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Reprise des négociations climat : absence quasi-totale de progrès sur les sujets clés sur fond de profondes divergences entre pays du Nord et pays du Sud

  • Réf. : 2024_06_a03
  • Publié le: 4 juillet 2024
  • Date de mise à jour: 3 octobre 2024
  • International

Après deux semaines de négociations intenses (3-13 juin 2024), les 60èmes sessions des deux organes subsidiaires de la CCNUCC (SBI-60 [mise en œuvre] et SBSTA-60 [conseil scientifique et technologique]), connues sous le nom SB-60, se sont terminées à 1h06 samedi 14 juin 2024. Ces sessions intermédiaires ont marqué la reprise des négociations climat formelles dans le cadre de la CCNUCC pour la première fois depuis la Conférence de Dubaï sur le Climat, qui incluait la COP-28 (du 30 nov. au 12 déc. 2023). Elles sont généralement l’occasion d’avancer sur les points techniques des négociations entre deux COP et permettent de faciliter l’avancée des négociations politiques lors des COP.

Lire notre article sur les résultats de la Conférence de Dubaï « COP-28 : malgré un premier pas vers la sortie des combustibles fossiles et l’adoption des règles sur le fonds pertes et préjudices, le bilan global est mitigé », publié le 14 février 2024.

Rappel de l’articulation des différents organes de la CCNUCC

Les organes subsidiaires SBSTA et SBI sont des organes techniques mis à disposition de la COP, de la CMP et de la CMA.

 

Au total, les sessions SB-60 ont réuni en présentiel 8 606 participants, dont 3 444 délégués gouvernementaux (équipes de négociation nationales) des 197 Parties à la Convention Climat (CCNUCC), 2 467 représentants d’ONG ayant le statut « d’observateur », ainsi que 225 journalistes (source : IISD, 17 juin 2024).

Outre les sessions plénières et les réunions des deux organes subsidiaires SBI et SBSTA dans le cadre des négociations formelles, 30 réunions et ateliers dits mandatés (car mandatés par des décisions de la COP-28, celles de la CMP-18 ou celles de la CMA-5, adoptées lors de la Conférence de Dubaï sur le Climat), ont également eu lieu pendant ces deux semaines, voire pendant la période dite  de « pré-session » (du 27 mai au 2 juin 2024).

 

Que retenir de ces sessions SB-60 ?

 

Le Citepa vous propose un tour d’horizon des principaux résultats par sujet de négociation clé :

  • financement climat,
  • bilan mondial (Global Stocktake),
  • pertes et préjudices,
  • adaptation,
  • atténuation,
  • mécanismes de marché,
  • transition juste.

 

Financement climat

 

Le sujet très controversé du financement des actions climat des pays en développement par les pays industrialisés constitue le « nerf de la guerre » des négociations au sein de la CCNUCC et surtout une source fréquente de vives tensions diplomatiques et de blocage lors de celles-ci depuis de nombreuses années. Alors que l’objectif des 100 Md$ par an à fournir aux pays en développement par les pays industrialisés avait pour échéance initiale 2020, il n’a été atteint qu’en 2022, soit avec deux ans de retard. Cela a eu pour conséquence d’entamer la confiance des pays en développement vis-à-vis des pays industrialisés et de freiner les progrès dans les autres axes de négociation (notamment l’atténuation). Le financement climat joue également un rôle crucial dans le renforcement de l’ambition des pays en développement.

 

A Bonn lors des sessions SB-60, il a été, comme à l’accoutumé, le sujet dominant des négociations formelles en anticipation de la COP-29. En effet, celle-ci a d’ores-et-déjà été qualifiée de « COP du financement climat » car c’est à la COP-29 que les Parties doivent se mettre d’accord sur un nouvel objectif collectif quantifié pour le financement climat post-2025.

 

En savoir plus sur le nouvel objectif collectif quantifié en matière de financement climat pour la période post-2025

Conformément à la décision 1/CP.21 (paragraphe 53), la Réunion des Parties à l’Accord de Paris (CMA) doit fixer, avant 2025, un nouvel objectif collectif chiffré post-2025 (New collective quantified goal [NCQG] on climate finance) en matière de financement des actions climat à partir d’un niveau plancher de 100 milliards de $ par an et en tenant compte des besoins et des priorités des pays en développement. Ce niveau correspond à l’objectif initial fixé en 2009, sachant que celui-ci n’a pas été atteint en son année cible (2020), mais deux ans plus tard (2022 – lire notre article).

Conformément à la décision 14/CMA-1, adoptée par la CMA à Katowice, en Pologne en décembre 2018 dans le cadre des règles de mise en œuvre de l’Accord de Paris, les « discussions » (à noter, le choix du mot « discussions » [« deliberations » en anglais], moins fort que « négociations ») sur le nouvel objectif post-2025 ont été lancées lors de la CMA-3 (qui s’est tenue en parallèle à la COP-26, à Glasgow, en novembre 2021). Par la décision 9/CMA.3, adoptée lors de la CMA-3, les Parties se sont mises d’accord sur l’organisation et la structure des discussions sur le nouvel objectif post-2025. Elles s’articulent autour :

  • d’un programme de travail ad hoc sur la période 2022-2024 sous l’égide de la CMA, pour encadrer les discussions techniques,
  • de contributions à soumettre par les Parties et les parties prenantes non-étatiques (régions, villes, secteur privé,…),
  • des dialogues ministériels de haut niveau sur la période 2022-2024, et
  • des bilans et des lignes directrices élaborées par la CMA.

 

Dialogues techniques entre les experts

Dans le cadre du programme de travail ad hoc, la CMA a décidé d’organiser quatre dialogues techniques entre les experts (Technical Expert Dialogues ou TED) par an (cf. décision 9/CMA.3, § 5), soit 12 en tout au cours des trois ans 2022-2024. L’un de ces dialogues doit se tenir en même temps que la première session des organes subsidiaires de l’année et un autre à l’occasion de la session de la CMA, et les deux dialogues restants seront organisés dans des régions distinctes en vue de faciliter une participation géographique inclusive et équilibrée.

La première réunion de ce Dialogue technique entre les experts (TED 1) a eu lieu les 24-25 mars 2022 au Cap (Afrique du Sud). La 2e réunion (TED 2) a eu lieu à Bonn les 13-14 juin 2022. La 3e réunion (TED 3) s’est tenue à Mandaluyong, Metro Manila (Philippines) du 6 au 9 septembre 2022. La 4e réunion (TED 4) s’est tenu à Charm el-Cheikh le 5 novembre 2022. La 5e réunion (TED 5) a eu lieu du 8 au 10 mars 2023 à Vienne (Autriche) (voir note de synthèse des résultats rédigée par les deux co-présidents du programme de travail). La 6e réunion (TED 6) a eu lieu les 12-13 juin 2023 à Bonn (voir note de synthèse des résultats rédigée par les deux co-présidents), la 7e réunion (TED 7) s’est tenue du 30 sept. au 2 oct. à Genève (voir note de synthèse des résultats rédigée par les deux co-présidents). La 8e réunion (TED 8) a eu lieu le 28 novembre 2023 à Dubaï, deux jours avant l’ouverture de la COP-28/CMA-5.Voir programme et note de synthèse des résultats. La 9e réunion (TED 9) a eu lieu à Cartagena (Colombie) les 23-24 avril 2024. Voir programme et note de synthèse des résultats.

 

Programme de travail ad hoc 2022-2024 :

La première réunion du programme de travail ad hoc 2022-2024 a eu lieu les 25-26 avril 2024 à Cartagena (Colombie). Voir note de synthèse des résultats.

 

Dialogue ministériel de haut niveau

La première réunion du dialogue ministériel de haut niveau a eu lieu le 9 novembre 2022 à Charm el-Cheikh lors de la CMA-4, lançant ainsi le processus pour définir, d’ici fin 2024, le nouvel objectif collectif chiffré sur le financement climat pour la période post-2025 (voir programme et note de synthèse des résultats rédigée par le Président de la CMA-4).

La 2e réunion du dialogue ministériel de haut niveau a eu lieu le 3 décembre 2023 à Dubaï lors de la CMA-5. Voir programme et note de synthèse des résultats rédigée par le Président de la CMA-5.

 

Avancées lors de la CMA-4 et de la CMA-5

A Charm el Cheikh, dans une décision purement procédurale, la CMA-4 a confirmé que les discussions en cours sur le nouvel objectif chiffré collectif sur le financement post-2025 devront déboucher sur la définition de ce nouvel objectif en 2024 (paragraphe 8 de la décision 5/CMA.4 sur le nouvel objectif). Les discussions sur ce sujet ont été difficiles et plusieurs Parties ont souligné qu’il était encore trop tôt pour parler « chiffres », c’est-à-dire quantifier le futur objectif. Les discussions ont donc peu avancées sur le fond de ce sujet crucial lors de la CMA-4.

A Dubaï, lors de la CMA 5, les Parties ont adopté la décision 8/CMA.5 sur le nouvel objectif. Ils ont décidé de passer à un mode de travail permettant l’élaboration d’éléments de base d’un projet de texte de négociation à examiner par la CMA 6 (Bakou, Azerbaïdjan, 11-22 novembre 2024). Les Parties ont également demandé aux co-Présidents du programme de travail ad hoc d’élaborer et de publier avant mars 2024 un plan de travail pour 2024, en tenant compte des soumissions qui seront faites par les Parties. En outre, le CMA-5 a demandé aux co-Présidents de mener au moins trois dialogues techniques entre les experts en 2024 pour permettre des discussions techniques approfondies sur les éléments du nouvel objectif post-2025, parallèlement à trois réunions en 2024 dans le cadre du programme de travail ad hoc. Enfin, la CMA-5 a demandé aux co-Présidents du programme de travail d’élaborer les grandes lignes d’un projet de texte de négociation qui doit reprendre les progrès réalisés jusque-là et ce, pour examen par la CMA-6 (qui aura lieu en parallèle à la COP-29).

 

Evènements mandatés

Voir programme.

  • SBI 5, 8 et 10 juin 2024 : 2e réunion dans le cadre du programme ad hoc sur le nouvel objectif quantifié collectif en matière de financement climat.

Voir programme du 5 juin, du 8 juin et du 10 juin.

  • SBI/SBSTA 12-13 juin 2024: 3e atelier dans le cadre du dialogue de Charm el-Cheikh entre les Parties pour échanger les points de vue et mieux comprendre le champ d’application de l’article 2.1(c) de l’Accord de Paris (voir 3e encadré de cette section, ci-dessous).

Voir programme et message des co-Présidents de ce dialogue (du 9 mai 2024).

 

Résultats

Nouvel objectif collectif chiffré post-2025 (New collective quantified goal [NCQG]

A Bonn, les discussions sur ce volet des négociations ont été axées sur la 2e réunion du programme de travail ad hoc (voir encadré ci-dessus). Ces travaux sont destinés à produire un texte constituant la base de négociation lors de la CMA-6 à Bakou (Azerbaïdjan). En amont de Bonn, trois groupes de Parties avaient soumis leurs contributions écrites présentant leurs positions – souvent très divergentes – sur ce sujet (pays arabes, alliance des petits Etats insulaires, pays les moins avancés). S’appuyant sur ces contributions et les discussions menées lors de la première réunion du groupe de travail ad hoc (23-26 avril, Cartagena, Colombie), ses deux co-Présidents (Zaheer Fakir, Emirats arabes unis, et Fiona Gilbert, Australie) ont élaboré un document de synthèse pour alimenter les discussions de cette 2e réunion (synthèse des contributions ou input paper du 24 mai 2024 (63 p.). Ce document visait à représenter toute la diversité des points de vue des Parties. Au cours de la première semaine, les Parties ont demandé aux deux co-Présidents de resserrer et rationaliser le texte, ce qui a donné lieu, le 7 juin 2024, à une première mise à jour de ce document (45 p.). Suite à de nouvelles contributions, une 2e mise à jour a été diffusée le 9 juin 2024 (35 p.). Malgré la réduction de son volume, cette 2e mise à jour restait une synthèse de l’ensemble des propositions soumises, parmi lesquelles plusieurs qui étaient en flagrante contradiction les unes avec les autres. Lors de la dernière session de négociations sur ce sujet, ce document a été qualifié de « déséquilibré » par certains négociateurs (source : Climate Home News, 11 juin 2024).

