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Vers la création d’un délit général de pollution et d’un délit de mise en danger de l’environnement ?

  • Réf. : 2020_11_b12
  • Publié le: 26 novembre 2020
  • Date de mise à jour: 26 novembre 2020
  • France

Le 22 novembre 2020, la Ministre de l’Environnement, Barbara Pompili, et le Ministre de la Justice, Eric Dupond-Moretti, ont annoncé, lors d’une entrevue au Journal du Dimanche (contenu payant), la création de deux nouveaux délits environnementaux pour faire suite à la proposition de la Convention Citoyenne pour le Climat (CCC) (voir encadré ci-dessous) de créer un crime d’écocide.

 

L’origine de la proposition de la CCC

Avant la proposition de la CCC, en mars 2019, une proposition de loi portant reconnaissance du crime d’écocide avait été déposée par des députés, proposition rejetée par la Commission des lois et le Sénat, la jugeant trop imprécise, avec des risques d’inconstitutionnalité, et considérant que la législation en vigueur pouvait répondre à la lutte contre les dégradations de l’environnement. Le 22 octobre 2019, une seconde proposition de loi assez similaire a été déposée, mais avec des termes juridiques plus précis, elle aussi rejetée en Commission.

La CCC, nouveauté institutionnelle mise en place en octobre 2019 afin de renforcer l’interaction citoyenne sur l’enjeu climat, a remis ses 149 propositions le 21 juin 2020. Parmi elles figure « légiférer sur le crime d’écocide  : adopter une loi qui pénalise le crime d’écocide dans le cadre des neuf limites planétaires (dont le changement climatique), et qui intègre le devoir de vigilance et le délit d’imprudence, dont la mise en œuvre est garantie par la Haute Autorité des Limites Planétaires ». Le Président de la République s’est engagé à reprendre « sans filtre » ces propositions, sauf trois, mais cette proposition sur le crime d’écocide ne faisait pas partie de ces « jokers ». Lors de son discours le 29 juin 2020, il a cependant indiqué : « Je souhaite que nous puissions étudier avec vous, avec l’appui de justice, comment ce principe [de crime d’écocide] peut entrer dans le droit français, dans le respect de nos principes fondamentaux. Ce n’est pas le cas de la rédaction qui est aujourd’hui proposée, mais je souhaite que nous puissions ensemble donner une suite à votre proposition et l’inscrire dans notre droit ».

 

Les annonces des deux Ministres

Les échanges menés par les équipes ministérielles avec un groupe de travail au sein de la CCC ont permis d’aboutir à trois décisions pour renforcer les peines punissant les atteintes à l’environnement et améliorer le fonctionnement de la justice dans ce domaine :

  • création d’un délit général de pollution, avec des peines d’emprisonnement et des amendes (allant de 375 000 euros à 4,5 millions d’euros).
  • création d’un délit de mise en danger de l’environnement, avec une peine d’emprisonnement (1 an) et des amendes (100 000 euros). Le délit peut avoir lieu en cas de non-respect de certaines obligations environnementales, et ce même si la pollution n’a finalement pas eu lieu. Un dispositif de remise en état de l’environnement est aussi prévu ;
  • renforcement de la justice environnementale : création d’une juridiction spécialisée (tribunaux, assistants spécialisés, renforcement des services d’enquêtes et d’inspection, formation des magistrats…).

 

Comparaison avec la proposition de la CCC

La traduction de la proposition initiale de la CCC a entraîné des modifications notables : les annonces ne reprennent ni la notion de « crime » (considéré impropre compte tenu du principe de proportionnalité entre infraction et sanction), « d’écocide » (terme symbolique non repris) ou encore les limites planétaires (notion considérée trop floue en termes juridiques). Par ailleurs, les amendes prévues sont fixes et non proportionnelles au chiffre d’affaires de l’entreprise, telle que le proposait la CCC. Au-delà des différences par rapport à la proposition initiale, ces nouvelles annonces vont dans le sens d’accroître la pénalisation des atteintes à l’environnement et font évoluer le droit pénal de l’environnement.

 

Prochaines étapes

La loi climat est attendue début 2021. D’ici là, le Chef de l’État a prévu de revoir les 150 membres de la CCC avant Noël.

 

 

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