Journal de la COP-30 | Jour 11 : 21 novembre
Par : Mark Tuddenham
Retrouvez les documents de référence qui permettent de comprendre les enjeux de la COP de Belém et de suivre ses négociations :
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© UN Climate Change
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Sommaire
- Tour d’horizon des nouveaux projets de texte clés publiés par la Présidence ce matin
- Projet de décision « mutirão »
- Bilan global
- Programme de travail sur la transition juste (JTWP)
- Objectif mondial sur l’adaptation
- Questions liées au fonds d’adaptation
- Pertes et préjudices
- Programme de travail sur l’ambition et la mise en œuvre en matière d’atténuation (MWP)
- Communication biennale d’informations sur le financement climat (article 9.5)
- L’article 2.1 (c)
- Rapportage et examen au titre de l’article 13 (cadre de transparence renforcée)
- Opposition par plusieurs Parties au projet de décision « mutirão »
- Flash info
- Programme de la onzième journée
- Retour sur la onzième journée
- Autres temps forts de la onzième journée
- Dans les coulisses
- En savoir plus
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Tour d’horizon des nouveaux projets de texte clés publiés par la Présidence ce matin
La Présidence de la COP-30 a publié ce matin vers 5h heure locale (9h heure française) les nouvelles versions des 15 projets de texte regroupés dans le cadre du « paquet politique de Belém« , au premier rang desquelles :
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Projet de décision « mutirão »
Proposition de texte élaborée par la Présidence : version du 21 nov. 2025 @ 03h00, 7p. composée de 58 paragraphes au total (voir version précédente : version du 18 nov. 2025 @ 07h30, 9 p).
L’ambition de cette deuxième version est moins forte que celle de la première version.
Points clés :
Combustibles fossiles
- aucune mention d’une feuille de route sur la transition vers la sortie des combustibles fossiles (malgré le soutien de plus en plus de Parties à une telle initiative. L’option 2 du paragraphe 35 de la première version a été supprimée),
- aucune mention des combustibles fossiles (cf. les deux mentions dans la première version – option 2 et option 3 du paragraphe 35 – ont été supprimées),
- aucune référence au paragraphe 28 de la décision sur le bilan mondial de Dubaï (décision 1/CMA.5).
Ambition
- la CMA décide de lancer un accélérateur mondial sur la mise en oeuvre volontaire (paragraphe 41),
- la CMA décide de lancer une mission vers +1,5°C pilotée par les Présidences de la CMA-6, de la CMA-7 et de la CMA-8 (paragraphe 42).
Financement
- la CMA décide d’accélérer d’urgence la mise en oeuvre d’actions permettant l’accroissement du financement (pour les pays en développement) provenant de toutes les sources publiques et privées pour atteindre 1 300 Md$/an d’ici 2035 et souligne le besoin urgent de rester sur une trajectoire vers la réalisation de l’objectif de mobiliser au moins 300 Md$/an d’ici 2035, les pays industrialisés étant les moteurs de cette mobilisation (paragraphe 48) ;
- la CMA souligne le besoin urgent de fournir et de mobiliser des ressources publiques et à base de subventions et de financement hautement concessionnels (à faible taux d’intérêt), notamment pour l’adaptation dans les pays en développement, surtout ceux qui sont particulièrement vulnérables et qui ont de faibles capacités budgétaires (pays les moins avancés et petits Etats insulaires) (paragraphe 49) ;
- la CMA décide de mettre en place une table ronde ministérielle de haut niveau pour réfléchir sur la mise en oeuvre de l’objectif de 1 300 Md$/an, y compris sur les éléments quantitatifs et qualitatifs liés à la mise à disposition du financement climat (paragraphe 52) ;
- la CMA appelle [les Parties et les acteurs non-étatiques] à tripler le financement de l’adaptation d’ici 2030 par rapport aux niveaux de 2025 [formulation moins ambitieuse par rapport à celle de l’option 1 du paragraphe 56 dans la version précédente : « la CMA décide d’établir un objectif de tripler le financement de l’adaptation... »] (paragraphe 53) ;
- la CMA décide de mettre en place un programme de travail de deux ans sur le financement climat, y compris sur l’article 9.1 dans le contexte de l’article 9 (financement) dans son ensemble (paragraphe 54).
Commerce
- la CMA demande aux SB de mener un dialogue sur trois ans sur le commerce lors de leurs sessions SB-64 (juin 2026), SB-66 (juin 2027) et SB-68 (juin 2028) (paragraphe 56).
