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Impact agrégé des INDC : nouveau bilan

  • Réf. : 2016_06_a2
  • Publié le: 1 juin 2016
  • Date de mise à jour: 3 juin 2019
  • International

Malgré les engagements des INDC, les émissions de GES continueront d’augmenter d’ici 2030 jusqu’à dépasser de plus d’un tiers le niveau compatible avec l’objectif de 2°C.

Le Secrétariat de la CCNUCC a publié le 2 mai 2016 [conformément à la décision 1/CP.21 (§ 19)], une mise à jour de son rapport de synthèse de l’impact agrégé de l’ensemble des INDC soumises avant le 4 avril 2016 : 161 INDC [soit 42 de plus que dans le bilan précédent (lire notre article sur ce sujet)] couvrant 189 Parties à la CCNUCC et 95,7% des émissions mondiales de GES.

Au 4 avril 2016, sept Parties à la CCNUCC n’avaient pas soumis d’INDC : Corée du Nord, Libye, Nicaragua, Ouzbékistan, Panama, Syrie, Timor-Leste. Le Panama a soumis la sienne le 19 avril.

Le rapport fournit des estimations des niveaux d’émissions de GES agrégées en 2025 et 2030 qui résulteraient de la mise en œuvre des 189 INDC. Ces niveaux ont ensuite été comparés :

  • aux niveaux d’émissions mondiales en 1990, 2000 et 2010,
  • aux niveaux d’émissions mondiales projetés en 2025 et en 2030 selon un scénario sans [mise en œuvre des] INDC,
  • aux niveaux d’émissions mondiales en 2025 et en 2030 selon des trajectoires d’émissions de GES compatibles avec les objectifs de 2°C et de 1,5°C [cf. GIEC, AR5].

Dans leur INDC, la plupart des pays en développement fixent deux objectifs : un objectif inconditionnel, assorti d’un 2e objectif plus ambitieux conditionnel qui dépend de la mise à disposition d’un soutien international [financement surtout mais aussi transfert de technologies et renforcement des capacités].

Impact agrégé des INDC soumises

La mise en œuvre des engagements et actions de réduction prévus par ces INDC conduirait :

  • à un niveau d’émissions mondiales agrégées de GES [sur la base des objectifs inconditionnels et conditionnels (voir encadré ci-dessus) des INDC (valeurs médianes)]:
    • de 55 Gt CO2e en 2025, soit 40% de plus qu’en 1990 et 13% de plus qu’en 2010,
    • de 56,2 Gt CO2e en 2030, soit 44% de plus qu’en 1990 et 16% de plus qu’en 2010 ;
  • non pas à une baisse des émissions mondiales de GES à l’horizon 2030, mais à un fort ralentissement de leur hausse (+16%) sur la période 2010-2030 par rapport à la période 1990-2010 (+24%) ;
  • à une baisse de 10% des émissions moyennes mondiales de GES par habitant en 2030 par rapport à 1990 ;
  • à 3,3 Gt CO2e d’émissions évitées en 2030 par rapport au scénario sans INDC.


Evolution des émissions mondiales de GES selon des scénarios avec et sans INDC par rapport à l’objectif de 2°C (en Gt CO2e)

Source : CCNUCC, 02/05/2016

Même si la plupart des INDC ne fournissent des projections d’émissions que jusqu’à l’horizon 2025-2030, le nouveau bilan de la CCNUCC évalue l’adéquation du niveau d’émissions mondiales agrégées en 2030 résultant de la mise en œuvre des INDC [56,2 Gt CO2e] avec le niveau nécessaire à cet horizon [41 Gt CO2e] pour ramener les émissions mondiales sur une trajectoire compatible avec l’objectif de 2°C qui, lui, est relatif à 2100. Ainsi, l’écart restant à combler est évalué à 15,2 Gt CO2e pour atteindre en 2030 le niveau compatible avec les scénarios 2°C, soit 41 Gt CO2e.

Analyse du CITEPA : selon un scénario sans INDC, les émissions en 2030 s’élèveraient à 60,8 Gt CO2e, alors qu’elles ne doivent pas dépasser 41 Gt CO2e pour respecter l’objectif de 2°C. Il serait donc nécessaire que les INDC parviennent à atteindre une baisse de 19,8 Gt CO2e au total en 2030. Or, au mieux, les INDC actuelles ne permettraient d’obtenir qu’une baisse de 4,6 Gt CO2e. Il faudrait donc au moins quadrupler l’effort de réduction dans le cadre de la première révision des NDC qui n’interviendra probablement pas avant 2025 [cf. Accord de Paris (art. 4)]. En outre, malgré la mise en œuvre des INDC, comme le suggère le graphique ci-dessus, les émissions continueront à augmenter et ce, alors que le pic doit intervenir « le plus rapide-ment possible » [cf. Accord de Paris (art. 4)]. Enfin, une grande incertitude est attachée à ce type de projections, compte tenu de la grande hétérogénéité des méthodes et des différentes années de référence utilisées pour élaborer les INDC.

Selon les scénarios 2°C qui ne démarrent qu’en 2030, le rythme de réduction sur la période 2030-2050 devrait se situer à 3,3% par an, soit environ le double de celui nécessaire dans l’hypothèse d’un renforcement des engagements et actions de réduction avant 2020 (1,6% par an), ce qui induirait des coûts nettement plus élevés. Des efforts de réduction plus importants et plus onéreux seront donc nécessaires sur la période post-2030 que ceux associés aux INDC actuelles, afin de respecter l’objectif de 2°C.

Le budget CO2 : dans le 3e volume de son 5e rapport, le GIEC a estimé la quantité maximale cumulée de CO2 qui peut encore être émise dans l’atmosphère [jusqu’en 2100] pour rester en-dessous du seuil de 2°C. Ainsi, le budget CO2 cumulé total mondial à partir de 2011 se limiterait à 1 000 Gt CO2 (lire notre dossier complet sur ce sujet).


Enfin, les émissions mondiales cumulées de CO2 induites par l’impact agrégé des INDC devraient représenter 53% du budget CO2 (
voir encadré ci-dessus) en 2025 et 74% en 2030. Autrement dit, le budget carbone d’ici 2100 serait déjà consommé à moitié dès 2025 et aux trois quarts dès 2030.

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