Dioxyde de carbone (format Secten)
Evolution des émissions de CO2 de 1990 à 2018 pour la France métropolitaine et l’Outre-mer inclus dans l’UE (en Mt)
Enjeux
Effets environnementaux
Le CO2 (dioxyde de carbone) est notamment émis lors de la combustion de combustibles fossiles, mais il est aussi au cœur du cycle du carbone entre biosphère et atmosphère. C’est le principal gaz à effet de serre (voir section générale en début de chapitre). En tant que tel, l’évolution de sa concentration dans l’atmosphère est suivie de près. Ces concentrations sont en hausse constante et atteignent aujourd’hui les niveaux les plus élevés jamais enregistrés depuis l’époque préindustrielle, avec 416 parties par million (ppm) en moyenne mensuelle atteints en mai 2020.
Objectifs de réduction
Au niveau mondial et européen, les objectifs visent tous les gaz à effet de serre, pas uniquement le CO2 (voir section CO2e). Au niveau national, la Stratégie Nationale Bas-carbone (SNBC) décline les objectifs de réduction d’émissions par gaz à effet de serre. Ainsi, le premier budget carbone (2015-2018), fixait un objectif de 323 Mt CO2 (hors UTCATF) Avec des émissions de 339 MtCO2e en moyenne sur 2015-2018, cet objectif n’a pas été respecté (dépassement de 5%). Le 2e budget carbone (2019-2023) fixé en 2020 par la révision de la SNBC s’élève à 315 MtCO2 (hors UTCATF). En 2019, les émissions pré-estimées s’élèvent à 328 Mt CO2. Elles doivent donc encore diminuer dans les années prochaines pour atteindre l’objectif fixé pour la période 2019-2023, de 315 Mt CO2 en moyenne sur la période.
Enjeux actuels
D’après le rapport spécial 1,5°C du Giec (2018), il faut réduire les émissions de CO2 de 45% en 2030 (par rapport à 2010) et atteindre zéro émission nette vers 2050 pour limiter le réchauffement à +1,5°C. Pour l’objectif de 2°C, la réduction en 2030 doit être de 20% et l’atteinte de la neutralité vers 2075. Tous les secteurs d’activité contribuent aux émissions dans des proportions variables : la réduction des émissions de CO2 cible donc plusieurs secteurs d’activité très différents.
A noter
Les émissions de CO2 sont présentées, comme les autres gaz à effet de serre, présentées au périmètre France métropolitaine et Outre-mer inclus dans l’UE. Par ailleurs, pour information, les émissions de CO2 sont aussi présentées pour la France métropolitaine uniquement, depuis 1960.
Tendance générale
Analyse globale de la tendance
Le calcul des émissions de CO2 en métropole remonte à 1960. L’évolution générale des émissions depuis 1960 reflète surtout des évolutions relatives à l’utilisation de l’énergie en France.
Depuis 1960 (mais en fait depuis la fin de la seconde guerre mondiale) les émissions de CO2 ont augmenté très fortement (+5%/an en moyenne), en lien avec la hausse de consommation des combustibles fossiles, jusqu’à la crise pétrolière de 1973, suivie par une période de rebond jusqu’à la seconde crise pétrolière de 1979. Ces deux dates marquent les maximum enregistrés : 539 Mt en 1973 et 533 Mt en 1979. Dans les années 1980, les émissions ont baissé rapidement (-3%/an), principalement par des réductions d’émissions dans le secteur Energie (mise en place du parc nucléaire) et Industrie (économies d’énergie, réglementations), malgré des émissions des transports et de l’agriculture à la hausse. Dans les années 1990 et le début des années 2000, les émissions des secteurs de l’énergie, de l’industrie et du résidentiel-tertiaire étant plutôt stables, et les émissions du transport et de l’agriculture à la hausse, les émissions totales ont connu une légère hausse (+1%/an dans les années 1990), jusqu’à atteindre, en 2005, un niveau similaire à 1991 (426 Mt CO2 en métropole et outre-mer UE). Depuis 2005, les émissions ont alterné entre des périodes de baisse rapide (-3%/an de 2006 à 2009, -7% en 2011, -9% en 2014, -4% en 2018) et des période de lente hausse (+2% en 2010, +1% en 2012-2013 et en 2015-2017). Les consommations énergétiques étant, dans une certaine mesure, liées aux conditions climatiques, les variations des émissions de CO2 observées s’expliquent en partie par des effets climatiques, notamment pour les secteurs Energie et Résidentiel-Tertiaire. Malgré des réductions par à-coups, les émissions ont été réduites de 17% entre 1990 et 2018 et les derniers niveaux estimés correspondent aux émissions du début des années 1960. L’enjeu désormais est de parvenir à maintenir une dynamique de baisse rapide sur le temps long.