Bilan global
Proposition de texte élaborée par la Présidence : version du 21 nov. 2025 @ 03h00, 3 p. Voir version précédente (version 18 nov. 2025 @ 02h00, 4p). Cette dernière avait rassemblé en un seul texte les trois volets de négociation sur le bilan global (dialogue sur la mise en œuvre des résultats du bilan mondial (Global Stocktake ou GST) ; rapports 2024 et 2025 du dialogue annuel sur la mise en œuvre des résultats du bilan mondial ; éléments procéduraux et logistiques du processus GST).
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Programme de travail sur la transition juste (JTWP)
Proposition de texte élaborée par la Présidence : version du 21 nov. 2025 @ 03h00, 6p. Voir versions précédentes : version du 18 nov. 2025 @06h07, 9 p) ; version du 17 nov. 2025 @11h13, 9p ; version du 14 nov. 2025 @11h30, 8p). Cette nouvelle version prévoit la mise en place d’un « mécanisme de transition juste ». Ce point a été très épineux au cours des négociations. La société civile a développé le concept du mécanisme d’action de Belém (BAM) au cours de l’année écoulée et le groupe G77+Chine l’a présenté dans le cadre du JTWP la première semaine, le 12 novembre (lire notre Journal de la COP-30 | Jour 3). Cependant, l’UE, le Royaume-Uni et d’autres pays s’y sont opposés, le premier proposant à la place un « plan d’actions » comme alternative.
Par ailleurs, dans cette nouvelle version, les éléments de texte sur les risques sociaux et environnementaux liés à l’extraction et au traitement des minéraux critiques pour les chaînes d’approvisionnement en énergie propre (cf. paragraphe 12 (u) de la version précédente : version du 18 nov. 2025 @06h07, 9 p) ont été supprimés. La Chine, grand producteur, ainsi que la Russie, s’y sont notamment opposées. L’intégration de tels éléments serait une première dans les négociations de la CCNUCC (source : Climate Home News, 14 nov. 2025). Cette suppression a suscité la consternation de la part de plusieurs Parties. La référence aux minéraux critiques avait été ajoutée à la première version du projet de texte du 14 novembre 2025 @ 11h30 avait reconnu « les risques sociaux et environnementaux liés à l’augmentation des chaînes d’approvisionnement pour les technologies d’énergie propre, y compris les risques découlant de l’extraction et du traitement des minéraux critiques » (cf. paragraphe 12(w)).
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Objectif mondial sur l’adaptation
Proposition de texte élaborée par la Présidence : version du 21 nov. 2025 @ 03h00, 9p. Voir versions précédentes : version du 17 nov. 2025 @23h55, 8p) ; version du 15 nov. 2025 @ 10h50) ; version du 14 nov. 2025 @ 13h15). Cette nouvelle version valide l’adoption de certains indicateurs qui seront utilisés pour suivre les progrès des pays en matière d’adaptation. La semaine dernière, le groupe africain et d’autres ont demandé que ces indicateurs ne soient pas adoptés lors de la COP-30 – l’une des principales attentes avant Belém – et qu’un programme de travail de deux ans soit mis en place pour les affiner davantage, en raison des préoccupations liées au financement de l’adaptation.
Cette dernière version comporte une annexe comprenant 59 des 100 indicateurs potentiels, souligne qu’ils « ne créent pas de nouvelles obligations ou engagements financiers » et décide d’établir une « vision Belém-Addis » de deux ans sur l’adaptation afin d’affiner davantage les indicateurs. La seule paire de crochets restante dans le texte vise à permettre l’ajout de l’objectif final de financement de l’adaptation issu du projet de décision mutirão (cf. paragraphe 53 – voir plus haut) qui, dans sa rédaction actuelle, « appelle à des efforts pour tripler le financement de l’adaptation par rapport aux niveaux de 2025 d’ici 2030 ».
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Questions liées au fonds d’adaptation
Proposition de texte élaborée par la Présidence : version du 21 nov. 2025 @ 03h00, 5p.
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Pertes et préjudices
Proposition de la Présidence sur le rapport du fonds pertes et préjudices et recommandations à l’intention du fonds pertes et préjudices : version du 21 nov. 2025 @ 03h00, 5p. Voir version précédente : version du 18 nov. 2025 @07h00, 5p).
