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Réduction des émissions de polluants : la Commission demande formellement à la France de transposer correctement en droit national la directive NEC 2

  • Réf. : 2020_05_a05
  • Publié le: 19 mai 2020
  • Date de mise à jour: 12 septembre 2024
  • France
  • UE

Le 14 mai 2020, la Commission européenne a annoncé qu’elle allait engager une procédure d’infraction (lire le dernier encadré ci-dessous) à l’encontre de la France pour transposition incorrecte de la directive 2016/2284 concernant la réduction des émissions nationales de certains polluants atmosphériques (dite NEC 2).

 

La directive NEC 2

La directive (UE) 2016/2284 du Parlement européen et du Conseil du 14 décembre 2016 concernant la réduction des émissions nationales de certains polluants atmosphériques (dite NEC 2) (lire notre dossier de fond sur le sujet) est venue réviser la directive 2001/81/CE relative aux plafonds d’émission nationaux, dite directive NEC 1. La directive NEC 2 étend la période de la directive NEC 1 de 2020 initialement à 2030 et au-delà. De plus, elle aligne le droit de l’UE sur les engagements découlant de la révision du Protocole de Göteborg adoptée le 4 mai 2012 (lire notre article sur le sujet). Entrée en vigueur : 31 décembre 2016, Date limite de transposition : 1er juillet 2018 (date à laquelle la directive NEC 1 a été abrogée).

 

Les obligations de la directive NEC

La directive NEC 2 oblige les Etats membres (EM) à :

réaliser des réductions d’émissions, en 2020 et en 2030 pour cinq polluants (voir encadré ci-dessous).

Les objectifs de réduction de la NEC 2

Les EM doivent limiter leurs émissions anthropiques annuelles de cinq polluants : SO2, NOx, NH3, COVNM et PM2,5 conformément aux engagements nationaux de réduction fixés à l’annexe II de la directive (article 4). Ces engagements portent sur deux échéances : 2020 et 2030. Cela signifie que les engagements 2020 doivent être respectés sur l’ensemble de la période 2020-2029 (au moins).

Contrairement à la directive NEC, ces engagements ne sont pas des plafonds (en kt), mais des objectifs relatifs de réduction (en % par rapport à l’année de référence 2005). A noter qu’afin de garantir la continuité dans l’amélioration de la qualité de l’air, les plafonds d’émission nationaux établis par la directive 2001/81/CE ont continué de s’appliquer jusqu’au 31 décembre 2019.

Engagements nationaux de réduction fixés pour la France (année de référence : 2005) (cf. annexe II)

Ces engagements ont été repris dans le plan national de réduction des émissions de polluants (PREPA), adopté le 10 mai 2017 (lire notre article sur le sujet).

 

– élaborer et mettre en œuvre un programme national de lutte contre la pollution de l’air, que la France a transmis (avec six mois de retard) en octobre 2019.

 

Les NAPCP

La directive NEC 2 oblige les EM à élaborer, à adopter et à mettre en œuvre des programmes nationaux de lutte contre la pollution de l’air (National Air Pollution Control Programmes ou NAPCP), dont le contenu minimal est défini à l’annexe III. Les EM devaient soumettre leur premier programme national avant le 1er avril 2019. Celui-ci est à mettre à jour au minimum tous les quatre ans par la suite (article 6). C’est cette obligation de mise à jour qui, selon la Commission, n’a pas été correctement transposée dans le droit français. Le 1er mars 2019, la Commission avait publié des orientations pour l’élaboration des NAPCP. Or, la France avait déjà préalablement adopté (cf décret n°2017-949) son Plan national de réduction des émissions de polluants atmosphériques (PREPA), au titre de la Loi sur la Transition Energétique [ loi n°2015-992 , article 64 ], pour transposer les dispositions relatives au NAPCP de la directive NEC 2. 

La Commission avait indiqué le 13 septembre 2019 que, plus de cinq mois après la date limite, 11 Etats membres (dont la France) n’avaient pas encore soumis leur premier NAPCP. La France a remis son NAPCP le 9 octobre 2019. Au 18 mai 2020, seuls quatre EM n’avaient pas communiqué leur NAPCP (Grèce, Italie, Luxembourg et Roumanie) (voir tableau de bord de la DG Environnement).