Les discussions ont fait ressortir de profondes divergences d’opinion entre les Parties, et surtout entre pays en développement et pays développés, sur plusieurs questions clés. Ces divergences d’opinion entre ces deux catégories de pays, où chacune campait fermement sur ses positions, ont entravé toute possibilité de progrès.

 

Les principales pierres d’achoppement entre les Parties

Le montant de l’objectif de soutien financier à fournir aux pays en développement par les pays développés

Plusieurs évaluations des besoins réels en termes de financement climat pour les pays en développement (voir encadré ci-dessous) chiffrent le montant nécessaire à 1 000 Md$ par an d’ici 2030. Les contributions soumises en amont de Bonn proposaient les montants suivants :

  • l’Inde : 1 000 Md$/an essentiellement sous forme de subventions et de financement à des taux préférentiels (cf. contribution de l’Inde soumise à la CCNUCC le 13 février 2024 , en amont de la 1ère réunion du programme de travail ad hoc),
  • le groupe de négociation des pays arabes (« groupe arabe ») : 441 Md$/an en subventions publiques dans le cadre d’un montant global de 1 100 Md$/an à fournir sur 2025-2029 par les pays industrialisés, le solde devant provenir d’autres sources (prêts à des taux préférentiels,…) (cf. contribution du groupe arabe soumise à la CCNUCC le 6 mai 2024),
  • le groupe de négociation des pays en développement ayant une vision similaire (Like-Minded Developing Countries ou LMDC) : 1 000 Md$/an (contribution du groupe LMDC soumise à la CCNUCC en amont de la 2e réunion du programme de travail ad hoc).

Pour une explication des différents groupes de négociation, se reporter à l’annexe 3 de notre dossier de fond sur la COP-27 (p.65).

 

En savoir plus sur le financement climat pour les pays en développement : quels sont les besoins réels ?

Deux rapports de référence, l’un publié lors de la COP-27 à Charm el-Cheikh (Egypte) fin 2022 et l’autre, plus récent, publié le 2 novembre 2023 quantifient des estimations concernant les besoins en termes de financement climat des pays en développement.

Rapport commandé par les Présidences de la COP-26 et de la COP-27 : 1 000 Md $ par an en 2030

Le 8 novembre 2022, un rapport intitulé « Finance for Climate Action : Scaling up investment for climate and development » [Financement pour l’action climat : accélérer et accroître l’investissement en faveur du climat et du développement] a été publié par le Groupe d’experts indépendants de haut niveau sur le financement climat, (Independent High-Level Expert Group on Climate Finance). Ce groupe a été lancé en juillet 2022 par les Présidences de la COP-26 (Royaume-Uni) et de la COP-27 (Egypte) et il est co-présidé par l’économiste britannique Nicolas Stern. Ce rapport a été établi à la suite de la demande conjointe des deux Présidences (voir lettre du 19/07/2022).

Le rapport, qui vise à fournir un cadre pour le financement de l’action climat, conclut notamment :

  • que l’action actuelle est trop lente et trop faible et retarder l’action est dangereux,
  • que le monde a besoin d’une nouvelle feuille de route sur le financement climat qui soit en mesure de mobiliser les 1 000 Md$/an nécessaires en 2030 pour aider les pays en développement et émergents (hors la Chine qui n’est pas prise en compte dans cette analyse),
  • que les politiques publiques et les mesures gouvernementales ont un rôle important à jouer pour stimuler les investissements,
  • que le secteur privé, les banques multilatérales de développement et les institutions financières internationales ont également un rôle complémentaire à jouer,
  • qu’à la différence du chiffre des 100 Md$/an, qui a été négocié lors de la COP-15 à Copenhague et qui ne se basait pas sur des analyses du montant réellement nécessaire, le chiffre de 1 000 Md$/an est le montant nécessaire pour permettre aux pays en développement de s’adapter au changement climatique et de faire face à ses impacts irréversibles (pertes et préjudices), montant basé sur une analyse des investissements et actions climat nécessaires et sur le financement national potentiellement disponible.

Lire notre article sur ce sujet.

Rapport du PNUE : Estimation des coûts annuels de l’adaptation d’ici 2030 – entre 160 et 340 Md$

Le 2 novembre 2023, le Programme des Nations Unies pour l’Environnement (PNUE) a publié son rapport annuel sur l’adaptation Adaptation Gap Report (à l’instar de son rapport annuel sur les émissions de GES, Emissions Gap Report). Ce rapport évalue l’écart entre les efforts consentis par les Etats pour s’adapter au dérèglement climatique (dont les flux de financement fournis par les pays industrialisés aux pays en développement) et les besoins réels nécessaires des pays en développement pour y faire face. Parmi ses conclusions :

  • l’estimation des coûts actualisés de l’adaptation pour les pays en développement se situe dans une fourchette centrale plausible entre 215 à 387 milliards de dollars (Md$) par an au cours de la décennie 2021-2030;
  • les besoins de financement pour l’adaptation des pays en développement sont 10 à 18 fois plus importants que les flux de financement public international en 2021, soit en hausse de plus de 50% par rapport à la fourchette d’estimation précédente (flux de financement international en 2020 estimés à 5 à 10 inférieurs aux besoins réels, voir p.32 de notre dossier de fond sur la COP-27)
  • les flux publics multilatéraux et bilatéraux de financement de l’adaptation vers les pays en développement ont diminué de 15% pour atteindre environ 21 Md$ en 2021. Cette baisse, jugée inquiétante par le PNUE, intervient malgré l’objectif fixé en novembre 2021 de doubler le soutien financier à l’adaptation en 2019 pour atteindre environ 40 Md$ par an d’ici à 2025 (dans le cadre du Pacte de Glasgow pour le climat, adopté lors de la CMA-3, décision 1/CMA.3, §18) ;
  • en raison de l’augmentation des besoins de financement de l’adaptation et de l’affaiblissement des flux, l’estimation du déficit actuel de financement de l’adaptation est désormais comprise entre 194 et 366 Md$ par an.

Voir rapport intégral | synthèse | messages clés.

Enfin, selon le Secrétaire général de l’OCDE, Matthias Cormann, d’ici 2025, il est estimé que les pays en développement auront des besoins d’investissements liés à l’action climat d’environ 1 000 Md$, et que ce chiffre passera à environ 2 400 Md$ par an entre 2026 et 2030 (source : avant-propos du 6e bilan de l’OCDE, publié le 16 novembre 2023).

 

Certaines de ces Parties appellent les pays développés à honorer le montant non fourni en 2020 (soit 16,7 Md$) et en 2021 (soit 10,4 Md$) par rapport à  l’objectif des 100 Md$/an (à savoir les années où celui-ci n’a pas été respecté. Total fourni en 2020 : 83,3 Md$ ; total fourni en 2021 : 89,6 Md$ – lire notre article) .

A l’autre extrême, les pays développés ont refusé jusque-là de parler « chiffres », c’est-à-dire de quantifier le futur objectif sous forme de proposition chiffrée (appelée en anglais le « quantum » ou montant), soulignant le fait qu’il soit trop tôt encore, alors qu’en réalité, il leur reste désormais à peine cinq mois pour fixer le montant. Ils insistent sur l’importance de se mettre d’accord sur les éléments structurels qui sous-tendent l’objectif avant de fixer le montant lui-même. p

 

Qui va contribuer au financement à fournir aux pays en développement par les pays développés ?

Sur cette question, les discussions ont fait ressortir de profondes divergences entre pays en développement et pays développés. Les pays développés souhaitent également élargir la base des pays donateurs pour inclure les pays à revenu élevé (Chine, Corée du Sud, pays du Golfe,…), ce que refusent catégoriquement le groupe G77+Chine. Ces Parties campent fermement sur leur position : les pays développés se sont engagés au titre de l’Accord de Paris (article 9.1) à fournir un financement climat aux pays en développement. Elles insistent également sur l’importance d’intégrer dans le nouvel objectif le principe des responsabilités communes mais différenciées et des capacités respectives (voir encadré ci-après), ce que refusent les pays développés.

 

En savoir plus sur les responsabilités communes mais différenciées

Au titre de la Convention Climat (article 3.1), les Parties doivent « préserver le système climatique dans l’intérêt des générations présentes et futures, sur la base de l’équité et en fonction de leurs responsabilités communes mais différenciées et de leurs capacités respectives. Il appartient, en conséquence, aux pays développés d’être à l’avant-garde de la lutte contre les changements climatiques et leurs effets néfastes » [en raison de leur responsabilité historique dans la production des émissions de GES].

 

Quelles sources de financement ?

Alors que les pays en développement insistent sur l’importance d’axer les négociations uniquement sur le financement public, les pays développés souhaitent élargir le flux de financement pour inclure le financement du secteur public et celui issu de la réforme des banques multilatérales de développement, en s’appuyant sur une « mosaïque » de solutions en termes de sources de financement, pour reprendre le terme utilisé par l’ancien vice-Président de la Commission européenne, Frans Timmermans lors de la COP-27.

 

Quel volet d’action climat financer ?

L’objectif doit-il viser l’adaptation et l’atténuation uniquement (conformément à l’article 9.1 de l’Accord de Paris) ou faut-il définir un sous-objectif pour les pertes et préjudices ? Les discussions à Bonn ont, là encore, fait ressortir de profondes divergences de position entre les pays en développement et les pays industrialisés.

D’un côté, les pays en développement ont insisté sur le fait que l’objectif devrait prévoir une « fenêtre » séparée du montant, spécifiquement consacrée au financement climat pour les pertes et préjudices et ce, en plus des deux « fenêtres » pour l’atténuation et l’adaptation. Puisque le financement fourni par les pays industrialisés au titre du fonds pertes et préjudices (à ce jour : 661,9 M$ issus de 18 pays et de l’UE dans son ensemble, source : NRDC, juin 2024) est bien en deçà des besoins réels, les pays en développement exigent un sous-objectif formel pour le financement climat consacré aux pertes et préjudices.

De l’autre côté, les pays industrialisés soulignent que le financement des pertes et préjudices ne relève pas du mandat du nouvel objectif collectif chiffré post-2025.

 

Autres questions qui ont donné lieu à des divergences de position

  • quelles catégories de pays seront bénéficiaires du financement climat au titre du nouvel objectif ? (Les pays en développement dans leur ensemble ? Quels critères d’éligibilité?
  • quelle échéance fixer pour atteindre l’objectif (2030 ?), c’est-à-dire sur quelle période le nouvel objectif s’appliquera-t-il ? 5 ans ? 10 ans ?
  • qualité du financement: le soutien financier serait-il apporté sous forme de dons (subventions) plutôt que des prêts ? Quelle sera la part de ces deux types de financement ? Les pays en développement et les ONG insistent sur l’importance de privilégier la première option pour ne pas alourdir davantage le fardeau de la dette des pays bénéficiaires. Ainsi, les pays les moins avancés (PMA) et l’alliance des petits Etats insulaires (AOSIS) insistent sur le fait que les ressources financières fournies et mobilisées pour l’adaptation et les pertes et préjudices doivent être essentiellement publiques et basées sur des subventions. Cette exigence figure dans une contribution conjointe soumise par les PMA et l’AOSIS le 11 juin 2024 au Secrétariat de la CCNUCC ;
  • comment définir le financement climat : aucune définition précise officielle et formellement reconnue de ce concept n’existe. Aujourd’hui, les pays développés utilisent des métriques différentes pour mesurer le montant de financement qu’ils fournissent, ce qui a suscité une grande méfiance de la part des pays en développement, et notamment l’Inde qui a critiqué à plusieurs reprises la méthodologie appliquée par l’OCDE pour établir son bilan annuel.