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Programme de travail sur l’ambition et la mise en œuvre en matière d’atténuation (MWP)
Proposition de texte élaborée par la Présidence : version du 21 nov. 2025 @ 03h00, 4p. Voir versions précédentes : version du 18 nov. 2025 @ 02h00, 5p ; version du 16 nov. 2025 @ 20h00, 5p ; version du 14 nov. 2025 @ 08h00, 4p ; version du 12 nov. 2025 @ 23h00, 4p).
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Communication biennale d’informations sur le financement climat (article 9.5)
Proposition de texte élaborée par la Présidence sur la compilation et la synthèse des communications biennales d’informations ex ante sur le financement climat conformément à l’article 9.5, et le rapport de synthèse sur l’atelier sur ce sujet : version du 21 nov. 2025 @ 03h00, 3p. Voir version précédente : version du 18 nov. 2025 @23h30, 12p).
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L’article 2.1 (c)
Proposition de la Présidence sur l’article 2.1(c) (alignement des flux de financement mondiaux avec une trajectoire de développement bas-carbone) : proposition de la Présidence de la COP-30 : version du 21 nov. 2025, 3p. Voir version précédente : version du 15 nov. 2025 @22h00, 4p.
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Rapportage et examen au titre de l’article 13 (cadre de transparence renforcée) : mise à disposition de soutien financier et technique aux pays en développement pour le rapportage et le renforcement des capacités
Proposition de texte de la Présidence : version du 21 nov. 2025 @ 03h00, 3p.
C’est la Présidence de la COP-30 qui a rédigé ces nouvelles versions sur la base des consultations qu’elle avait menées hier avant l’incendie (voir ci-après) et après la reprise des négociations hier soir. L’ensemble des nouvelles (et anciennes) versions des 15 projets de texte est disponible ici.
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Opposition par près de 30 Parties au projet de décision « mutirão »
Un groupe de 29 Parties (pays européens, pays d’Amérique latine et petits Etats insulaires) a écrit une lettre à la Présidence, signalant qu’elles rejettent cette 2e version du projet de décision « mutirão », déclarant que « Nous sommes profondément inquiets quant à la proposition de texte soumise aux Parties pour examen, à prendre ou à laisser. » Elles sont formelles : « Nous ne pouvons pas soutenir un résultat qui ne comporte pas de feuille de route pour mettre en oeuvre une transition juste, ordonnée et équitable vers la sortie des combustibles fossiles. Cette attente est partagée par une large majorité des Parties, ainsi que par la science et la société civile qui suivent de près nos travaux. Le monde s’en remet à cette COP pour montrer la continuité et des avancées à la suite du bilan mondial. Toute chose moins ambitieuse serait inévitablement perçue comme étant un recul d’ambition« . Ainsi, elles fixent l’inclusion d’une telle feuille de route comme leur ligne rouge. Par conséquent, « Avec respect mais fermement, nous demandons à la Présidence de présenter une proposition de texte révisée. Le succès de la Présidence réside dans sa capacité à présenter un résultat équilibré et orienté vers l’avenir, plutôt qu’à demander à d’autres d’accepter uniquement ce que les Parties les moins ambitieuses [sous-entendu Arabie saoudite, Russie, Iran, Chine, Inde, Argentine,…] sont prêtes à cautionner ».
Selon le quotidien britannique, The Guardian, parmi les 29 Parties signataires figurent : Allemagne, Autriche, Belgique, Chili, Colombie, Costa Rica, Croatie, Espagne, Estonie, Finlande, France, Guatemala, Honduras, Islande, Irlande, Liechtenstein, Luxembourg, Iles Marshall, Mexique, Monaco, Palau, Panama, Pays-Bas, Royaume-Uni, Slovénie, Suède, Suisse, Tchéquie et Vanuatu.
En clair, si la Présidence ne revoit pas sa copie pour inclure une référence à une feuille de route sur la transition vers la sortie des combustibles fossiles, ces 29 Parties refuseront d’avaliser le projet de décision et donc de permettre à la COP-30 d’aboutir à un accord final global. La Présidence se trouve désormais dans une situation très délicate car elle doit essayer de rallier les pays fermement opposés à une telle feuille de route, au premier rang desquels la Chine, l’Inde, l’Arabie saoudite, la Russie, l’Iran et le Nigeria. Rapprocher ces deux camps opposés va être une tâche très ardue, voire relèverait du parcours du combattant.
