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Le projet de loi énergie-climat renforcé par l’accord du Sénat et de l’Assemblée

  • Réf. : 2019_09_a2
  • Publié le: 25 juillet 2019
  • Date de mise à jour: 22 octobre 2019
  • France

Après l’adoption du projet de loi énergie-climat par l’Assemblée nationale le 28 juin 2019 (voir texte adopté), le Sénat l’a adopté le 18 juillet 2019 moyennant plusieurs amendements (voir texte adopté).

Pour opérer les derniers arbitrages restés en suspens, une commission mixte paritaire (CMP), réunissant des représentants des deux chambres du Parlement, a été convoquée le 25 juillet 2019 en vue de dégager un accord. Les députés et les sénateurs sont ainsi parvenus ce même jour à un accord sur un texte de compromis, ouvrant la voie à l’adoption définitive du projet de loi à la rentrée 2019 [dans le cadre de la procédure législative accélérée (une seule lecture par chambre), engagée par le Gouvernement le 30 avril 2019]. Le texte adopté par la CMP, qui compte désormais 85 pages, renforce le projet de loi initial [de sept pages, présenté au Conseil des Ministres le 30 avril 2019].

Que retenir du texte de compromis ? Dans son article 1er, il :

  • y inscrit « l’urgence écologique et climatique » : l’ensemble des objectifs nationaux climat-énergie est fixé [par la loi 2015-992 sur la transition énergétique, LTE (article 1er)] « pour [y] répondre » ;
  • remplace [à l’article 1er de la LTE] l’objectif Facteur 4 par l’objectif d’atteindre la neutralité carbone à l’horizon 2050 en divisant les émissions de gaz à effet de serre (GES) par un facteur supérieur à six, par rapport à 1990 (voir nos articles sur le facteur 4 et sur la loi climat-énergie) [le simple objectif de neutralité carbone proposé dans l’avant-projet de loi avait été jugé moins concret] ;
  • définit le concept de neutralité carbone conformément à l’Accord de Paris [article 4] : « équilibre, sur le territoire national, entre les émissions anthropiques par les sources et les absorptions anthropiques par les puits de GES » ;
  • précise que ces émissions et absorptions sont compta-bilisées selon les mêmes règles que celles applicables aux inventaires nationaux de GES, sans tenir compte des crédits internationaux de compensation carbone ;
  • ajoute [article 1er, LTE] un objectif intermédiaire de réduction de la consommation énergétique finale, ce qui donne désormais :
  • -7% environ en 2023 (base 2012) [nouvel objectif],
  • -20% en 2030 (base 2012) [objectif initialement fixé par la LTE, devant être abaissé à 17% (l’avant-projet de loi (février 2019)) mais finalement inchangé depuis la première version, présentée le 30 avril 2019],
  • -50% en 2050 (base 2012) [objectif inchangé] ;
  • rehausse [article 1er, LTE] l’objectif de réduction de la consommation énergétique primaire des énergies fossiles en 2030 de 30% à 40% [base 2012], en ajoutant « dans cette perspective, il est mis fin en priorité à l’usage des énergies fossiles les plus émettrices de GES » ;
  • fait passer [article 1er, LTE] l’objectif de porter la part d’énergies renouvelables (EnR) de 32% de la consommation finale brute d’énergie en 2030 à « 33% au moins » ;
  • reporte de 2025 à 2035 l’échéance de l’objectif de réduction de la part du nucléaire de 75% à 50% dans la production d’électricité [conformément aux annonces du Gouvernement, d’abord par l’ancien Ministre de la Transition écologique (7 novembre 2017), puis dans le cadre du projet de programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE – voir p.17) (voir notre article sur le sujet)] ;
  • fixe un nouvel objectif pour la politique énergétique nationale : atteindre, à l’horizon 2030, une part d’hydrogène bas-carbone et renouvelable comprise entre 20 et 40% des consommations totales d’hydrogène et d’hydrogène industriel pour encourager l’usage dans les secteurs de l’industrie, de l’énergie et des transports ;
  • spécifie que la PPE devra identifier les usages pour lesquels l’amélioration de l’efficacité énergétique et la baisse de la consommation d’énergie primaire sont une priorité. Elle devra contenir une feuille de route de la rénovation énergétique des bâtiments, précisant les modalités de mise en œuvre des objectifs de réduction de la consommation énergétique finale (voir ci-dessus) pour les bâtiments à usage résidentiel ou tertiaire ;
  • établit qu’avant le 1er juillet 2023, puis tous les cinq ans, une loi [adoptée par le Parlement donc] devra fixer :
  • les objectifs climat-énergie [de réduction des émissions de GES (pour trois périodes successives de cinq ans), d’utilisation des EnR, de réduction de la consommation d’énergie et de rénovation énergétique des bâtiments (pour deux périodes successives de cinq ans)],
  • les niveaux minimaux et maximaux des obligations d’économie d’énergie [pour une période de cinq ans]
  • les priorités d’action de la politique énergétique nationale.

[Cette obligation représente une nouveauté importante car jusque-là, les objectifs climat-énergie étaient uniquement fixés par la PPE, adoptée par décret en Conseil des Ministres] ;

  • établit l’obligation pour les budgets carbone [fixés par décret pour des périodes successives de cinq ans (LTE, article 173 V)] de définir également :
  • un plafond indicatif des émissions de GES induites par les liaisons de transport au départ ou à destination de la France et non comptabilisées dans les budgets carbone, dénommé “budget carbone spécifique au transport international [obligation qui s’applique à partir du 1er janvier 2022],
  • un plafond indicatif des émissions de GES nommé “empreinte carbone de la France”, calculé en ajoutant aux budgets carbone fixés les émissions engendrées par la production et le transport vers la France de biens et de services importés et en soustrayant celles engendrées par la production de biens et de services exportés ;
  • établit l’obligation pour le Gouvernement de remettre au Parlement, avant le 1er octobre 2019, un rapport sur les incidences positives et négatives du projet de loi de finances pour 2020 sur le réchauffement climatique. Cette évaluation est réalisée notamment au regard des objectifs de réduction des émissions de GES de la France.

Par ailleurs, la future loi énergie-climat établit les modalités de fonctionnement du Haut Conseil pour le Climat (voir notre article sur le sujet) (article 2) et établit [dans le cadre de la sortie du charbon prévue par le Plan climat du 6 juillet 2017 (voir notre article sur le sujet)] l’obligation pour l’autorité administrative de définir un plafond d’émissions applicable à compter du 1er janvier 2022 pour les installations de production d’électricité à partir de combustibles fossiles situées sur le territoire métropolitain continental et émettant plus de 0,550 tonnes de CO2e/MWh (article 3). De plus, la future loi oblige les entreprises et les collectivités tenues d’établir un bilan d’émissions de GES (voir notre article sur le sujet) à y joindre également un plan de transition pour réduire leurs émissions de GES présentant les objectifs, moyens et actions envisagés à cette fin (article 3 undecies). Enfin, elle renforce la lutte contre les fraudes pour les certificats d’économies d’énergie (article 4 quater).

 

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