 

Malgré toutes ces profondes divergences, les opinions des Parties ont pu se rapprocher sur certaines questions, comme par exemple, le besoin d’améliorer l’accès des pays en développement au financement et de mettre à jour le cadre de transparence renforcée pour réaliser le rapportage sur le financement climat fourni et reçu (modalités de suivi de ce financement).

 

Prochaines étapes

Les deux co-Présidents du programme de travail ont invité les Parties à soumettre leurs points de vue consolidés et actualisés sur le nouvel objectif. Ils ont également convenu de :

  • produire un compte rendu de la 2e réunion du programme de travail ad hoc, avec des informations sur les progrès réalisés ;
  • lancer les préparatifs en vue de sa 3e réunion (octobre 2024) ;
  • publier des questions d’orientation pour la remise des contributions des Parties en amont de cette 3e réunion ; et
  • préparer une nouvelle synthèse des contributions (input paper) pour la 3e réunion sur la base des nouvelles contributions qui seront soumises suite à la demande des deux co-Présidents (voir plus haut).

 

Une réunion des chefs de délégation est prévue en juillet 2024. La 11e réunion du dialogue technique entre les experts (TED11) se tiendra en octobre 2024 avant la 3e réunion du programme de travail ad hoc. Un dialogue ministériel de haut niveau sur le nouvel objectif se tiendra également en octobre 2024 afin d’ouvrir la voie à un résultat concret et concluant lors de la CMA-6 à Bakou.

En parallèle, les chefs de délégation doivent maintenant redoubler d’efforts pour finaliser des options claires, précises et viables, ainsi qu’un cadre concret d’un projet de décision avant la CMA-6 et la COP-29 pour examen et adoption à Bakou.

 

Article 2.1(c)

Les délégués ont abordé le sujet de l’article 2.1(c) à Bonn au cours d’un dialogue spécifique.

En savoir plus sur l’article 2.1(c)

L’article 2.1 de l’Accord de Paris fixe trois objectifs à long terme :

  • (a) température: contenir la hausse de la température moyenne de la planète nettement en dessous de 2°C par rapport aux niveaux pré-industriels et en poursuivant l’action menée pour atteindre 1,5°C,
  • (b) adaptation : renforcer les capacités d’adaptation et promouvoir la résilience à ces changements et un développement à faible émission de gaz à effet de serre,
  • (c) financement : rendre les flux financiers compatibles avec une trajectoire d’évolution vers un développement à faible émission de gaz à effet de serre et résilient aux changements climatiques.

A Charm el-Cheikh, lors de la première journée de la COP-27 et de la CMA-4, l’UE avait demandé (sans succès) que le sujet de l’article 2.1(c) soit ajouté à leur ordre du jour formel. Les Parties ont toutefois convenu que ce sujet fasse l’objet de consultations informelles pendant la Conférence. Ces consultations informelles ont abouti à un consensus parmi les Parties réunies au sein de la CMA-4 : celle-ci a décidé de lancer le dialogue de Charm el-Cheikh entre les Parties, organisations et autres parties prenantes sur l’article 2.1(c) de l’Accord de Paris (paragraphe 68 de la décision 1/CMA-4).

Par ailleurs, les banques multilatérales de développement et les institutions financières internationales (Banque mondiale, FMI,…) ont été invitées à réformer leurs pratiques et à redéfinir leurs priorités, à aligner leurs financements avec l’objectif de l’article 2.1(c) et à accroître leur financement climat (paragraphes 61 et 62 de la décision 1/CMA-4).

La mission du dialogue de Charm el-Cheikh est d’échanger les points de vue et de mieux comprendre l’article 2.1(c). Le Secrétariat de la CCNUCC a été chargé, sous le pilotage de la Présidence de la COP-27, d’organiser deux ateliers (workshops) en 2023 et d’élaborer un rapport pour la CMA-5 sur les résultats de ces deux ateliers (paragraphe 68 de la décision 1/CMA-4).

Le premier atelier a eu lieu les 19-20 juillet 2023 à Bangkok, Thaïlande. Son objectif était de donner un aperçu des travaux antérieurs et existants qui ont été réalisés en rapport avec l’article 2.1(c), dans le cadre du processus intergouvernemental et en dehors de celui-ci, ainsi que de recueillir les avis, les perspectives et les expériences des Parties et des organisations et parties prenantes concernées sur le champ d’application de l’article 2.1(c) de l’Accord de Paris et sur sa complémentarité avec l’article 9 de l’Accord de Paris (portant sur le financement). Voir ordre du jour.

Le 2e atelier a eu lieu les 3-4 octobre 2023 à Genève. Son objectif était de s’appuyer sur les discussions du premier atelier et de faire progresser la compréhension du champ d’application de l’article 2.1(c) et de sa complémentarité avec l’article 9 de l’Accord de Paris. L’atelier visait à tirer parti d’un ensemble diversifié de points de vue des secteurs financiers public, privé et non gouvernemental.

Un rapport de synthèse des discussions menées lors des deux ateliers a été élaboré par le Secrétariat de la CCNUCC sous la direction de la Présidence de la COP-27. Il a été publié le 20 novembre 2023.

A Dubaï en décembre 2023, la CMA-5 a adopté la décision 9/CMA.5 qui porte sur les questions relatives au Comité permanent sur le financement (Standing Committee on Finance ou SCF). Dans cette décision, la CMA-5 décide de poursuivre et de renforcer le dialogue de Charm el-Cheikh sur l’article 2.1(c) sur 2024-2025 (paragraphe 8). Deux co-Présidents, chargés d’animer ce dialogue, seront nommés, l’un devant provenir d’un pays industrialisé et l’autre d’un pays en développement (paragraphe 9). En outre, le Secrétariat de la CCNUCC est chargé d’organiser deux ateliers par an (sur la période 2024-2025) et d’élaborer un rapport sur les résultats de chacun des quatre ateliers (paragraphe 10). Les deux co-Présidents du dialogue sont également chargés d’élaborer un rapport sur les discussions (« déliberations » en anglais, terme moins fort que « negotiations ») en 2024 et 2025 dans le cadre du dialogue de Charm el-Cheikh et ce, pour examen par la CMA-6 (11-22 novembre 2024 à Bakou, Azerbaïdjan) (paragraphe 13). Enfin, les deux co-Présidents du dialogue sont chargés d’élaborer, dans le cadre de leur rapport de 2025, une synthèse de l’ensemble des travaux réalisés au titre du dialogue de Charm el-Cheikh et ce, pour examen par la CMA-7 (fin 2025) pour que celle-ci prenne une décision sur les prochaines étapes concernant les discussions sur ce sujet.

Par lettre du 20 février 2024, le Président de la COP-28, Sultan Al Jaber a nommé les deux co-Présidents : Gabriela Blatter (Suisse) et Mohamed Ibrahim Nasr Salem (Egypte).

 

Le 3e atelier dans le cadre du dialogue sur l’article 2.1(c) a eu lieu les 12-13 juin 2024. Il a été axé sur les investissements pour l’adaptation et la compatibilité des flux financiers avec une trajectoire de développement résiliente au climat. Les discussions ont fait ressortir les aspects suivants :

  • les approches intégrant les risques climatiques ne devraient pas accroître le coût du capital pour les pays jugés à haut risque ;
  • les banques centrales ont un rôle à jouer dans la promotion de l’intégration des aspects environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG) dans la prise de décision financière ;
  • le recours à des incitations directes dans le cadre de la participation ESG des acteurs corporatifs, par exemple pour soutenir l’agroforesterie et les cultures intercalaires ;
  • la non-mise en œuvre de cadres politiques tels que la Déclaration des dirigeants de Glasgow sur les forêts et l’utilisation des terres, adoptée le 2 novembre 2021 lors de la COP-26 à Glasgow (lire notre dossier de fond sur la COP-26, p.17). ;
  • le réinvestissement des recettes de la fiscalité carbone en soutien à la transition de l’industrie et pour minimiser les remises en cause de la politique climat ;
  • le recours au financement mixte, notamment pour mobiliser des financements privés.

 

Puisque les pays développés n’ont pas encore proposé de chiffres concrets pour le nouvel objectif financement climat post-2025 et, plus précisément, en l’absence de propositions chiffrées en matière de financement public, les pays en développement sont réticents à s’engager sur d’autres aspects de l’objectif, en particulier sur l’alignement des flux financiers au titre de l’article 2.1(c).

 

 

Bilan mondial (Global Stocktake ou GST)

 

Pour des éléments de contexte détaillés sur le sujet Bilan mondial (GST), lire notre article « Guide du Citepa des enjeux de la COP-28 : l’essentiel pour comprendre le contexte des négociations », publié le 28 nov. 2023 et notre article sur les résultats de la COP-28 publié le 14 février 2024

Voir programme et note de cadrage (concept note, mai 2024).

 

En savoir plus sur le Bilan mondial : résultats de la phase politique à Dubaï

 

L’article 14 de l’Accord de Paris prévoit la réalisation tous les cinq ans, à commencer par 2023, d’un bilan mondial (Global Stocktake ou GST). La décision 19/CMA.1 (adoptée lors de la Conférence de Katowice du 2 au 16 décembre 2018) est venue préciser les modalités de réalisation de ce bilan (lire pp. 30-34 de notre dossier de fond sur les résultats de Katowice). Il s’agit d’un bilan de la mise en œuvre de l’Accord de Paris afin d’évaluer les progrès collectifs, et non ceux des pays individuels, vers la réalisation de ses objectifs à long terme [articles 2 et 4]. Le bilan mondial doit servir de catalyseur pour renforcer le niveau d’ambition collective dans la réalisation des objectifs de l’Accord de Paris. Il est destiné à éclairer la prochaine série de contributions nationales que doivent soumettre les Parties à l’Accord de Paris en 2025 et ce, conformément au mécanisme de révision quinquennale des NDC, juridiquement contraignant (au titre de l’article 4.2 de l’Accord de Paris), sachant que les engagements nationaux inscrits dans ces NDC-3 devraient être plus ambitieux que ceux des NDC-2 (cf. article 4.3 de l’Accord de Paris).

Conformément à la décision 19/CMA.1, le bilan mondial est composé de trois éléments :

  • 2021-juin 2022: collecte et traitement d’informations,
  • 2022 – juin 2023: évaluation technique dont l’objectif est de dresser un bilan de la mise en œuvre de l’Accord de Paris pour évaluer, d’une part, les progrès collectifs vers la réalisation des objectifs à long terme de l’Accord et, d’autre part, les possibilités de renforcer l’action et le soutien,
  • déc. 2023: volet politique : examen des résultats de l’évaluation technique et de ses conséquences en vue, d’une part, d’éclairer les Parties dans la mise à jour et le renforcement de leurs objectifs, actions et soutien déterminés au niveau national et, d’autre part, de renforcer la coopération internationale en faveur de l’action climat.

 

Les travaux dans le cadre du bilan mondial ont été axés sur trois domaines thématiques :

  • atténuation,
  • adaptation et pertes et préjudices,
  • moyens de mise en œuvre (soutien financier, transfert de technologies, renforcement des capacités).

 

Les travaux techniques en amont de la CMA-5 à Dubaï ont débouché à la décision 1/CMA.5 sur le bilan mondial, adoptée par les Parties à l’Accord de Paris lors de la CMA-5. Cette décision constitue la décision phare de la Conférence de Dubaï.