Quoi qu’il en soit, le cœur du problème pour la Présidence dans le cadre des négociations consiste à trouver un équilibre entre le renforcement de l’ambition en matière de réduction des émissions de GES et l’augmentation des financements destinés à aider les pays vulnérables à s’adapter à l’aggravation des effets du changement climatique, une demande de longue date qui n’a toujours pas été intégralement satisfaite. En effet, le financement des actions climat des pays en développement par les pays industrialisés, sujet très controversé, voire clivant, constitue le « nerf de la guerre » des négociations au sein de la CCNUCC et surtout une source de tensions vives, voire de blocages depuis de très nombreuses années, surtout entre pays du Sud et pays du Nord. Le financement climat joue également un rôle crucial dans le renforcement de l’ambition des pays en développement.

Source : Carbon Brief, fil Whatsapp CB at Belém, 21 nov. 2025.
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Ainsi Monique Barbut, ministre française de la Transition écologique, s’est dite, dans une déclaration faite vendredi à 13 h, heure locale (17 h, heure française), « extrêmement déçue » et a jugé le texte « inacceptable » en l’état. « C’est un texte qui est vide sur tout ce qui est atténuation. Il n’y a aucune mention sur les énergies fossiles. Il n’y a rien non plus sur le fait que l’ambition des contributions déterminées au niveau national [la pierre angulaire de l’Accord de Paris] n’existe pas. Il y a, en revanche, des paragraphes pléthoriques sur la finance. La France n’a jamais été opposée à payer mais à condition de payer pour quelque chose. Nous sommes en plein cœur de l’Amazonie – et même le mot déforestation n’est pas utilisé dans ce texte !
Par ailleurs, nous venons de « placer » une loi Climat européenne qui nous amène à – 90% d’émissions en 2040, ce n’est pas pour accepter que l’Europe soit le seul continent à faire des efforts. […] Notre crainte est que l’Union européenne soit complètement isolée. L’économie européenne ne peut pas être la seule confrontée à des mesures dures sur la question climatique. Nous avons demandé des efforts à nos populations, mais nous ne pouvons pas être les seuls à assumer l’entièreté de l’effort.
Les pays qui bloquent le plus sont les pays pétroliers – la Russie, l’Inde, l’Arabie saoudite -, auxquels se sont ajoutés beaucoup de pays émergents. En outre, à mesure que le temps passe, les petites îles se disent que si elles obtiennent des financements sur l’adaptation, elles peuvent vivre sans l’atténuation, ce qui n’est pas possible pour nous. »
Selon la ministre, la France et l’Union européenne attendent « qu’il y ait un mot reconnaissant le fait que les [énergies] fossiles sont en partie responsables [du réchauffement climatique]. On attend aussi qu’on dise que les contributions nationales, qui sont une obligation de l’accord de Paris, doivent être renforcées et montrer qu’elles s’inscrivent dans un objectif de trajectoire de +1,5°C. Ce sont les deux choses qu’on demande, pas plus, juste une mention. »
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Flash info
Un incendie perturbe les négociations à Belém
Les négociations ont été suspendues hier jeudi 20 novembre à Belém suite à un incendie qui a éclaté vers 14h, heure locale (18h, heure française) près du pavillon africain sur le site temporaire au Parque da Cidade. Les participants ont dû être évacués de l’ensemble de la zone bleue. Les négociations ne reprendront pleinement que vendredi matin le 21 novembre. L’incendie a été rapidement éteint et aucun blessé grave n’est à déplorer. Selon Le Monde, 19 personnes ont été traitées par les secours à cause des fumées. La Présidence a indiqué dans un communiqué publié dans la soirée qu’après l’inspection des pompiers, la zone bleue a été rouverte à 20h40 heure locale (00h40 heure française). Les délégués n’ont pas repris les consultations techniques mais la Présidence a repris les consultations avec les Parties sur le paquet politique de Belém dans la soirée et dans la nuit.
Cet incident va retarder encore plus l’avancement des négociations qui vont très certainement s’achever au-delà de l’heure de clôture prévue, d’autant plus que le calendrier de fin des négociations et d’adoption des décisions du paquet politique de Belém initialement prévu par la Présidence de la COP-30 (l’après-midi du mercredi 19 novembre) accusait déjà du retard.
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L’accord sur l’organisation de la COP-31 par la Turquie suscite la colère des îles du Pacifique
L’accord selon lequel la Turquie organisera la COP-31 (lire notre Journal de la COP-30 | Jour 10) a suscité l’indignation et la déception des îles du Pacifique. Plusieurs leaders locaux ont exprimé leur mécontentement alors que ces petits états insulaires sont menacés par la montée des eaux.