Analyse par secteur
Transport routier : les émissions du transport routier ont connu une hausse depuis 1990 qui s’explique en grande partie par l’augmentation du trafic routier. La baisse observée en 2008 fait suite à un recours accru aux agro-carburants, à la mise en place du bonus/malus qui a permis d’accélérer le renouvellement du parc automobile par des véhicules moins énergivores et à la flambée des prix du carburant au cours du premier trimestre 2008. Depuis 2009, les émissions oscillent autour de 120 Mt.
Résidentiel/tertiaire : le niveau des émissions de ce secteur est globalement en baisse depuis 1990. En 2018, le niveau atteint est le plus bas enregistré, en deçà de 2014 qui jusqu’ici était le minimum historique du fait de la douceur du climat français cette année-là.
En ce qui concerne le bois et les résidus de bois (inclus dans la catégorie biomasse), les consommations sont liées aux conditions climatiques. Ainsi, par exemple, un pic de consommation est observé en 1991 (année froide avec un indice de rigueur de 1,11) car le bois a été utilisé comme appoint.
Industrie manufacturière : les émissions de ce secteur ont globalement diminué depuis 1990. Cette baisse observée s’explique, d’une part, par les économies d’énergie réalisées suite au premier choc pétrolier survenu en 1973 (la consommation de pétrole a fortement chuté au profit de l’électricité et du gaz naturel) et, d’autre part, par les nouvelles réglementations élaborées en 1998 visant à imposer des rendements minimaux aux chaudières industrielles ainsi qu’un contrôle périodique des installations de combustion supérieures à 1 MW. Entre 2008 et 2009, les émissions ont été fortement réduites suite à la baisse de la production dans le secteur de la sidérurgie et des minéraux non métalliques pour des raisons économiques. Les émissions ont connu une légère hausse en 2010, du fait de la reprise économique, pour retomber depuis en dessous du niveau atteint en 2009.
Transformation d’énergie : les émissions de ce secteur ont globalement été réduites sur la période. Le pic a été atteint en 1979 au moment du second choc pétrolier. La baisse observée à partir de cette année-là provient essentiellement de la mise en œuvre du programme électronucléaire et, dans une moindre mesure, d’autres actions comme les économies d’énergie induisant une demande plus faible. L’année 2011 présente une baisse importante du fait d’une moindre production d’électricité d’origine thermique suite à un climat doux cette année-là. Bien que 2012 et 2013 soient des années plus froides, les émissions de ce secteur stagnent au même niveau que celles de 2011 du fait de la baisse d’activité dans le secteur du raffinage du pétrole. Enfin, la poursuite de cette baisse d’activité dans le secteur du raffinage, associée à la douceur du climat et à une moindre consommation de charbon dans le secteur de la production d’électricité (divisée par deux entre 2013 et 2014) ont fait de 2014 l’année présentant le niveau le plus bas observé depuis 1979. De 2015 à 2017, les émissions sont de nouveau à la hausse du fait d’un climat légèrement moins doux et de la disponibilité des moyens de production non carbonés (nucléaire et hydroélectrique, notamment). A partir de 2018, les émissions sont de nouveaux en baisse, s’approchant du minimum de 2014.
Agriculture/sylviculture : les émissions de ce secteur sont relativement stables depuis 1990, autour de 12 Mt.
Modes de transport hors routier : les émissions des transports hors routier ont baissé de moitié depuis 1960. Depuis les années 1990, les émissions des transports hors routier sont relativement stables.
UTCATF : le puits de CO2 du secteur UTCATF a doublé entre 1990 et la fin des années 2000, passant d’environ -25 Mt à environ -50Mt. Ce puits connait désormais une diminution progressive, atteignant -30 Mt en 2018.