Cette décision (de 23 p, et de 196 paragraphes) est un texte de compromis. La décision fait office de décision chapeau, en établissant une vision d’ensemble, en englobant tous les sujets de négociation clés (atténuation, adaptation, pertes et préjudices, financement, développement et transfert de technologies, renforcement des capacités, coopération internationale, prochaines étapes) et en traçant la voie à suivre au cours de cette décennie cruciale pour « rectifier le tir » afin de rendre la trajectoire d’émissions de GES compatible avec l’objectif +1,5°C.

Cette décision fixe plusieurs objectifs notamment dans le cadre d’un paquet sur la transition énergétique (il s’agit d’objectifs non contraignants) pour accélérer les mesures d’atténuation des pays : [§ 28] la CMA invite [calls on] les Parties à contribuer à huit efforts mondiaux dont :

  • [§ 28a] tripler la capacité mondiale de production des énergies renouvelables et doubler le taux annuel moyen mondial d’amélioration de l’efficacité énergétique d’ici 2030.
  • [§ 28b] accélérer les efforts en vue de la réduction progressive [phase down] de l’électricité produite à partir du charbon sans captage/stockage du CO2 [unabated] ;
  • [§ 28d] assurer une transition pour s’éloigner [transitioning away from] des combustibles fossiles dans les systèmes énergétiques [uniquement dans le secteur de la production/transformation d’énergie, et non pas dans le secteur industriel], d’une manière juste, ordonnée et équitable, en accélérant l’action au cours de cette décennie critique, de manière à atteindre l’objectif de zéro émission nette d’ici 2050;
  • [§ 28e] accélérer les technologies à zéro émission nette ou à faibles émissions, y compris les énergies renouvelables, le nucléaire, les technologies de réduction et d’élimination, comme le captage et le stockage du CO2, en particulier dans les secteurs où il est difficile de réduire les émissions, et la production d’hydrogène à faible teneur en carbone [A noter par ailleurs que c’est la première fois qu’une décision de la COP fait référence à l’énergie nucléaire] ;
  • [§ 28f] accélérer une réduction forte des émissions de GES hors CO2, en particulier les émissions de méthane, d’ici 2030;
  • [§ 28h] éliminer progressivement les subventions inefficaces aux combustibles fossiles [objectif G20 depuis la déclaration du sommet de Pittsbsurgh, 2009] qui ne ciblent pas la précarité énergétique, ni les transitions justes [nouvelle précision];
  • [§ 97 et 98] la CMA décide d’établir un dialogue sur la mise en œuvre des résultats du bilan mondial et ce, à partir de la CMA-6 (nov. 2024) sur quatre ans, les travaux devant s’achever en 2028, lors de la CMA-10. Le SBI est prié d’élaborer les modalités du programme de travail de ce dialogue lors de sa 60e session (SBI-60, Bonn, juin 2024) ;
  • [§ 191] la CMA décide de lancer, sous l’égide des Présidences de la CMA-5 [Emirats arabes unis], de la CMA-6 [Azerbaïdjan] et de la CMA-7 [Brésil], une feuille de route Mission +1,5°C, afin de renforcer la coopération internationale pour stimuler l’ambition dans le prochain cycle des NDC et renforcer l’action et la mise en œuvre au cours de cette décennie cruciale.

La décision 1/CMA.5 a demandé aux Présidents des organes subsidiaires d’organiser un dialogue annuel à partir de leur 60e session pour faciliter le partage des connaissances et des bonnes pratiques sur la façon dont les résultats du bilan mondial éclairent la préparation des prochaines NDC des Parties (qui doivent être soumises en 2025). Le dialogue fournira une plateforme pour des discussions ouvertes et des échanges entre les Parties et les acteurs non-étatiques visant à débattre des leçons, des expériences et des solutions pratiques pour combler les lacunes de mise en œuvre dans les NDC actuelles, en accélérant l’action en renforçant l’ambition dans la prochaine série de NDC.

 

Résultats

Les négociations sur les suites à donner au bilan mondial ont été menées dans le cadre de consultations informelles sur deux aspects : (1) les éléments procéduraux et logistiques du processus du GST et (2) les modalités du dialogue annuel sur le GST.

 

Eléments procéduraux et logistiques du processus GST

L’objectif de Bonn était de débattre de la question de savoir comment affiner les éléments procéduraux et logistiques du processus du GST sur la base de l’expérience acquise dans le cadre du premier GST, en vue d’adopter une décision à Bakou. Les consultations informelles ont été co-animées par Patrick Spicer (Canada) et Thureya Al Ali (Emirats arabes unis). Les principaux points de discussion ont porté sur les points suivants :

  • la question de savoir s’il faut aligner la publication du 7e cycle d’évaluation du Giec (Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat) sur le deuxième GST (2028) afin d’inclure les meilleures connaissances scientifiques disponibles ;
  • l’amélioration de la transition entre les phases d’évaluation technique et l’examen des résultats du GST (phase politique) ; et
  • la composition du Comité de haut niveau des GST à venir (le 2e GEST est prévu en 2028).

 

Etant donné les objections du groupe de négociation LMDC et du groupe arabe, les Parties n’ont pas pu se mettre d’accord pour inviter formellement le Giec à réfléchir à la meilleure façon d’aligner ses travaux sur le cycle du GST, et surtout sur le 2e GST.

Les Parties n’ont pas pu parvenir à un consensus sur l’ensemble du sujet « éléments procéduraux et logistiques du processus GST ».

Dans leurs conclusions conjointes, le SBSTA et le SBI « prennent note » de la note informelle rédigée par les deux co-facilitateurs, indiquant qu’elle ne fait pas l’objet d’un consensus entre les Parties. Celles-ci reprendront le sujet à Bakou en novembre 2024 lors des sessions SB-61 en vue d’aboutir à un projet de décision pour adoption par la CMA-6 à Bakou.

Voir les conclusions conjointes SBSTA/SBI et la note informelle.

 

Modalités du dialogue annuel sur le GST

L’objectif de Bonn était de mener des discussions sur les modalités (éléments pratiques) du premier dialogue annuel sur le GST (cf. décision 1/CMA.5, paragraphes 97 et 98) pour le rendre opérationnel lors de la CMA-6 à Bakou et ce, en vue de mettre en œuvre concrètement les résultats du premier GST. Ce sous-volet des négociations est très important car les résultats de la phase politique du 1er GST doivent éclairer les travaux d’élaboration de la prochaine série des NDC (qui devront couvrir la période jusqu’en 2035), à soumettre par les Parties en 2025.

Les consultations informelles ont été co-animées par Ricardo Marshall (Barbade) et Patrick Spicer (Canada).

Sur ce volet, une des pommes de discorde majeures entre les Parties était de savoir comment donner suite à la décision 1/CMA.5 et aux engagements des Parties qu’elle énonce, surtout au paragraphe 28. Les discussions ont fait ressortir des désaccords entre les Parties, et surtout entre pays développés et pays en développement. Les premiers (UE, Norvège, Etats-Unis, Japon en tête), ainsi que le groupe des petits Etat insulaires (AOSIS), soutenaient que ces discussions devraient être centrées sur tous les aspects des résultats du bilan mondial, dont les efforts à consentir pour réduire les émissions de GES. En revanche, le groupe de négociation LMDC, les pays d’Amérique latine (groupe AILAC), et les pays les moins avancés (surtout les pays africains) souhaitaient qu’elles soient axées sur le financement climat, affirmant qu’il leur serait impossible de réduire leurs émissions sans soutien financier de la part des pays développés pour les aider à assurer leur transition énergétique. Ces pays font remarquer que le paragraphe 97 de la décision 1/CMA.5 qui établit le dialogue sur la mise en oeuvre des résultats du GST (voir encadré plus haut) est placé dans la section C.1 consacrée au financement.

Les Parties n’ont pas pu parvenir à un consensus sur ce sujet. Dans leurs conclusions conjointes, le SBSTA et le SBI « prennent note » de la note informelle rédigée par les deux co-facilitateurs, indiquant qu’elle ne fait pas l’objet d’un consensus entre les Parties. Celles-ci reprendront le sujet à Bakou en novembre 2024 lors des sessions SB-61 en vue d’aboutir à un projet de décision pour adoption par la CMA-6 à Bakou.

Voir les conclusions conjointes SBSTA/SBI et la note informelle.

 

 

Pertes et préjudices

 

  • SBI 6-7 juin 2024: 3e et dernière réunion du dialogue de Glasgow sur les pertes et préjudices (réunion dite GD3). Mis en place par la décision 1/CMA-3 (adoptée à Glasgow), ce dialogue est mené entre les Parties pour discuter des modalités de financement des activités pour éviter, minimiser et traiter les pertes et préjudices liés au changement climatique. Le dialogue de Glasgow n’est pas investi de pouvoirs de prise de décision. Sa première réunion s’était tenue à Bonn, les 7, 8 et 11 juin 2022 dans le cadre du SBI-56, sa 2e réunion avait eu lieu du 8 au 10 juin 2023 lors de la session SBI-58. Il doit terminer ses travaux lors de sa 3e réunion dans le cadre de la session SBI-60.

Voir programme.

Pour en savoir plus sur le sujet pertes et préjudices, lire notre article « Guide du Citepa des enjeux de la COP-28 : l’essentiel pour comprendre le contexte des négociations », publié le 28 nov. 2023 et notre article sur les résultats de la COP-28 publié le 14 février 2024

 

Résultats

Les modalités de fonctionnement du fonds pertes et préjudices (dont le principe avait été acté lors de la CMA-4 à Charm el-Cheikh, novembre 2022) ayant été établies via les décisions 1/CP.28 et 5/CMA.5 adoptées respectivement lors de la COP-28 et de la CMA-5 à Dubaï (décembre 2023), les discussions à Bonn ont été moins axées sur le sujet pertes et préjudices. Une plus grande attention a été accordée au sujet brûlant du nouvel objectif collectif chiffré post-2025 pour le financement climat.

Le troisième dialogue de Glasgow sur les pertes et préjudices, qui s’est tenu les 6-7 juin 2024, a permis d’aborder les modalités de coordination du fonds pertes et préjudices, d’évaluer les progrès accomplis et de formuler de nouvelles recommandations. 

A noter que pendant les sessions SB-60 à Bonn, le Conseil des directeurs généraux (Board of Executive Directors) de la Banque mondiale a annoncé le 10 juin 2024 qu’il a approuvé le rôle de celle-ci qui lui avait été confié par la CMA-5 à Dubaï le 30 novembre 2023 (cf. décision 5/CMA.5, paragraphes 20 et 21). Ce rôle consiste à héberger le fonds pertes et préjudices et à être son administrateur et ce, pendant une période provisoire de quatre ans.

 

Le Conseil du fonds pertes et préjudices et la Banque mondiale 

Le Conseil d’administration (Board) du fonds pertes et préjudices est indépendant de la Banque mondiale et dispose de sa propre structure de gouvernance. Il déterminera les principales priorités, notamment les décisions de financement, les critères d’éligibilité et les politiques de gestion des risques. Le fonds devrait être opérationnel au cours des prochains mois. En tant qu’administrateur, la Banque mondiale ne jouera aucun rôle dans la collecte de fonds, les décisions d’allocation de fonds ou l’identification, la préparation, l’évaluation, la mise en œuvre ou le suivi des projets financés par le fonds. Les entités chargées de la mise en œuvre et les bénéficiaires directs resteront seuls responsables de l’utilisation finale des fonds, notamment en ce qui concerne les aspects fiduciaires, environnementaux et sociaux, vis-à-vis du conseil d’administration du fonds (source : Banque mondiale, 10 juin 2024).

 

 

Adaptation

 

En savoir plus sur l'objectif mondial en matière d’adaptation

Le sujet de l’adaptation est désormais placé sur le même rang d’importance que l’atténuation depuis l’Accord de Paris.