Ainsi le ministre des Affaires étrangères Papouasie-Nouvelle-Guinée, Justin Tkatchenko, a exprimé sa déception en déclarant à l’AFP : « Nous sommes tous mécontents. Et déçus que cela se termine de cette façon ». L’ancien Premier ministre de Tuvalu, Bikenibeu Paeniu, a déclaré que cette décision montrait « le manque d’engagement de l’Australie envers la justice climatique » et a suggéré que les pays du Pacifique devraient « reconsidérer sérieusement leur relation avec l’Australie ». Il a ajouté que le fait que seule une réunion préparatoire (pre-COP) se tienne dans le Pacifique, tandis que le sommet principal aura lieu en Turquie, était insuffisant.
Les dirigeants de Fidji et des Îles Salomon ont également exprimé leur déception, soulignant que la COP-31 aurait pu être une opportunité historique pour mettre en avant les enjeux climatiques spécifiques aux îles du Pacifique, comme la montée des eaux et la survie de leurs nations.
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Programme de la onzième journée
Aujourd’hui, le 21 novembre 2025, est la dernière journée officiellement prévue de la Conférence de Belém et tout le monde sait que les COP dépassent toujours – et parfois de loin – l’heure de clôture officielle (normalement 18h le vendredi de la 2e semaine), la COP-25 ayant battu tous les records de dépassement des 28 COP jusque-là (44h au-delà de l’heure de clôture officielle) et la COP-27 étant la 2e COP la plus longue (39,5h au-delà de l’heure de clôture officielle, sources : Carbon Brief, Citepa/Journal de la COP-27 | Jour 15 et Carbon Reporter, 14 nov. 2021).
C’est dans cette dernière ligne droite des négociations, pendant ces dernières heures de la Conférence que les dernières questions sont tranchées, que les compromis sont dégagés, les Ministres opérant des derniers arbitrages politiques sur les projets de décision sur lesquels les négociations sont bloquées, afin d’aboutir à un accord global sur l’ensemble de décisions à adopter par la COP-30, la CMA-7 et la CMP-20.
Cependant, plusieurs sujets majeurs sont toujours en suspens, les divergences entre Parties demeurant très fortes, et notamment sur les quatre sujets brûlants non inscrits à l’ordre du jour et que la Présidence brésilienne avait réunis au sein d’un projet de décision « mutirão », publié mardi matin (18 nov. 2025 – lire notre Journal de la COP-30 | Jour 10) : NDC et ambition, financement, commerce et transparence du rapportage. Il faudra dégager rapidement un consensus sur le projet de texte en discussion sur ce sujet, mais aussi sur les 14 autres projets de texte en discussion concernant les autres sujets épineux à forts enjeux et qui ont été regroupés par la Présidence dans le « paquet politique de Belém« , au premier rang desquels :
- les trois sous-volets des négociations sur le bilan mondial (Global Stocktake ou GST) :
- modalités du dialogue sur la mise en œuvre des résultats du GST,
- rapports 2024 et 2025 du dialogue annuel sur la mise en œuvre des résultats du bilan mondial,
- éléments procéduraux et logistiques du processus de déroulement du GST dans son ensemble ;
- l’objectif mondial sur l’adaptation (GGA) ;
- le programme de travail sur la transition juste ;
- le programme visant à renforcer l’ambition et la mise en œuvre de l’atténuation (MWP) ;
- la communication biennale d’informations ex ante sur le financement climat (article 9.5) ;
- l’article 2.1(c) (alignement des flux de financement mondiaux avec une trajectoire de développement bas-carbone).
Les consultations de la Présidence vont donc se poursuivre jusqu’à ce que les Parties parviennent à un consensus sur l’ensemble de ces projets de texte en suspens.
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Plénière informelle pour faire le point
10h-10h30 heure locale (soit 14h-14h30 heure française) : la Présidence a convoqué une plénière pour faire le point (stocktaking plenary) afin d’entendre les points de vue des Parties sur les nouvelles versions des 15 projets de décision qu’elle a élaborées, puis publiées ce matin (voir plus haut).
La Présidence a prévu de convoquer un « mutirão » avec les chefs de délégation à 11h heure locale (15h heure française) et une 2e plénière pour faire le point dans la soirée pour permettre aux Parties d’adopter les sujets en suspens. Etant donné les très fortes divergences d’opinion sur plusieurs sujets majeurs encore en suspens (feuille de route pour la sortie des combustibles fossiles, financement, adaptation, bilan mondial, programme de travail sur la transition juste,…), cette intention de la Présidence semble très optimiste !
