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Report de la COP-26 en novembre 2021 : quelles conséquences?

  • Réf. : 2020_05_a11
  • Publié le: 29 mai 2020
  • Date de mise à jour: 2 juin 2020
  • International

Le report d’un an de la COP-26 en raison de la crise posée par le COVID-19 pose de nombreuses questions.

Le 1er avril 2020, le Secrétariat à la CCNUCC avait annoncé le que la 26e Conférence des Parties (COP-26), qui devait se tenir à Glasgow (Ecosse, Royaume-Uni) du 9 au 20 novembre 2020, était reportée à une date ultérieure (non encore arrêtée) en raison du Covid-19 (lire notre article sur le sujet). Le même jour, il avait aussi annoncé le report de la 52e session des deux organes subsidiaires (SBI-52 [mise en œuvre] et SBSTA-52 [conseil scientifique et technique]). Initialement prévue du 1er au 11 juin 2020 à Bonn, elles ont été reprogrammées du 4 au 12 octobre 2020 à Bonn.

Néanmoins il était généralement attendu que la COP-26 ne soit reportée que de quelques mois, pour se tenir début 2021. Ainsi, fin 2021, pourrait se tenir la COP-27. Or, le 27 mai 2020, une lettre du Gouvernement britannique (Cabinet Office) (destinée au Secrétariat de la CCNUCC a été diffusée publiquement et rapportée par les médias britanniques (BBC, The Guardian). Le Cabinet demande explicitement à la CCNUCC de reporter la COP-26 fin 2021, du 1er au 12 novembre 2021.

Le lendemain (le 28 mai 2020), la CCNUCC a annoncé que le Bureau de la Conférence des Parties (au sein de la CCNUCC basé à Bonn), avait décidé d’accepter cette proposition. La CCNUCC insiste néanmoins sur l’importance de maintenir l’enjeu climatique, notamment au travers des prochaines sessions inter-cop de négociations techniques (« the June momentum »), dans un contexte de relances économiques post-crise qui peut être opportun. Quelles sont les impacts potentiels qu’un tel délai pourrait avoir sur les négociations climat internationales et plus généralement sur la possibilité de respecter les objectifs de 2°C, voire de 1,5°C.

Une année sans COP ?

  • Il s’agit concrètement de reporter d’un an la COP-26, et donc de générer une « année sans COP », une première. Dans le passé, il est arrivé suite à des difficiles négociations qu’il y ait des « COPbis » (cf. COP-6 bis en 2001), donc une année avec deux COP, mais jamais une année sans COP du tout. Certes, les négociations internationales ne se limitent pas aux COP : les sessions dites « inter-COP », sessions techniques et politiques, permettent d’avancer grandement sur les travaux et facilitent la finalisation des décisions lors des COP. Mais c’est justement parce qu’elles préparent les COP qui arrivent quelques mois après que ces sessions travaillent avec un sentiment d’urgence pour faire avancer les sujets non résolus. Même des évènements plus politiques de haut niveau, comme les sommets action climat, n’ont pas même effet d’entraînement que les COP. Il est par ailleurs peu probable de compter sur un élan significatif lors des prochains G7 (présidé par les Etats-Unis) et G20 (présidé par l’Arabie Saoudite). Symboliquement, une année sans COP ne sera pas sans conséquence sur la dynamique d’engagement des acteurs étatiques et non étatiques.

Moins de NDC mises à jour ?

  • La remise, par les pays, de leur NDC (contribution déterminée au niveau national), c’est-à-dire leur engagement de réduction d’émissions des GES, dont l’ambition doit être revue à la hausse, était attendue pour cette année 2020. Actuellement, si les actions des premières NDC étaient intégralement mises en œuvre, cela conduirait à un réchauffement de 3°C (source : ONU Environnement, Emissions Gap Report 2019lire notre article sur le sujet) : leur mise à jour est donc essentielle. Seuls 10 sur les 188 Parties à l’Accord de Paris ont, à ce jour (27 mai 2020), déposé leur NDC mise à jour (voir liste des pays et lire notre article « Le point sur les NDC 2 au 5 mai 2020 »). Beaucoup d’autres pays comptaient sur la tenue de la COP-26 pour y remettre leurs nouveaux engagements, et la COP-26 aurait permis, comme souvent, d’engendrer une dynamique favorisant l’avancée de chaque pays.

Le régime de Paris débutera sans que ses règles d’application soient finalisées

  • Le 1er janvier 2021 entre en application l’Accord de Paris. Or toutes ces règles de fonctionnement ne sont pas finalisées. C’était justement à la COP-26, initialement prévue en novembre 2020 (à peine deux mois avant le début du régime de Paris), que les règles de mise en œuvre devaient être finalisées. L’enjeu principal de la COP-26 est donc de finaliser la définition des règles de mise en œuvre de l’article 6 (mécanismes de marché), dernier volet de l’Accord de Paris resté en suspens lors de la COP-25 (lire notre article sur le bilan de la COP-25), comme lors de la COP-24 d’ailleurs (lire notre dossier de fond sur le sujet, p.58). Les travaux des SBI-52 et SBSTA-52 pourront faire avancer ces deux sujets mais il faudra attendre la COP-26 pour entériner des décisions finales (Le SBI et le SBSTA sont notamment chargés de préparer des projets de décision devant être examinées et adoptées à la COP suivante). Ainsi, l’Accord de Paris va entrer en application alors que certaines de ses règles de fonctionnement restent à formaliser.

L’urgence d’agir d’ici 2030

  • Le rapport spécial du Giec de 2018 sur le réchauffement à +1,5°C (lire notre dossier de fond sur le sujet) a souligné la nécessité de réduire de 45% entre 2010 et 2030 les émissions mondiales de CO2 pour parvenir à limiter le réchauffement à +1,5°C. Compte tenu du délai entre la publication de ce rapport (2018) et cette échéance de 2030, beaucoup d’observateurs ont relevé qu’il ne restait que 12 ans pour générer des changements structurels massifs et parvenir à des réductions importantes et durables des émissions. Il ne reste désormais que 10 ans pour parvenir à ces réductions, tout retard pris dans l’avancement des engagements et des actions climat prend donc un poids plus important, compte tenu de cet objectif.

Une fenêtre d’opportunité inédite

  • Le contexte actuel est marqué, d’une part, par la crise du Covid-19, avec des réductions temporaires massives des émissions de GES, le bouleversement de secteurs économiques entiers et, d’autre part, par la mise en place de plans de relance. L’occasion est donc forte de rediriger des investissements vers le développement bas carbone et de relancer l’économie de manière compatible avec les objectifs climatiques. Or plus la COP-26 aura lieu à une date tardive, plus cette fenêtre d’opportunité économique et politique risque de se refermer.

Incertitudes sur les autres évènements

  • Enfin, un décalage d’un an de la COP-26 engendre une série d’incertitudes sur les prochains événements climat et l’organisation du régime de Paris. Quand sera organisée la COP-27 ? Tous les événements et réunions climat sont-ils décalés d’un an ? Qu’en est-il des calendriers des différents objectifs (mise à jour des NDC, bilan mondial (Global Stocktake,…) ?

 

Voir communiqué du Gouvernement britannique sur la confirmation du report de la COP-26.

Lire notre article sur les principaux enjeux de la COP-26 (voir encadré).

 

 

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