L’article 7.1 de l’Accord de Paris prévoit la fixation d’un objectif mondial en matière d’adaptation (Global Goal on Adaptation, GGA) consistant à renforcer les capacités d’adaptation, à accroître la résilience aux changements climatiques et à réduire la vulnérabilité à ces changements. Si le principe d’un objectif mondial est ainsi énoncé dans l’Accord de Paris, il incombe aux Parties de le définir concrètement. Or, depuis la COP-21, la concrétisation de cet objectif n’avait pas figuré parmi les sujets prioritaires des CMA et n’avait donc pas fait l’objet de discussions plus poussées et ce, malgré les demandes des pays en développement, les pays africains en tête. Le groupe de négociation des pays africains (African Group) avait proposé dès 2013, soit deux ans avant l’adoption de l’Accord de Paris, une démarche pour quantifier un objectif mondial.

S’il existe des méthodologies bien établies pour suivre et évaluer les émissions de GES et les efforts et actions menés pour les réduire, il est plus difficile de définir des paramètres communs pour l’adaptation, et plus précisément de définir, de mesurer, de suivre, d’évaluer et de financer les actions d’adaptation. Ces difficultés ont eu pour conséquence de freiner les progrès en la matière, alors qu’en même temps, les risques climatiques s’accélèrent et s’intensifient. En amont de la Conférence de Glasgow sur le Climat (COP-26 et CMA-3, novembre 2021), les seules références à l’adaptation dans l’ordre du jour provisoire de la CMA concernaient le Fonds d’adaptation et le Comité d’adaptation. Le sujet de l’objectif global a été ajouté à l’ordre du jour de la CMA-3 le premier jour de la Conférence, sous la pression des pays africains notamment. Depuis plusieurs années, les pays africains (qui consacrent déjà une part importante de leur PIB à l’adaptation, entre 2 et 9% selon les pays, source : PNUD, 2017) font pression lors des négociations de la CCNUCC pour qu’un objectif quantitatif et qualitatif concret sur l’adaptation soit adopté.

Ce n’était qu’à Glasgow (lors de la CMA-3) en 2021 que les Parties se sont mises d’accord pour renforcer l’action sur l’adaptation. La décision 7/CMA.3, adoptée au terme de la CMA-3 à Glasgow, a chargé le SBI et le SBSTA de déterminer conjointement les finalités et les modalités d’un objectif mondial en matière d’adaptation.

En soulignant le besoin de renforcer l’action sur l’adaptation, les Parties de la CMA-3 ont reconnu l’importance de l’objectif mondial en matière d’adaptation pour la mise en œuvre effective de l’Accord de Paris, et se sont mises d’accord pour lancer un programme de travail de deux ans (2022-2023) dit « Glasgow-Charm el-Cheikh sur l’objectif mondial en matière d’adaptation » (Glasgow-Charm el-Cheikh Work Programme on the Global Goal on Adaptation) (cf. paragraphes 11 et 12 de la décision 1/CMA.3) et ce, sous l’égide conjointe du SBSTA et du SBI. La mise en œuvre de ce programme de travail a commencé après la CMA-3. Le programme de travail vise notamment à améliorer la compréhension de l’objectif mondial en matière d’adaptation (définition et choix de métriques, de méthodologies, d’indicateurs et de données,..) et, sur ces bases, à mieux quantifier les progrès accomplis par les Parties.

Dans le cadre de ce programme de travail, quatre ateliers par an ont été prévus, soit au total, huit sur les deux années du programme. En 2022, quatre ateliers ont ainsi été programmés : le premier les 8-9 juin 2022 à Bonn lors des sessions de négociation intermédiaires du SBSTA-56 et du SBI-56, le deuxième en virtuel les 30-31 août 2022, le troisième en virtuel les 17-18 octobre 2022 et le quatrième le 5 novembre 2022 lors de la CMA-4 à Charm el-Cheikh. Voir synthèse des résultats des quatre ateliers de 2022. En 2023, quatre ateliers ont également été programmés : le 5e atelier, 20-22 mars 2023 à Malé, Maldives – voir synthèse des résultats, le 6e atelier, 4-5 juin 2023 à Bonn – voir synthèse des résultats, le 7e atelier, 31 juillet-2 août 2023 à Buenos Aires, Argentine – voir synthèse des résultats, et le 8e et dernier atelier, 27-29 septembre 2023 à Gabarone, Botswana – voir synthèse des résultats.

Sous la pression des pays en développement lors des sessions intermédiaires de négociation à Bonn (juin 2022 – lire notre article), les Parties sont parvenues à un accord pour inscrire le sujet à l’ordre du jour formel de la CMA-4 à Charm el-Cheikh (cf. voir ordre du jour provisoire en date du 26 août 2022, agenda item 6(c)). Ceci a constitué une avancée non négligeable en amont de cette Conférence.

 

Mise en place d’un cadre pour répondre à cet objectif

A Charm el Cheikh (nov. 2022), la CMA-4 avait décidé de lancer un cadre (framework) pour l’objectif mondial sur l’adaptation à mettre en œuvre en 2023 au sein du programme de travail Glasgow-Charm el-Cheikh. Ce cadre devait être adopté à Dubaï lors de la CMA-5. Il vise à aider les Parties à atteindre l’objectif mondial et à évaluer les progrès collectifs accomplis à cet effet (paragraphe 8 de la décision 3/CMA.4).

A Dubaï (déc. 2023) lors de la CMA-5, dans le cadre des négociations sur la concrétisation du cadre de l’objectif mondial, les deux questions les plus épineuses soulevées par les pays en développement étaient le financement de l’adaptation, ainsi que le principe des responsabilités communes mais différenciées et des capacités respectives. Dans ce contexte, conformément à ce que demandait la décision 3/CMA.4, § 8) la décision adoptée à Dubaï sur l’adaptation (décision 2/CMA.5) établit le cadre des Emirats arabes unis pour la résilience climatique mondiale (UAE Framework for Global Climate Resilience) [§ 6]. Il vise à orienter la réalisation de l’objectif mondial et l’évaluation des progrès pour l’atteindre [§ 7]. Le cadre vise à orienter et renforcer les efforts consentis pour réduire la vulnérabilité et à accroître la capacité adaptive et la résilience, le bien-être collectif de l’humanité, la protection des économies, la préservation et la régénération de la nature [§ 8]. Il fixe sept objectifs qualitatifs thématiques non assortis d’échéances : eau ; agriculture et agroalimentaire ; santé ; écosystèmes et biodiversité ; infrastructure et villes ; élimination de la pauvreté ; patrimoine culturel [§ 9]. Il précise aussi un dispositif de gouvernance, avec la planification, mise en œuvre, suivi et évaluation des efforts d’adaptation d’ici 2030 [§ 10 et 11].

Les observateurs ont souligné des lacunes et insuffisances dans cette décision sur l’adaptation : un langage faible sur les objectifs qualitatifs thématiques ; une absence d’objectifs quantitatifs [cf. version du 5 déc.2023 : maintenir, améliorer ou restaurer au moins 30% des écosystèmes], avec uniquement des objectifs qualitatifs ; un report de plusieurs échéances du dispositif de gouvernance de 2025 à 2030.

Au final, dans la décision adoptée à Dubaï, la CMA décide de conclure le programme de travail Glasgow-Charm el-Cheikh [§ 5] ; et lance un programme de travail de deux ans (2024-2026) (UAE-Belém work programme) sur les indicateurs pour mesurer les progrès accomplis dans la réalisation des objectifs, en vue d’identifier et d’élaborer des indicateurs et des éléments quantifiés pour ces objectifs [§ 39], c’est-à-dire des mesures pertinentes pour suivre et évaluer les actions d’adaptation mises en œuvre (superficie des terres destinées à la culture des produits alimentaires, nombre de morts liés au dérèglement climatique,…). Plusieurs indicateurs ont déjà été définis et mis en œuvre dans d’autres contextes hors CCNUCC mais le défi dans le cadre de la CCNUCC sera d’identifier et d’approuver un ensemble d’indicateurs qui pourront s’appliquer au niveau mondial dans le cadre du GGA.

Ce programme de travail sera mené conjointement par les deux organes subsidiaires SBSTA et SBI [§ 40].

 

Résultats

 

Financement de l’adaptation

A Bonn, dans le cadre des négociations sur le sujet adaptation, la question du financement de celle-ci était omniprésente et a engendré de vives tensions entre pays en développement et pays industrialisés. Comme à Dubaï, le groupe des 77+Chine (134 pays en développement et pays émergents) a insisté à Bonn sur la nécessité d’intégrer un volet financement de l’adaptation dans l’objectif mondial en matière d’adaptation (Global Goal on Adaptation ou GGA)

Un des axes majeurs des négociations sur l’adaptation à Bonn portait sur le programme de travail EAU-Belém sur les indicateurs (2024-2026) (voir encadré ci-dessus), et plus spécifiquement sur ses modalités de mise en œuvre (plan global, calendrier, participants,…). Ces éléments de base doivent être approuvés par la CMA avant que les Parties ne puissent entamer les travaux techniques dans le cadre de ce programme.

 

Les questions qui ont donné lieu à des divergences de position

  • le financement de l’adaptation: les pays en développement exigent qu’il constitue un des indicateurs clés. Le Président du groupe 77+Chine, Adonia Ayebare (Ouganda) était formel : « sans financement, rien ne peut se passer du point de vue d’un pays en développement. C’est dans l’Accord de Paris. Nous nous sommes mis d’accord sur cela. Nous devrions le faire » (source : Carbon Brief, 14 juin 2024). Les pays en développement insistent sur le fait que traiter l’adaptation est indissociable du besoin urgent d’investissements pour renforcer l’adaptation. Selon le dernier rapport du Programme des Nations Unies pour l’Environnement (PNUE) qui évalue l’écart entre les efforts consentis par les Etats pour s’adapter au dérèglement climatique (dont les flux de financement fournis par les pays industrialisés aux pays en développement) et les besoins réels nécessaires de ces derniers pour y faire face, les besoins de financement pour l’adaptation des pays en développement sont 10 à 18 fois plus importants que les flux de financement public international en ce sens en 2021 (source : PNUE, Adaptation Gap Report, 2 novembre 2023).
  • quel organisme doit être chargé de recenser et décrire les indicateurs existants ? Les pays industrialisés ont indiqué leur préférence pour le Comité d’adaptation au sein de la CCNUCC mais les pays du groupe G77+Chine souhaitaient voir la mise en place d’un nouveau groupe d’experts mandaté pour le faire. Dans le projet de conclusions issu de Bonn, les Parties sont parvenus à un compromis : la note en bas de page n°4 indique que les négociateurs examineront les deux options lors de la prochaine session.

 

In fine, les Parties ont pu se mettre d’accord pour :

  • lancer des travaux de fond visant à définir des indicateurs efficaces, transparents et fondés sur les connaissances scientifiques pour chacun des sept objectifs qualitatifs thématiques fixés par la décision 2/CMA.5 (paragraphe 9) au titre du cadre des Emirats arabes unis pour la résilience climatique mondiale ;
  • définir les prochaines étapes nécessaires dans ce cadre pour les Parties et les experts, y compris la manière dont ces indicateurs seront décidés, ainsi que sur les futurs travaux techniques à effectuer.

 

Voir projet de conclusions conjointes SBSTA/SBI sur le GGA adopté à Bonn (en date du 13 juin 2024).

 

Les plans nationaux d’adaptation

Le 2e axe des discussions à Bonn sur le volet adaptation a porté sur les plans nationaux d’adaptation. Dans le cadre de l’objectif mondial en matière d’adaptation, une couverture plus exhaustive de ces plans est visée d’ici 2030. La question de financement est cruciale pour les pays en développement : ceux-ci soulignent qu’ils ont besoin d’un soutien financier non seulement pour mettre en œuvre leur NAP, mais aussi, et surtout, pour les élaborer.