Le CO2 étant un produit fatal de la combustion et, en l’absence à ce jour de dispositifs de captage de ce gaz sur les installations de combustion, les émissions suivent d’assez près l’évolution de la consommation d’énergie fossile. Les rejets de CO2 liés à la combustion représentent, en 2017, 94% des émissions totales hors UTCATF. Ils ne sont que partiellement compensés par la fixation du carbone induite par l’activité de photosynthèse des plantes et par les éventuels stockages de carbone dans les sols (pris en compte dans la catégorie UTCATF), à défaut d’autres rétentions, comme la séquestration géologique du CO2, qui pourraient être envisagées dans le futur avec la mise en place du captage et du stockage du CO2.
Évolution récente
Lors des dernières années, les émissions totales de CO2 ont globalement augmenté. En effet, des hausses significatives sont observées dans le secteur de la transformation de l’énergie. D’autres secteurs comme l’industrie manufacturière et les transports ont également contribué à cette augmentation, mais dans une moindre mesure. Par ailleurs, les émissions du secteur de l’agriculture et du résidentiel/tertiaire ont une tendance à baisser.
Les émissions estimées pour 2018 s’élèvent à 331,5 Mt hors UTCATF (301,5 Mt avec UTCATF), soit une baisse de 4% hors UTCATF par rapport à 2017 :
- Transformation d’énergie (-15%) : les éléments conjoncturels de 2017 (hiver doux, baisse de production nucléaire et hydroélectriques) ne se poursuivant pas en 2018, ce secteur retrouve un niveau plus bas
- Industrie manufacturière (+0,9%) : hausse des émissions plusieurs sous-secteurs, en particulier de la Métallurgie des métaux ferreux (+0,6 Mt) et des Minéraux non-métalliques et matériaux de construction (+0,5 Mt).
- Résidentiel / tertiaire (-6%) : baisse des consommations pour le chauffage liée à un hiver plus doux qu’en 2017
- Agriculture/sylviculture (+0,5%) : légère hausse des émissions de CO2 liée aux cultures (chaulage, urée…).
- Déchets (-15%) forte diminution de l’incinération des déchets sans récupération d’énergie (dans le même temps, l’incinération avec récupération d’énergie (comptabilisé dans le secteur Energie) a augmenté).
- Transport (-2%) : baisse des consommations des véhicules diesel (VP, VUL et PL).
Part des émissions liée aux combustibles
Dans les années 1990, les émissions de CO2 liées aux combustibles traduisent la diversité du mix énergétique de l’époque : combustibles solides tels que le charbon, fioul domestique, essence et gaz naturel sont à des niveaux comparables (autour de 50 Mt CO2 chacun environ). Dans les années récentes, seuls le gazole et le gaz naturel dominent. De plus, les émissions de CO2 dues à l’utilisation énergétique de la biomasse ont fortement augmenté entre depuis 1990 pour trois raisons principales :
- la prise en compte de la consommation d’agro-carburants depuis l’année 1992,
- l’augmentation de la quantité de déchets incinérés (dont une partie est d’origine biomasse) avec récupération d’énergie,
- l’augmentation de la consommation de bois dans le secteur résidentiel et de liqueur noire dans le secteur industriel.
CO2 de la biomasse énergie
La combustion de la biomasse (quelle qu’elle soit) émet du CO2. Néanmoins, il existe des différences de traitement dans les inventaires selon le type de biomasse considéré. On distingue ainsi la biomasse de cycle court, par exemple les pailles des céréales, et la biomasse de cycle long, typiquement le bois (matériau ligneux).
Pour la biomasse de cycle court, les émissions de CO2 ne sont pas rapportées dans les inventaires d’émissions de gaz à effet de serre, car il est considéré que le cycle du carbone n’est pas fortement modifié par la combustion. En effet, lorsqu’un blé croît, il capte du carbone atmosphérique pour constituer sa propre biomasse. Si les pailles sont brûlées, le carbone est libéré par la combustion. Si elles ne sont pas brûlées, le carbone est également libéré après dégradation de la paille ou consommation par les animaux. Il serait possible de faire un bilan entre la croissance des plantes et la libération de ce carbone dans l’atmosphère par combustion ou dégradation mais le retour à l’atmosphère du carbone n’est pas fortement accéléré par la combustion. Sur un bilan annuel, il a été décidé de considérer que les quantités de carbone libérées sont équivalentes aux quantités captées pour la biomasse de cycle court. Une hypothèse de neutralité est appliquée pour la biomasse de cycle court.