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Publication de deux nouveaux projets de texte dans le cadre du paquet politique de Belém
Les nouvelles versions de deux autres projets de décision ont été intégrées dans le paquet politique de Belém, portant le nombre total de projets de décision dans ce cadre à 17 désormais. Les deux projets de décision sont les suivants :
- projet de décision sur les plans nationaux d’adaptation (NAP), proposition de la Présidence : version du 21 nov. 2025 @ 03h00, 3p. Voir version précédente : version du 18 nov. 2025 @ 17h30, 5p.
- projet de décision sur le genre et le changement climatique : plan d’actions de Belém sur le genre, proposition de la Présidence : version du 21 nov. 2025 @ 03h00, 21p.
Retour sur la onzième journée
Le point sur les négociations
Consultations de la Présidence
Les consultations de la Présidence sur les 17 projets de texte regroupés dans le cadre du paquet politique de Belém (voir plus haut) se sont poursuivies dans la journée de vendredi 21 novembre.
Projet de décision « mutirão » de la Présidence (voir plus haut) : les consultations sur ce texte très clivant ont rapidement dégénéré en tumulte. L’UE, l’Alliance indépendante de l’Amérique latine et des Caraïbes (AILAC) et le groupe pour l’intégrité environnementale (EIG) se sont opposés à cette dernière version du projet de décision « mutirão », qui ne fait pas référence à la transition vers la sortie des combustibles fossiles. L’UE a déclaré que si la COP 30 aboutissait à des résultats en matière d’atténuation, elle serait disposée à « sortir de sa zone de confort » en ce qui concerne le financement de l’adaptation, à condition que tous les éléments du nouvel objectif collectif quantifié (NCQG) en matière de financement climatique soient respectés.
L’Alliance des petits États insulaires (AOSIS) a insisté sur le fait que cette COP ne devait pas « renoncer à l’objectif de maintenir le réchauffement climatique à +1,5 °C ». La Coalition pour les nations de la forêt tropicale a déploré l’absence de référence dans le texte à l’objectif de mettre fin à la déforestation en 2030.
Le groupe africain a remis en question la mise en œuvre d’actions climat « assortie de conditions » et alourdissant la dette des pays en développement. Le groupe arabe a souligné que tout texte visant un secteur quelconque de leur économie était « hors de question ». Soulignant que les besoins énergétiques des pays en développement vont augmenter, les pays en développement partageant la même vision (groupe LMDC) ont appelé les pays industrialisés à atteindre la neutralité carbone d’ici 2030 et à devenir négatifs peu après afin de libérer de l’espace carbone pour les pays en développement.
Consultations sur les autres projets de texte du paquet politique de Belém : les délégués attendaient toujours la reprise de l’examen de sujets clés, telles que le programme de travail sur la transition juste, les indicateurs pour l’objectif mondial d’adaptation (GGA), ainsi que le genre. Le Grupo Sur a dénoncé l’inclusion d’un ensemble d’indicateurs n’ayant pas fait l’objet de discussions au préalable dans le dernier projet de texte sur le GGA. Dans ce contexte, il était clair que des discussions supplémentaires seraient nécessaires pour dégager un consensus sur ce sujet.
En l’absence de consensus en vue entre des camps qui restent très opposés, la plupart des délégués ont quitté les lieux dans la soirée, dans l’attente d’une mise à jour du plan de travail pour la suite. Les consultations sur le projet de décision « mutirão » se sont poursuivies jusque tard dans la nuit.
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Consultations techniques
Les consultations techniques se sont également poursuivies dans la journée de vendredi 21 novembre. Un accord a été trouvé sur les questions liées au Protocole de Kyoto et aux approches fondées sur le marché pour la mise en œuvre coopérative de l’Accord de Paris (article 6). Après de longs débats, les négociateurs sont également parvenus à un accord sur la conclusion de l’examen 2024 du Mécanisme international de Varsovie sur les pertes et préjudices (pour plus d’informations sur le WIM, voir la section sur les pertes et préjudices de notre Guide des négociations pour mieux comprendre la COP-30).
(source : IISD, 21 nov. 2025).