 

Les plans nationaux d’adaptation

Le processus pour élaborer les plans nationaux d’adaptation (National Adaptation Plans ou NAP) a été établi en vertu du cadre de Cancún pour l’adaptation (Cancún Adaptation Framework ou CAF) qui fait partie des Accords de Cancún adoptés lors de la COP-16 (2010). Il permet aux Parties de formuler et de mettre en œuvre des NAP comme moyen d’identifier les besoins d’adaptation à moyen et long terme et de développer et mettre en œuvre des stratégies et des programmes pour répondre à ces besoins. Il s’agit d’un processus continu, progressif et itératif qui suit une approche axée sur les pays, sensible au genre, participative et totalement transparente. Afin d’améliorer la disponibilité du soutien à l’adaptation, la COP de 2015 a demandé au Fonds vert pour le climat d’accélérer le soutien à la formulation et à la mise en œuvre des plans nationaux d’adaptation.

Au 27 juin 2024, 57 Parties (sur les 198 Parties à la CCNUCC, soit 29%) avaient soumis leur NAP (voir liste des NAP soumis).

 

Une évaluation du processus d’élaboration et de mise en œuvre des NAP est envisagée mais les discussions sur les modalités de cette évaluation avancent lentement.

Les discussions ont fait ressortir des divergences d’opinion sur le rôle du financement du secteur privé dans l’adaptation et les retards importants accusés par les pays en développement pour recevoir un soutien financier pour élaborer leur NAP. Les co-facilitateurs des négociations ont rédigé une note informelle en guise d’avant-projet de décision de la CMA-6. A noter qu’en termes de statut, une note informelle des SB a moins de poids que des projets de conclusions des SB en tant qu’étape clé vers l’élaboration d’un projet de décision.

Le sujet sera repris lors de la session SBI-61 à Bakou (parallèlement à la COP-29, 11-22 nov. 2024).

Voir note informelle du SBI sur les NAP adoptée à Bonn (en date du 12 juin 2024 @17h30).

 

 

Atténuation

Voir programme et note d’information du 21 mai 2024.

 

 

En savoir plus sur le programme de travail sur l’ambition en matière d’atténuation

A Glasgow, lors de la 3e réunion des Parties à l’Accord de Paris (CMA-3), celles-ci s’étaient mises d’accord pour lancer un programme de travail pour relever de façon urgente le niveau d’ambition collectif en matière d’atténuation (cf. Pacte de Glasgow : décision 1/CMA.3, § 27). La CMA-3 avait également demandé conjointement au SBSTA et au SBI de lui soumettre un projet de décision sur cette question pour examen et adoption à la CMA-4 à Charm el-Cheikh. Or, les sessions intermédiaires de négociations intermédiaires du SBSTA-56 et du SBI-56 de Bonn (6-16 juin 2022 – lire notre article) n’ont abouti à aucune avancée concrète. C’était donc retour à la case départ à Charm el-Cheikh (nov. 2022) : ainsi, lors de la CMA-4, les Parties sont parvenues à adopter la décision 4/CMA.4 pour amorcer la concrétisation de ce programme de travail, désormais dénommé programme de travail sur l’ambition et la mise en œuvre en matière d’atténuation (Mitigation ambition and implementation work programme ou MWP).

La décision 4/CMA.4 était faible car elle précisait essentiellement les modalités procédurales pour la mise en œuvre du programme de travail :

  • la mise en œuvre du programme doit démarrer après la fin de la Conférence de Charm el Cheikh,
  • il sera mené sous l’égide de la CMA,
  • le programme de travail prévoit au moins deux dialogues par an.

 

Surtout, la décision soulignait que les résultats qui en découleront seraient « non-coercitifs, non-punitifs, basés sur la facilitation, respectueux de la souveraineté nationale et des circonstances nationales, en prenant en compte le fait que les NDC sont déterminées au niveau national et n’imposeront pas de nouveaux objectifs ou de nouvelles cibles ».

 

Par ailleurs, comme à Bonn en juin 2022, les négociations ont fait ressortir fortes divergences d’opinion entre les Parties sur la durée de ce programme :

  • d’un côté, l’UE, les Etats-Unis et les pays vulnérables soutenaient une date de fin des travaux en 2030 pour produire des résultats concrets,
  • de l’autre côté, la Chine, l’Inde, et le groupe des pays arabes préféraient une durée de 12 mois (2023).

 

Les Parties ont fini par trouver un compromis : 2026, toutefois avec la possibilité pour la CMA-8 en 2026 de décider de poursuivre ce programme de travail.

 

La CMA-4 a également décidé, via la décision 4/CMA.4 (paragraphe 8), de tenir au moins deux dialogues mondiaux (Global Dialogues) chaque année dans le cadre du programme de travail, l’un avant la première session des organes subsidiaires à Bonn, à partir de la 58e session (SB-58, 5-15 juin 2023), et l’autre avant la 2e session des organes subsidiaires (en même temps que la COP), à partir de la 59ème session (30 nov. – 6 déc. 2023). Le premier dialogue mondial s’est tenu les 3-4 juin 2023 à la veille de l’ouverture des SB-58. Voir programme et note d’information des co-Présidents du programme de travail MWP (du 2 juin 2023). Le 2e dialogue mondial a eu lieu à Abu Dhabi les 15-16 octobre 2023. Voir programme et note d’information.

 

Lors de la CMA-5, à Dubaï en décembre 2023, il y a eu de vifs débats sur le mandat du programme de travail MWP, et notamment sur la question de savoir s’il couvre le sujet des combustibles fossiles et si la décision finale devait contenir des messages politiques. Il n’y a donc pas eu d’avancées concrètes sur le fond du problème. La décision finale (décision 4/CMA.5) est plutôt de nature procédurale (axée sur la forme plutôt que sur le fond) en raison du manque de consensus sur le mandat du programme de travail et sur la question de savoir qui doit assumer la responsabilité de réduction des émissions et comment. Les références à l’objectif +1,5°C qui figuraient dans la version précédente du projet de décision (version du 9 déc. @00h30) ont été supprimées : « la CMA note l’évaluation du Giec, selon laquelle les impacts du changement climatique seront beaucoup plus faibles avec un réchauffement à +1,5°C qu’à +2°C et en notant la détermination [collective] de poursuivre les efforts pour limiter le réchauffement à +1,5°C » [7e considérant] ;  « la CMA souligne l’importance d’accélérer la transition énergétique juste pour maintenir le réchauffement bien en dessous de +2°C, tout en poursuivant les efforts pour le limiter à +1,5°C » [§ 5]. A également été supprimé le passage suivant : [11e considérant] : « la CMA note qu’il est urgent que les Parties renforcent leurs efforts collectifs de réduction des émissions par la mise en œuvre accélérée des mesures de réduction nationales » (NDC). Ainsi, le texte final de la décision 4/CMA.5 a été vidé de toute substance.

 

Résultats

A Bonn, les Parties ont repris les négociations sur ce programme (voir encadré ci-dessous) dans le cadre de consultations informelles co-animées par Kay Harrison (Nouvelle-Zélande) et Carlos Fuller (Belize).

Malgré les négociations intenses, les Parties ne sont pas parvenues à un consensus sur un projet de conclusions en raison des divergences sur la question de savoir s’il fallait viser un résultat procédural (sur la forme) ou un résultat sur le fond. Comme lors de la CMA-5, à Dubaï en décembre 2023, les divergences entre Parties portaient en grande partie sur le mandat du programme de travail, et notamment à l’égard des résultats du bilan mondial (Global stocktake ou GST) obtenus au terme de sa phase politique qui s’est déroulée à Dubaï.

D’un côté, plusieurs groupes de négociation (AOSIS, pays de l’Amérique latine [AILAC], UE,) ou Parties individuelles (Japon,…) se sont prononcés pour un projet de décision qui refléterait et s’appuierait sur les résultats du GST. En effet, aux termes du paragraphe 186 de la décision 1/CMA.5 sur le GST, « la CMA invite les responsables des programmes de travail et des organes constitués relevant de l’Accord de Paris à prendre en considération les résultats pertinents du GST dans la planification de leurs futurs travaux, dans le respect de leurs mandats ».

Pour une explication des différents groupes de négociation, se reporter à l’annexe 3 de notre dossier de fond sur la COP-27 (p.65).

De l’autre côté, le groupe de négociation des pays en développement ayant une vision similaire (Like-Minded Developing Countries ou LMDC), Chine en tête, et le groupe de négociation des pays arabes (le groupe arabe), Arabie saoudite en tête, ont refusé de participer constructivement aux discussions sur le volet MWP. Ainsi, ils ont soutenu que le paragraphe 186 de la décision 1/CMA.5 ne s’applique pas au MWP et se sont opposés à ce que les résultats du GST (et notamment toute mention de la nécessité de s’éloigner des combustibles fossiles [« transitioning away from fossil fuels »[1]], cf. décision 1/CMA.5, paragraphe 28d) soient repris dans le projet de décision à élaborer pour examen lors de la CMA-6 à Bakou.   

Ce sujet à l’ordre du jour (agenda item) des travaux des SB et de la CMA est le seul qui soit explicitement axé sur l’atténuation, d’où l’importance de débloquer et d’accélérer les négociations, étant donné le besoin urgent de réduire les émissions mondiales de GES. Selon Fernanda Carvalho, chargée de politique climat et énergie mondiale auprès du WWF International, « il faut accélérer radicalement les travaux sur le MWP et sur les discussions sur les contributions nationales (NDC)… Les discussions sur l’atténuation à Bonn – ou manque de discussions – sont complétement déconnectées d’une réalité triste : la fenêtre de tir pour respecter l’objectif +1,5°C se ferme rapidement… » (propos rapportés par Carbon Brief, 13 juin 2024).

Le groupe de négociation LMDC, le groupe africain et le groupe arabe ont souligné que le MWP ne devrait pas imposer d’objectifs aux pays, soutenant au contraire que l’objectif du programme était de faciliter les dialogues. De nouveaux objectifs via l’intégration de messages clés iraient au-delà du mandat du MWP et imposeraient des charges supplémentaires aux pays en développement.

Ces divergences de position – entre les Parties en faveur d’un projet de texte portant sur le fond du sujet, assortis d’objectifs concrets, et celles préférant un projet de texte de nature strictement procédurale – ont continué pendant toute la durée des négociations sur ce volet.

Le dernier jour des négociations sur ce volet, le 12 juin 2024, les co-facilitateurs ont présenté un texte sous forme de projet de conclusions, ainsi qu’une note informelle (les deux documents datent du 11 juin 2024). Le groupe LMDC et le groupe arabe ont refusé de les examiner, soutenant que les co-facilitateurs n’avaient pas reçu de mandat pour les rédiger.

En raison de ces profondes divergences, les Parties n’ont pas pu se mettre d’accord sur un projet de conclusions. Les négociations reprendront donc lors des sessions SB-61 à Bakou. A noter que si ces documents avaient été adoptés par les Parties à Bonn, cela aurait constitué un point de départ concret pour de plus amples discussions à Bakou.

 

 

Article 6

 

  • SBSTA 4 et 6 juin 2024 : atelier sur l’article 6.8 qui se tient parallèlement à la réunion du Comité de Glasgow sur les approches non fondées sur le marché.

Voir programme et note de cadrage (concept note, (non datée).

 

Outre cet évènement mandaté, les Parties ont repris les négociations sur la finalisation des détails techniques des règles de mise en œuvre de l’article 6.2 et de l’article 6.4, restés en suspens à Dubaï en décembre 2023 faute de consensus entre elles sur plusieurs points cruciaux pour leur bon fonctionnement :

  • article 6.2 : intégrité environnementale, protection des droits humains, transparence, etc. ;
  • article 6.4 : élaboration et évaluation de méthodologies, activités liées à l’absorption du CO2.