Pour la biomasse de cycle long, comme le bois, la situation est différente car il peut y avoir un écart important sur un territoire donné entre les quantités de carbone capté par des surfaces boisées et les quantités de carbone émises (ou exportées). Lorsque les quantités de carbone captées par les surfaces boisées sont plus importantes que les quantités libérées, le stock de carbone dans la biomasse du territoire augmente et constitue ce qu’on appelle un « puits de carbone ». Inversement, des territoires peuvent déstocker du carbone accumulé depuis des décennies voire des siècles, ces territoires constituent alors des « sources de carbone ». C’est sous cet angle qu’est considéré, dans le cadre des inventaires, le carbone contenu dans la biomasse. Et c’est pour cette raison qu’à la fois les émissions et les absorptions de CO2 biomasse sont rapportées sous le secteur UTCATF (utilisation des terres, changements d’affectation des terres et forêt). Du fait de cette prise en compte dans le secteur UTCATF, les émissions de CO2 biomasse ne sont pas incluses dans le secteur énergie même en cas d’une utilisation énergétique de la biomasse. Ce n’est pas une hypothèse de neutralité qui est appliquée pour la biomasse de cycle long (celle-ci n’est pas valable sur l’horizon de temps considéré à savoir environ un siècle). C’est une allocation spécifique orientée selon le point de vue producteur de bois (forestier) et non selon le point de vue consommateur de bois.
Pour information, les émissions de CO2 liées à la combustion de biomasse à finalité énergétique sont indiquées en aparté (hors total) dans les données et le rapport Secten.
Répartition des émissions de CO2 entre la combustion et la décarbonatation
Pour certaines activités, les émissions de CO2 proviennent :d’une part, des émissions induites par l’utilisation de combustibles ; et d’autre part, des émissions induites par la décarbonatation. La décarbonatation correspond à la transformation du carbone contenu dans des carbonates (par exemple, le calcaire) en CO2, sous l’effet de la chaleur. Les principaux secteurs d’activité concernés par la décarbonatation sont : la production de ciment, la production de verre, la sidérurgie (utilisation de castine), la production de chaux (aérienne et hydraulique) (sites dédiés ou en sucreries), la production de tuiles et briques. Dans les secteurs de la céramique et de la production d’émail, les émissions de CO2 induites par la décarbonatation sont très faibles au regard de celles relatives à la combustion. En revanche, pour certains des secteurs cités précédemment, les émissions relatives à la décarbonatation peuvent représenter une part non négligeable dans les émissions totales de CO2 du secteur concerné, comme par exemple le ciment et la chaux.
Et ailleurs ?
D’après l’édition 2019 du rapport du JRC (Crippa, et al. 2019), qui s’appuie sur la base de données d’émissions EDGAR et les données de l’AIE, les émissions mondiales totales de CO2 dues aux combustibles fossiles sont élevées en 2018 à 37,9 Gt CO2 (+ 1,9% depuis 2017). Ces émissions de CO2 fossile représentent 68,5% des émissions mondiales totales de GES en 2018 (55,3 Gt CO2e PNUE, Gap report 2019). Ces émissions de CO2 fossile, après avoir connu un plateau en 2015-2016, sont reparties à la hausse depuis 2017.
Parmi les principaux émetteurs, en 2018, seuls l’UE-28 (9,1% du total mondial) et le Japon (3,2% du total) ont baissé leurs émissions (respectivement -1,9% et -1,7%). La Chine (29,7% du total mondial) a vu ses émissions augmenter de +1,5%, les Etats-Unis (13,9% du total) de +2,9%, l’Inde (6,9% du total) de +7,2% et la Russie (4,6% du total) de +3,6%. Certains pays, représentant une part plus faible du total mondial, ont connu une hausse importante de leurs émissions de CO2 fossile en 2018 : Iran (+4,8%), Indonésie (+4,8%), Corée du Sud (+2,9%).
Selon le rapport spécial 1.5°C du Giec, il faut réduire les émissions de CO2 entre 2010 et 2030 de 45% puis atteindre zéro émission nette vers 2050 pour limiter le réchauffement à +1,5°C. Pour le limiter à +2°C, il faut réduire les émissions de 20% entre 2010 et 2030 et atteindre zéro émission nette vers 2075.
En savoir plus
Voir les sections Climat du Chapitre Politique et règlementation de ce rapport
Pages du MTES consacrées à l’action climat de la France
Site de l’AIE pour les émissions de CO2 fossiles mondiales