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Autres temps forts de la onzième journée
Déclaration de Belém pour la transition vers la sortie des combustibles fossiles
A Belém, la Colombie a tenu une conférence de presse à 9h30 heure locale (13h30 heure française) pour présenter la déclaration de Belém pour la transition vers la sortie des combustibles fossiles (Belém Declaration to transition away from fossil fuels). Vingt-quatre pays ont déjà signé la déclaration : Australie, Autriche, Belgique, Cambodge, Chili, Colombie, Costa Rica, Danemark, Iles Fidji, Finlande, Irlande, Jamaïque, Kenya, Luxembourg, Iles Marshall, Mexique, Micronésie, Népal, Pays-Bas, Panama, Espagne, Slovénie, Vanuatu et Tuvalu. A noter que la France ne figure pas – encore ? – parmi les pays signataires.
La Colombie a également officiellement annoncé qu’elle va accueillir, conjointement avec les Pays-Bas, les 28-29 avril 2026 à Santa Marta la première conférence internationale sur l’élimination progressive des combustibles fossiles. Elle avait initialement annoncé cette initiative, conjointement avec le Vanuatu en marge du sommet climat de New York, le 24 septembre 2025, organisé par Antonio Guterres, Secrétaire général de l’ONU. L’objet de cette future conférence sera de constituer une plateforme mondiale permettant aux pays de coopérer sur les stratégies visant à éliminer progressivement l’extraction des combustibles fossiles en complément et en renforcement de l’Accord de Paris. La conférence s’aligne également sur l’avis consultatif historique de la Cour internationale de justice (CIJ), qui reconnaît l’obligation légale des États de protéger le système climatique, notamment en s’attaquant à la production de combustibles fossiles.
Selon le Ministre du Climat de Vanuatu, Ralph Regenvanu, la coalition pilotée par la Colombie est nécessaire pour faire avancer les discussions sur la transition vers la sortie des combustibles fossiles, quel que soit le résultat final de la COP-30 (propos rapportés par Climate Home News, 21 nov. 2025).
Pour sa part, Maina Talia, Ministre du Climat de Tuvalu, située à faible altitude, a déclaré qu’« après 30 ans, ce processus [des COP] continue de nous décevoir, nous n’attendrons donc pas » et ils vont travailler plutôt ailleurs « pour assurer notre survie » (propos rapportés par Climate Home News, COP-30 Bulletin Day 11, 22 nov. 2025).
La sortie des énergies fossiles, sujet très clivant entre les Parties, est donc revenue dans le débat de manière inattendue et avec force à Belém. Depuis le début de la COP-30, le Président brésilien Lula préconise l’adoption d’une feuille de route pour accélérer la sortie des combustibles fossiles, principale cause du dérèglement climatique.
L’initiative lancée par la Colombie s’appuie sur la dynamique de plus en plus forte constatée au fil des jours à Belém en faveur d’une feuille de route en ce sens qui soit prévue dans le paquet final adopté au terme de la COP-30 (voir plus haut et lire notre Journal de la COP-30 | Jour 8). Au total, selon le décompte de Carbon Brief, 86 pays soutiennent désormais une telle feuille de route. Ces pays exigent un résultat à Belém sur la sortie des combustibles fossiles. Ils soulignent qu’on ne peut pas ignorer la principale cause de la crise climatique et signalent que la dernière version du projet de décision “mutirão” “refuse de parler la vérité,” et que « l’on ne peut pas justifier cela » (source : IISD, 21 nov. 2025).
Suivre la conférence de presse en replay.
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Dans les coulisses
Selon certaines sources, l’UE n’exclut pas que la COP30 se termine « sans accord », le projet de décision « mutirão » n’étant pas assez ambitieux selon le Commissaire européen au Climat, Wopke Hoekstra. « C’est loin de l’ambition dont nous avons besoin sur l’atténuation », a-t-il déclaré : « Ce qui est actuellement sur la table est inacceptable ». Ce projet de décision ne comporte aucune mention des énergies fossiles, et encore moins de la « feuille de route » pour la transition en vue d’en sortir, que réclament plus de 80 pays européens, latino-américains ou insulaires (voir plus haut). « Et vu que nous sommes tellement loin de là où nous devrions être, c’est malheureux à dire, mais nous sommes vraiment face à un scénario sans accord », a-t-il ajouté face à la presse (propos rapportés par France Info, 21 nov. 2025).