 

En savoir plus sur l’article 6 de l’Accord de Paris : les mécanismes fondés et non fondés sur le marché

Contexte général

En vertu de l’article 6 de l’Accord de Paris, les Parties peuvent décider de coopérer sur une base volontaire dans la mise en œuvre de leurs NDC pour relever le niveau d’ambition de leurs mesures d’atténuation et d’adaptation via des approches dites « coopératives ». Ainsi, l’article 6.4 prévoit la mise en place d’un nouveau mécanisme de marché pour contribuer à la réduction des émissions de GES et qui prend le relais du mécanisme pour un développement propre ou MDP (établi par l’article 12 du Protocole de Kyoto) : le mécanisme de développement durable ou MDD (ou Sustainable Development Mechanism [SDM]). Ce volet très important de l’Accord de Paris est donc le seul qui fait participer le secteur privé à l’action climat.

L’article 6 comporte trois sous-volets :

  • 6.2 : approches coopératives (transferts de réduction directs [crédits carbone] entre pays à titre bilatéral ou multilatéral, connus sous l’acronyme anglais ITMO),
  • 6.4 : mécanisme de développement durable ou MDD (marché carbone centralisé),
  • 6.8 : approches non fondées sur le marché (pour renforcer les liens et créer des synergies entre atténuation, adaptation, financement, transfert de technologies et renforcement des capacités).

En particulier, l’article 6 établit donc la base juridique d’un nouveau mécanisme de flexibilité pour que les pays qui le souhaitent puissent atteindre une partie de leurs objectifs de réduction en fournissant un soutien financier dans le cadre de projets de réduction d’émissions dans d’autres pays (sur une base volontaire donc) et ce, à l’instar des mécanismes établis par le Protocole de Kyoto (mécanisme pour un développement propre [MDP] et mise en œuvre conjointe [MOC]). Les principes du nouveau « mécanisme pour contribuer à l’atténuation des émissions de GES et promouvoir le développement durable » (mécanisme de développement durable ou MDD) sont ainsi posés.

Adoption des règles de mise en œuvre : pas de consensus à Katowice (2018), à Madrid (2019)

Ce volet (article 6) des règles de mise en œuvre de l’Accord de Paris dans le cadre du manuel des règles d’application (Rulebook), adopté à Katowice en 2018 lors de la CMA-1, y est resté en suspens (faute de consensus sur les modalités techniques complexes et en raison de l’opposition du Brésil), puis une nouvelle fois à la COP-25 de Madrid (en raison des profondes divergences politiques entre les Parties et surtout du blocage du Brésil de nouveau, mais aussi de l’Australie et de l’Arabie saoudite) et ce, alors que le régime de Paris a formellement démarré le 1er janvier 2021.

 

Adoption des règles de mise en œuvre : consensus à Glasgow (2021)

Après d’intenses et longues négociations lors de la COP-26 à Glasgow (Ecosse, novembre 2021), les Parties de la CMA-3 ont enfin pu parvenir à un accord sur la finalisation de ces règles sur les modalités pour recourir aux marchés carbone via trois décisions :

  • décision 2/CMA.3 relative aux approches coopératives visées à l’article 6.2 de l’Accord de Paris. Les lignes directrices sur les approches coopératives adoptées sont établies à l’annexe de la décision,
  • décision 3/CMA.3 relative aux règles, modalités et procédures applicables au mécanisme établi en vertu de l’article 6.4 de l’Accord de Paris,
  • décision 4/CMA.3 relative au programme de travail dans le cadre des approches non fondées sur le marché visées à l’article 6.8 de l’Accord de Paris.

Les règles adoptées évitent notamment l’écueil du double comptage des crédits d’émission. Les crédits d’émission issus des projets menés au titre du Protocole de Kyoto enregistrés après le 1er janvier 2013 peuvent être transférés dans le mécanisme de Paris. Ces crédits doivent être identifiés comme étant des « réductions d’émission pré-2020 ». Ils peuvent être utilisés pour contribuer à atteindre les objectifs uniquement de la première NDC.

Au titre de l’article 6.4, une part obligatoire de 5% des recettes issues des échanges sera prélevée pour alimenter le Fonds d’adaptation pour aider les pays en développement à couvrir les coûts d’adaptation, tandis qu’au minimum 2% des crédits d’émission devront être annulés afin d’assurer une « atténuation globale des émissions mondiales » (overall mitigation of global emissions ou OMGE). Un « organe de supervision » (Supervisory body) de l’article 6.4 est établi et devait commencer à travailler en 2022 via deux réunions, au cours desquelles il devait commencer à élaborer des méthodologies et des exigences administratives pour le marché.

Comité de Glasgow sur les approches non fondées sur le marché (cf. article 6.8)

Le Comité de Glasgow sur les approches non fondées sur le marché (Glasgow Committee on Non-Market Approaches ou GCNMA) a été créé par la décision 4/CMA.3 (cf. chapitre III de l’annexe, paragraphes 4 et 5) pour mettre en œuvre le cadre des approches non fondées sur le marché et le programme de travail associé, en offrant aux Parties des possibilités de coopération non fondée sur le marché pour la mise en œuvre des mesures d’atténuation et d’adaptation prévues dans leurs NDC.

Le Comité de Glasgow est convoqué par le Président du SBSTA et fonctionne conformément aux procédures applicables aux groupes de contact et sous la direction du Président. Il se réunit au moment de la tenue des deux sessions annuelles du SBSTA (en juin et lors de la COP/CMA en novembre ou décembre de chaque année), la première réunion devant avoir lieu en même temps que la 56e session du SBSTA (juin 2022).

Première réunion (GCNMA-1) (Bonn juin 2022) | Deuxième réunion (GCNMA-2) (Charm el-Cheikh, nov. 2022) | Troisième réunion (GCNMA-3) (Bonn, juin 2023) | Quatrième réunion (GCNMA-4) (Dubaï, déc. 2023).

Voir aussi Plateforme sur les approches non fondées sur le marché.

 

Adoption des règles de mise en œuvre : avancées à Charm el-Cheikh (2022) sur la finalisation des derniers détails techniques

Même si avec ces trois décisions, qui ont constitué une avancée majeure à Glasgow, les règles d’application de l’article 6 sont arrêtées dans leur ensemble, il restait néanmoins à peaufiner certains détails et à étoffer certains éléments lors les sessions suivantes du SBSTA (SBSTA-57 et après) pour que l’article 6 soit intégralement opérationnel et pour que les échanges puissent véritablement démarrer, d’où la poursuite des travaux sur l’article 6 lors de la session SBSTA-56 à Bonn (juin 2022). Ainsi, des consultations informelles ont été menées à Bonn sur les sujets confiés au SBSTA pour lesquels la CMA avait demandé (via la décision 3/CMA.3) d’élaborer des recommandations, parmi lesquels les règles, modalités et procédures applicables au MDD.

Lors de la CMA-4 (Charm el-Cheikh, nov. 2022), les négociations au titre de l’article 6 se sont poursuivies discrètement en arrière-plan pendant les deux semaines et sont parvenues, via trois nouvelles décisions, à fournir un certain nombre de recommandations et orientations qui devraient contribuer à opérationnaliser les trois volets de l’article 6.

  • article 6.2 : la décision 6/CMA.4 précise entre autres les grandes lignes du rapport à soumettre par les Parties. Elle prévoit la possibilité pour ces informations rapportées de revêtir un caractère confidentiel. Ainsi, elle laisse aux Etats la liberté de décider de garder ces informations confidentielles ou non, avec l’option pour eux de fournir des explications motivant leur choix, ce qui a engendré de vives critiques de la part des ONG en raison du manque de transparence et du manque de redevabilité (accountability) ;
  • article 6.4: la décision 7/CMA.4 établit des lignes directrices relatives au MDD. La CMA-4 n’a pas entériné les recommandations de l’organe de supervision de l’article 6 (A 6.4 Supervisory Body), publiées le 6 novembre 2022, au terme de sa 3e réunion (éligibilité des activités anthropiques portant sur l’absorption de CO2 (et le stockage dans des réservoirs géologiques [donc le captage et stockage du CO2], terrestres ou océaniques) à des crédits d’émission à échanger sur le marché international. Elles ont été vivement critiquées par les ONG qui craignent qu’elles ne nuisent à l’intégrité de l’Accord de Paris, tout en pointant leur manque de protection des droits humains et de l’environnement. Plusieurs Parties se sont également opposées à ces recommandations. La CMA-4 a donc demandé à l’organe de supervision de reprendre le dossier et de retravailler leurs recommandations initialement proposées, afin de soumettre de nouvelles propositions de recommandations pour examen et adoption par la CMA-5 (déc. 2023) ;
  • article 6.8 : la décision 8/CMA.4 demande au Comité de Glasgow sur les approches non fondées sur le marché (Glasgow Committee on Non-Market Approaches [NMAs]), établi par la décision 4/CMA.3, de poursuivre la mise en œuvre des activités du programme de travail prévues par la décision 4/CMA.3 ( annexe, chapitre V) sur 2023-2026 en deux phases (2023-2024, puis 2025-2026). Le Secrétariat de la CCNUCC est également prié de développer et de rendre opérationnelle la plateforme web de la CCNUCC destinée à enregistrer et à échanger les informations sur les approches non fondées sur le marché. La décision définit la finalité de cette plateforme web.

 

Adoption des règles de mise en œuvre : avancées à Bonn (2023) sur la finalisation des derniers détails techniques

Le sujet a été repris lors des 58èmes sessions du SBSTA et du SBI à Bonn (5-15 juin 2023).

Article 6.2 – approches coopératives

Des consultations informelles ont été menées sur ce sujet de négociation. Les pays en développement ont souligné le besoin d’un renforcement rapide de leurs capacités afin de leur permettre de contribuer aux discussions techniques sur l’élaboration d’un format électronique consensuel (Agreed Electronic Format ou AEF) pour le rapportage des informations annuelles. Les Parties ont convenu qu’un manuel devrait être élaboré pour aider à la préparation de l’AEF.

Voir conclusions du SBSTA | Voir note informelle (32 p) rédigée par les co-facilitateurs et résumant les discussions sur l’article 6.2 à Bonn (du 14 juin 2023 @14h).

 

Article 6.4 – mécanisme de développement durable

Des consultations informelles ont été menées sur ce sujet de négociation. Les Parties ont discuté de la question de savoir s’il fallait intégrer dans l’article 6.4 les activités visant à éviter (et non seulement de réduire) les émissions et à améliorer la conservation de la nature. Certaines Parties ont demandé à obtenir plus de recommandations et de clarifications sur les activités visées. Plusieurs Parties ont également souligné l’importance de relier le registre de l’article 6.4 au registre international de l’article 6.2 afin de s’assurer que les informations sur les réductions d’émissions de l’article 6.4 soient centralisées. Plusieurs pays industrialisés ont ajouté qu’il devrait être possible de transférer les unités du registre de l’article 6.4 au registre international de l’article 6.2 et aux registres nationaux de l’article 6.2. Elles ont affirmé que ces deux approches peuvent coexister.

Voir conclusions du SBSTA | Voir note informelle (6 p) rédigée par les co-facilitateurs et résumant les discussions sur l’article 6.4 à Bonn (du 14 juin 2023 @16h00).

 

Article 6.8 – approches non fondées sur le marché

Des consultations informelles ont été menées sur ce sujet de négociation. Les conclusions adoptées n’ont pas fait l’objet d’un consensus parmi toutes les Parties.

Le SBSTA a convoqué la 3e réunion du Comité de Glasgow sur les approches non fondées sur le marché (Glasgow Committee on Non-Market Approaches).

Voir conclusions du SBSTA.

