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Plan de sobriété énergétique : quels leviers pour réduire la consommation d’énergie en France en deux ans ?

  • Réf. : 2022_07_a05
  • Publié le: 13 juillet 2022
  • Date de mise à jour: 20 juillet 2022
  • France

Le 23 juin 2022, la Première ministre, Elisabeth Borne, et la Ministre de la Transition énergétique, Agnès Pannier-Runacher, ont annoncé la mise en place d’un plan « sobriété énergétique » dont l’objectif est de réduire la consommation d’énergie (toutes énergies confondues) de 10% entre 2019 et 2024. Ce plan s’inscrit dans le contexte de la crise énergétique suite à l’invasion de l’Ukraine par la Russie (lire notre article) et des travaux en cours au sein de l’UE. En effet, dans le cadre du paquet « Fit for 55 » du 14 juillet 2021 (lire notre article), la Commission avait déjà proposé, avant la crise russe, de renforcer l’objectif collectif non contraignant d’une réduction de la consommation d’énergie finale en 2030 par rapport au scénario tendanciel, d’au moins 32,5% à au moins 36-37%. Depuis, le 27 juin 2022, le Conseil Energie s’est accordé sur cet objectif de 36%, avec un caractère contraignant.

Ce plan s’inscrit aussi dans la continuité des quatre grands axes de la stratégie énergétique française présentés par Président de la République à Belfort le 10 février 2022 (lire notre article) : sobriété énergétique ; efficacité énergétique ; développement des énergies renouvelables et relance de la filière nucléaire.

Dans ce cadre, une concertation a été lancée pour que les acteurs publics et privés construisent des feuilles de routes opérationnelles pour atteindre cet objectif. Cette concertation a pris la forme de groupes de travail, dont trois se sont déjà réunis.

 

Les leviers des acteurs publics : « l’Etat exemplaire »

Un premier groupe de travail a réuni, le 29 juin 2022, la Ministre de la Transition énergétique, Agnès Pannier-Runacher, le Ministre de la Transformation et de la Fonction publiques, Stanislas Guérini, les différentes fédérations syndicales de la fonction publique et les administrations concernées. L’objectif est d’appliquer l’objectif de 10% de réduction de la consommation d’énergie entre 2019 et 2024 à l’Etat, ses différents établissements et services, et ainsi entamer une trajectoire de réduction compatible avec une réduction de 40% d’ici 2050, telle qu’envisagée dans les scénarios de RTE (lire notre article). Les pistes suivantes ont été évoquées :

  • des mesures ont déjà été identifiées via la démarche « Services publics écoresponsables » lancée en février 2020, un premier bilan de cette démarche a permis d’identifier des voies d’amélioration ;
  • la gestion du parc immobilier de l’Etat est une priorité, avec la nécessité de poursuivre l’effort de rénovation thermique (plus de 4 200 chantiers lancés en trois ans), de mettre en place des mesures de sobriété en matière de chauffage et de climatisation des bâtiments. Ainsi, conformément aux dispositions existantes du code de l’énergie* rappelées dans la circulaire du 13 avril 2022, le seuil de température maximal pour allumer le chauffage est de 19°C, et le seuil minimal pour la climatisation est de 26°C ;
  • un changement des habitudes de mobilité des agents de l’Etat doit être poursuivi pour réduire la consommation de carburants. Pour cela, le « forfait mobilités durables » (lire notre brève) est étendu (désormais cumulable avec le remboursement partiel d’un abonnement de transports en commun) dès la rentrée 2022 pour favoriser le recours aux modes de transports alternatifs à la voiture individuelle pour les déplacements domicile-travail. L’élargissement du « forfait mobilités durables » à d’autres modes de transport doux a aussi été évoqué ;
  • en matière de mobilité, deux autres pistes ont été évoquées : l’expérimentation de la limitation de vitesse sur l’autoroute dans le cadre des déplacements professionnels des agents, et des incitations à la mise en œuvre de l’accord sur le télétravail dans la fonction publique ;
  • la stratégie d’achats de l’Etat permet aussi des économies d’énergies indirectes – le décret n°2022-767 du 2 mai 2022 permet ainsi d’ajouter le critère du coût environnemental en plus du critère prix ;
  • un outil de mesure de suivi et de pilotage des consommations d’énergie et d’émissions de gaz à effet de serre de l’Etat sera déployé d’ici fin septembre 2022.