Ce ne serait pas la première fois qu’une COP s’achève sans accord global. La COP-6 à La Haye (Pays-Bas) du 13 au 25 novembre 2000 s’est soldée par l’absence d’accord. Jeudi 23 novembre 2000, les négociations semblaient dans l’impasse, et le Président néerlandais de la COP-6 Jan Pronk a diffusé une note contenant ses propositions sur les sujets clés afin de tenter de débloquer les négociations en vue de dégager un consensus. Les négociations ministérielles se sont poursuivies tout au long de la journée de vendredi 24 nov. et jusqu’à samedi 25 nov. 2000. Cependant, après près de 36 heures de discussions intenses sur les propositions du Président, les négociateurs n’ont pas réussi à sortir de l’impasse politique, l’additionnalité, la conformité et l’UTCATF s’avérant être des points particulièrement délicats. Le samedi 25 novembre 2000 après-midi, le Président Pronk a convoqué une dernière séance plénière informelle de haut niveau au cours de laquelle il a annoncé que les délégués n’étaient pas parvenus à un accord. Les délégués ont convenu de suspendre la COP-6 et ont exprimé leur volonté de reprendre leurs travaux en 2001.
Ainsi, la COP a décidé de suspendre la COP-6 et a demandé à son Président de solliciter des avis sur la possibilité de reprendre cette session en mai/juin 2001 afin de mener à bien les travaux de négociation des textes et d’adopter un ensemble complet et équilibré de décisions sur tous les sujets relevant du Plan d’action de Buenos Aires. Voir la couverture de la COP-6 par IISD.
La reprise de la COP-6, baptisée en français COP-6 bis (COP-6 part 2 en anglais) s’est tenue au siège de la CCNUCC à Bonn, du 16 au 27 juillet 2001. Les négociations au cours de cette COP-6 bis ont pu aboutir à un accord, « l’Accord de Bonn, » un engagement politique portant sur un ensemble indivisible de questions qui aura facilité la ratification du Protocole de Kyoto. Cet accord final est intervenu au bout de deux ans et demi de préparations et de négociations. Voir la couverture de la COP-6 bis par IISD.
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Pour en savoir plus
CCNUCC/UNFCCC
Page d’accueil du site de la CCNUCC
Page du site de la CCNUCC consacrée à la COP-30
Les cinq sessions de négociation
Note informelle conjointe, rédigée par le co-Président du SBSTA et le co-Président du SBI en amont des sessions SB-63, et publiée le 31 octobre 2025. Cette note propose la démarche et la méthode à suivre lors de ces sessions du 10 au 14 novembre 2025 (organisation et programme)
Programme global de la Conférence (overview schedule, version du 4 nov. 2025)
Cette année, en raison des contraintes budgétaires, le programme jour par jour en détail est supprimé mais les réunions du jour sont listées ici
Liste des évènements parallèles (side events) à Belém
CCNUCC : Nationally determined contributions under the Paris Agreement. Synthesis report by the secretariat | UNFCCC, 28 octobre 2025
Registre des stratégies bas-carbone 2050 (Long term strategies ou LTS)
Les premiers rapports biennaux en matière de transparence (BTR)
CCNUCC : Biennial transparency reports and national inventory reports – Synthesis report by the secretariat, 31 octobre 2025
CCNUCC : Progress in the process to formulate and implement national adaptation plans – Report by the secretariat, 21 octobre 2025
Présidence brésilienne
Site web de la Présidence brésilienne
Communiqué de la Présidence sur la séquence de haut niveau (sommer sur le climat), publié le 24 oct. 2025
Suivi et analyses réalisés et publiés par des institutions politiques, instituts de recherche et cercles de réflexion :
Couverture quotidienne de la Conférence par l’Institut International du Développement Durable (IISD)
Parlement européen (2025). The COP30 Climate Change Conference Part I: Framework of COP negotiations and main expected issues, octobre 2025
Carbon Brief : Interactive: Tracking negotiating texts at the COP30 climate summit, 7 novembre 2025. Carbon Brief, site britannique spécialisé en matière de climat, publie la version 2025 de son outil de suivi interactif annuel qui présentera les avancées ou l’absence d’avancées des différents volets de négociation à la COP-30. Il montrera le sujet, la nature du texte, la date et l’heure de sa publication, le nombre de pages, le nombre d’options et de crochets (ceux-ci indiquant des éléments de texte non encore tranchés et que donc il n’y a pas encore consensus sur le choix des options ou la formulation de texte), s’il y a consensus ou accord intégral (en vert) ou absence de consensus (en rouge).
Carbon Brief : Interactive: Who wants what at the COP30 climate change summit, 5 novembre 2025. Tableau interactif présentant les positions des différents pays et groupes de négociation sur les volets clés des négociations, ainsi que sur les questions clés dans le cadre de ces volets.