 

La procédure d’infraction

Concrètement, la Commission a annoncé avoir décidé de lancer la première étape de la procédure d’infraction. Ainsi, elle s’apprête à adresser une lettre de mise en demeure au Gouvernement français (plus précisément le MTES) au motif que la France n’a pas transposé en droit national français l’obligation fixée par la directive 2016/2284 à son article 6.3 : « Les États membres mettent à jour leurs programmes nationaux de lutte contre la pollution atmosphérique au minimum tous les quatre ans« . L’infraction ne porte donc pas sur un non-respect, par la France, ni des engagements de réduction, ni de l’échéance de remise des NAPCP, mais sur un problème de transposition réglementaire en droit français.

 

Qu’est-ce que la procédure d’infraction de l’UE ?

En tant que « gardienne » des Traités de l’UE, la Commission est chargée de veiller, avec la Cour de Justice de l’UE (CJUE), à ce que le droit européen soit appliqué correctement dans les Etats membres (EM).

En vertu du Traité sur le fonctionnement de l’UE (TFUE, article 258), la Commission peut poursuivre en justice un EM qui manque aux obligations qui lui incombent au titre de la législation de l’UE. Elle engage ainsi une procédure juridique dite procédure d’infraction qui se déroule en quatre étapes :

  • la Commission envoie une lettre de mise en demeure [demande d’informations] à l’EM,
  • si elle n’est pas satisfaite des informations reçues et conclut que l’EM ne s’acquitte pas de ses obligations juridiques, elle peut ensuite lui envoyer un avis motivé [demande formelle de s’y conformer],
  • si l’EM ne s’y conforme toujours pas, la Commission peut alors décider de l’assigner devant la CJUE qui, si elle le juge nécessaire, rend un arrêt contraignant,
  • si malgré ce 1er arrêt, l’EM ne remédie toujours pas au problème, la Commission peut saisir une 2e fois la CJUE, en lui demandant d’imposer des sanctions financières [somme forfaitaire et/ou indemnité journalière], via un 2e arrêt [où la CJUE peut modifier le montant proposé par la Commission].

Ces sanctions financières sont calculées en tenant compte :

  • de l’importance des règles violées et de l’incidence de l’infraction sur les intérêts généraux et particuliers,
  • de la période pendant laquelle le droit de l’UE n’a pas été appliqué,
  • de la capacité de paiement de l’Etat membre, garantissant l’effet dissuasif de l’amende.

Dans son 2e arrêt, la CJUE peut modifier le montant proposé par la Commission.

 

La France n’est pas le seul EM visé par cette action de la Commission, la Commission ayant indiqué qu’elle allait envoyer une lettre de mise en demeure à Chypre pour la même raison et une lettre de mise en demeure à la Lituanie pour transposition incorrecte des dispositions de la directive prévoyant des flexibilités (article 5 et annexe IV, partie 4). Au titre de celles-ci, les États membres peuvent ajuster les inventaires nationaux d’émissions des cinq polluants visés lorsque l’application de méthodes améliorées d’inventaire des émissions, mises à jour conformément à l’évolution des connaissances scientifiques, est susceptible d’entraîner le non-respect de leurs engagements nationaux de réduction des émissions.

La France, ainsi que Chypre et la Lituanie, ont quatre mois pour rectifier la situation, faute de quoi, la Commission pourrait décider de lancer la 2e phase de la procédure d’infraction (envoi d’un avis motivé).

A noter enfin que, dans un autre contexte, la France avait déjà été condamnée le 24 octobre 2019 par la Cour de Justice de l’UE pour non-respect de la directive 2008/50/CE relative à la qualité de l’air ambiant, et plus spécifiquement pour “dépassement de manière systématique et persistent” des valeurs limites de concentration pour le dioxyde d’azote (NO2).

Lire notre article sur le sujet.

 

En savoir plus

Voir communiqué de la Commission.

Voir les pages consacrées à la réduction des émissions de polluants sur le site de la DG Environnement.

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