 

Les leviers au sein des entreprises

Un deuxième groupe de travail a réuni, le 1er juillet 2022, la Ministre de la Transition énergétique, Agnès Pannier-Runacher, le Ministre du Travail, du Plein emploi et de l’Insertion, Olivier Dussopt, des représentants du secteur privé : partenaires sociaux et fédérations professionnelles. Le communiqué du MTE souligne que « le Gouvernement et les experts ne se substitueront pas aux partenaires sociaux. Ils joueront le rôle de facilitateurs ». Les discussions ont notamment porté sur les points suivants :

  • Le bilan dispositifs existants, comme la plateforme « Mission Transition écologique » lancée le 3 décembre 2021 (lire notre article) ;
  • le levier de la mobilité, via la mise en place de « plan de mobilité employeur », de soutien aux salariés – forfait mobilités durables, prime transport pour l’aide au carburant, auto-partage, ou encore label employeur pro-vélo ;
  • l’organisation du travail en général, liant souveraineté énergétique, baisse des factures énergétiques et qualité de travail ;
  • la gestion des bâtiments d’entreprises et la promotion des pratiques écoresponsables au bureau, notamment en matière d’éclairage, de températures et de choix informatiques ;
  • il a été acté qu’un plan d’accompagnement sera mis en place pour produire des documents simples et didactiques ; pour accompagner les entreprises dans l’actualisation de leurs plans de continuité de l’activité ; et pour actualiser des fiches métier en incluant notamment des consignes simples en cas de travail en période de grand froid ou de fortes chaleurs.

 

Les leviers des commerces et établissements recevant du public

Un troisième groupe de travail a réuni, le 7 juillet 2022, la Ministre de la Transition énergétique, Agnès Pannier-Runacher, la Ministre déléguée chargée des Petites et moyennes entreprises, du Commerce, de l’Artisanat et du Tourisme, Olivia Grégoire, et les représentants des établissements recevant du public et des surfaces commerciales. Les discussions ont notamment porté sur les points suivants :

  • la nécessité de mieux faire connaître et appliquer le Dispositif Eco Efficacité Tertiaire de 2019, également appelé « décret tertiaire », imposant une réduction des consommations énergétiques progressive pour les bâtiments tertiaires de plus de 1000 m² : -40% en 2030, -50% en 2040 et -60% d’ici 2050 ;
  • la nécessité de mieux faire connaître et appliquer les règles en vigueur sur l’éclairage nocturne des commerces fermés, comme l’arrêté du 27 décembre 2018 sur les nuisances lumineuses qui impose que les éclairages de vitrines de magasins de commerce soient éteints à 1 heure du matin au plus tard ou 1 heure après la cessation de l’activité ; ou encore l’article 18 de la loi Climat-Résilience qui permet aux maires et présidents d’intercommunalités d’encadrer les publicités et enseignes lumineuses ;
  • la possibilité de généraliser des bonnes pratiques comme des dispositifs de récupération de chaleur sur groupes froids pour produire de l’eau chaude sanitaire, ou encore des dispositifs pour éviter les pertes énergétiques liés aux meubles réfrigérés ;
  • la définition de thématiques d’actions prioritaires, comme la gestion plus efficace et automatisée des bâtiments ou encore la sobriété des mobilités des employés et des transporteurs de marchandises.

 

Les résultats de cette concertation prendront la forme de feuilles de route d’objectifs et de mesures simples et opérationnelles rédigées par chaque groupe de travail durant l’été, et qui seront rendues publiques fin septembre 2022.

 

En savoir plus

Communiqué du MTE sur le plan sobriété énergétique

Communiqué du MTE sur le premier groupe de travail (Etat)

Communiqué du MTE sur le deuxième groupe de travail (Entreprises)

Communiqué du MTE sur le troisième groupe de travail (Commerces)

* Articles du code de l’énergie R.241-25 à R.241-29 pour le chauffage, et articles R241-30 à R241-31 pour la climatisation

 

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