

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En savoir plus

Modifications proposées au MACF

Vote sur la simplification de l’instrument de lutte contre les fuites de carbone | 21-05-2025 | Actualité | Parlement européen

Simplifying EU’s carbon border adjustment mechanism: Council agrees negotiating position – Consilium

Mécanisme d’Ajustement Carbone aux Frontières (MACF) | Ministères Aménagement du territoire Transition écologique

Mécanisme d’ajustement carbone aux frontières (MACF) | Access2Markets

Règlement (UE) 2023/956 établissant un mécanisme d’ajustement carbone aux frontières

Retour sur la Journée d’études 2024 du Citepa consacrée à la Comptabilité carbone – Citepa

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