 

Adoption des règles de mise en œuvre : avancées à Dubaï (2023) sur la finalisation des derniers détails techniques

Même si les règles d’application de l’article 6 ont été arrêtées dans leur ensemble lors de la CMA-3 à Glasgow en nov. 2021, il restait néanmoins à peaufiner certains détails techniques (définitions, procédures, logistique,…) et à étoffer certains éléments pour que l’article 6 soit intégralement opérationnel et pour que les échanges puissent donc véritablement démarrer sur la base de règles robustes (art. 6.4 : autorisation des unités de réduction A6.4ER ; interconnexion entre registres art. 6.2 et 6.4 ; éligibilité des projets qui évitent les émissions et améliorent la conservation de la nature,…). L’article 6 n’était donc plus un sujet politique prioritaire.

A Dubaï, le projet de décision 6.2 et le projet de décision 6.4 sont restés bloqués faute de consensus entre les Parties et n’ont pas pu donc être adoptés. Les négociations ont été renvoyées aux sessions SB-60 à Bonn (juin 2024).

Article 6.2 – approches coopératives

Les négociations à Dubaï ont fait ressortir un désaccord total entre, d’une part, l’UE, les pays africains et latino-américains et, d’autre part, les Etats-Unis sur des questions clés : l’intégrité environnementale et la protection des droits humains, ainsi que la transparence (surtout la question des clauses de confidentialité des informations rapportées par les Parties après les échanges d’ITMO, qui empêcheraient la vérification de ces informations). Alors que les Etats-Unis voulaient à tout prix mettre en œuvre le plus rapidement possible une approche minimaliste et basique (« light-touch, no frills »), s’appuyant sur le marché volontaire, l’autre camp avait une vision diamétralement opposée : des règles robustes avec vérification renforcée.

 

Article 6.4 – mécanisme de développement durable

A Dubaï, la CMA-5 n’a pas entériné les recommandations finalisées le 27 nov. 2023 par l’organe de supervision de l’art. 6.4 (Art. 6.4 Supervisory Body) sur les exigences pour l’élaboration et l’évaluation de méthodologies  et pour les activités liées à l’absorption de CO2. Leur approbation est essentielle pour l’opérationnalisation du marché. Ces deuxièmes versions des recommandations ont été rejetées par les Parties en raison de leur manque d’ambition et de robustesse (tout comme les premières versions à Charm el-Cheikh où la CMA-4 avait demandé à l’organe de supervision de revoir sa copie). Ce résultat décevant envoie un signal très négatif aux acteurs du marché carbone de l’art 6.4, ce qui a pour conséquence de laisser ce marché dans un état d’incertitude et d’instabilité persistant. Cependant, ce non-résultat a évité l’adoption de règles insuffisantes et évité de reproduire les erreurs des marchés carbone volontaires (cf. polémique sur le certificateur de crédits carbone Verra en 2023). En effet, une absence d’accord reste mieux qu’un mauvais accord selon plusieurs observateurs, dont l’ONG Carbon Market Watch. L’opérationnalisation du marché carbone de l’art. 6.4 subira donc probablement un retard supplémentaire d’au moins 12 mois. Un effet pervers de cet échec (selon Carbon Market Watch, source : Climate Home News, 20 déc. 2023) est le risque que les acteurs du marché volontaire en profitent pour saisir l’opportunité de combler le vide juridique concernant les règles de l’art. 6.2 et 6.4. Cela devrait dans tous les cas doper le marché volontaire.

Sur les articles 6.2 et 6.4, les négociations reprendront donc à Bonn en juin 2024.

 

Article 6.8 – approches non fondées sur le marché

En revanche, un consensus a pu être trouvé à Dubaï sur ce sous-volet de l’article 6. La décision 17/CMA.5 adoptée reste une décision plutôt procédurale qui encourage les Parties à continuer à identifier des possibilités pour concevoir et mettre en œuvre des approches non fondées sur le marché.

Voir la page du site de la CCNUCC sur les approches fondées et non fondées sur le marché.

Voir la page du site de la CCNUCC sur la mise en œuvre coopérative (article 6).

 

Résultats

Lors des consultations informelles, les co-facilitateurs Maria Al-Jishi (Arabie Saoudite) et Peer Stiansen (Norvège) ont présenté une note informelle rédigée par le Président du SBSTA, Harry Vreuls, en amont de sessions SB-60 (en date du 29 mai 2024). Cette note reflète les différents points de vue exprimés par les Parties dans les négociations du SBSTA-59 à Dubaï sur les sous-volets article 6.2 et article 6.4. Ils ont expliqué que le mandat du groupe était d’élaborer un projet de texte de décision pour chacun de ces deux sous-volets, à soumettre à la CMA-6 à Bakou, et de se concentrer sur les « questions cruciales », y compris les autorisations, les registres et le format électronique.

La Présidence azerbaïdjanaise a indiqué très clairement qu’une des priorités de la COP-29 (et de la CMA-6) serait de régler une fois pour toutes les questions techniques des articles 6.2 et 6.4. Dans son discours sur la vision et la stratégie de la Présidence azerbaïdjanaise de la COP-29 pour Bakou, le négociateur en chef de la COP-29, Yalchin-Rafiyev, s’est fixé comme objectif de la Présidence de rendre l’article 6 pleinement opérationnel à Bakou.

Malgré cette ambition forte, les négociations techniques ont progressé lentement et ont globalement débouché sur peu de résultats concrets. Des avancées significatives ont néanmoins été enregistrées sur deux questions spécifiques :

  • les activités qui évitent des émissions: la question est de savoir si de telles activités peuvent compter pour générer des crédits d’émission pour échange au titre de l’article 6.2 et de l’article 6.4 (par exemple, si une entité n’entreprend pas une activité émettrice de GES (telle que l’extraction de combustibles fossiles), elle pourrait se voir octroyer des crédits d’émission. Malgré l’opposition des Philippines, dans leur ensemble, les Parties s’accordent à reconnaître que cette option ne devrait pas être retenue. A Bonn, après des discussions intenses, les Parties se sont mises d’accord sur le fait que ces activités ne doivent pas générer des crédits au titre des articles 6.2 et 6.4. Le SBSTA a décidé de poursuivre l’examen de cette question à sa 68e session (2028). Le SBSTA a noté qu’en l’absence de nouvelles recommandations de la part de la CMA, les recommandations actuelles s’appliquent, sachant que l’option de compter les émissions évitées n’est pas incluse dans les recommandations actuelles (cf. paragraphe 6 du projet de conclusions adopté à Bonn sur ce sous-volet, en date du 13 juin 2024). Par conséquent, cette question a été supprimée de l’ordre du jour en amont de Bakou, renvoyant ainsi un signal clair aux marchés ;
  • la question de la confidentialité des informations rapportées par les Parties après les échanges d’ITMO sans qu’il n’y ait besoin pour celles-ci de justifier leur décision. Les négociations à Bonn ont pu avancer sur cette question. Ainsi, le SBSTA a demandé au Secrétariat de la CCNUCC d’élaborer, de publier et de mettre en œuvre les procédures administratives nécessaires, y compris un code de conduite spécifique pour les équipes d’experts techniques de l’article 6, pour le traitement et l’examen des informations identifiées comme confidentielles par les Parties participantes. A noter toutefois que ce code de conduite devra être approuvé par l’ensemble des Parties, ce qui est loin d’être acquis à ce stade.

 

Prochaines étapes

Si ces avancées ne permettent pas une rapide opérationnalisation de l’article 6, elles contribueront néanmoins à garantir son intégrité environnementale. Elles pourront peut-être aider les Parties à se concentrer sur les questions cruciales, telles que les modalités d’autorisation du transfert des réductions d’émission en vertu de l’article 6.2 ou la question de savoir si les pays qui ne disposent pas de registres nationaux pourront utiliser le registre international pour enregistrer et transférer leurs réductions d’émission.

Les Parties ont également convenu d’organiser un atelier pour faire avancer les travaux techniques sur les Articles 6.2 et 6.4 avant le mois de novembre 2024. Elles devraient ainsi être mieux placées à Bakou pour faire aboutir les négociations à un résultat concret et concluant.

En amont de la CMA-6, des travaux supplémentaires sur l’Article 6.4 seront réalisés. L’organe de supervision de l’article 6.4 (Article 6.4 Supervisory Body), chargé de rendre opérationnel un nouveau marché mondial du carbone dans le cadre de l’Accord de Paris, se réunira deux fois avant les négociations à Bakou, pour finaliser les recommandations sur les méthodologies et les absorptions d’émissions. Les commentaires recueillis auprès des Parties et des parties prenantes lors d’un événement qui s’est tenu le 3 juin 2024 à Bonn seront intégrés à ces recommandations.

Enfin, l’organe de supervision de l’article 6.4 vise également à finaliser un outil de développement durable (Sustainable Development Tool) en amont de la CMA-6, afin d’établir des garanties environnementales et sociales dans le cadre des échanges qui seront effectués sur le marché mondial du carbone.

Voir le projet de conclusions du Président du SBSTA sur l’article 6.2 (en date du 13 juin 2024).

Voir le projet de conclusions du Président du SBSTA sur l’article 6.4 (en date du 13 juin 2024).

 

 

Transition juste

 

  • SBI/SBSTA 2-3 juin 2024: 1er dialogue dans le cadre du programme de travail des Emirats arabes unis sur la transition juste (UAE Just Transition Work Programme ou JTWP) (voir encadré ci-dessous).

Voir programme.

 

En savoir plus sur le programme de travail sur la transition juste

Lors de la CMA-4 (à Charm el-Cheikh, Egypte, novembre 2022), les Parties avaient décidé de mettre en place un programme de travail sur la transition juste pour examiner les trajectoires visant à atteindre les objectifs de l’Accord de Paris (paragraphe 52 de la décision 1/CMA-4). Le SBI et le SBSTA avaient été chargés par la CMA-4 de soumettre un projet de décision pour examen et adoption lors de la CMA-5. La CMA-4 avait également décidé d’organiser tous les ans, dans le cadre de ce nouveau programme de travail, une table ronde ministérielle de haut niveau sur la transition juste, à compter de la CMA-5.

A Dubaï, s’est tenu le 3 décembre 2023 la première table ronde ministérielle de haut niveau sur la transition juste. La décision 3/CMA.5 a été une des dernières décisions à être adoptée par la CMA-5 faute de consensus entre les Parties. Par ailleurs, 10 versions du projet de décision ont circulé avant que les Parties ne parviennent à un consensus.

De fortes divergences sur le périmètre du programme ont été soulevées : doit-il axer ses discussions sur la transition de la main d’œuvre du secteur des énergies fossiles (position des pays développés) ou doit-il suivre une vision plus multilatérale et moins axée sur l’atténuation (position des pays en développement) ? Les pays en développement ont insisté sur le fait qu’ils ont besoin d’un soutien pour réaliser une transition juste (pas uniquement financier mais aussi technique, etc.). En fait, les négociations au sein de cet axe n’étaient qu’un reflet des positions plus larges à la COP-28.

Finalement, à Dubaï, dans la décision 3/CMA.5, la CMA s’est mise d’accord sur un périmètre du programme de travail, notamment sur la transition juste et équitable qui englobe des trajectoires qui intègrent les dimensions énergétiques, socio-économiques, main d’œuvre,… basées sur les priorités de développement définies au niveau national et qui incluent la protection sociale pour atténuer les impacts liés à la transition. Ce programme intègre aussi la question des potentialités, défis et entraves liés au développement durable et à l’élimination de la pauvreté. Le début de la mise en œuvre du programme de travail est prévu après la CMA-5.

Ce programme de travail sera mis en œuvre sous le pilotage du SBI et du SBSTA. Au moins deux dialogues se tiendront chaque année dans le cadre du programme de travail, l’un en amont des sessions SB en juin (à commencer par les SB-60, juin 2024) et l’autre en amont des sessions SB parallèlement aux COP en fin d’année (à commencer par les SB-61, nov. 2024).

Lors de la CMA-8 (2026), aura lieu un réexamen de l’efficacité du programme de travail et décision sur la poursuite des travaux ou non.

 

Résultats

A Bonn, l’objet de ce 1er dialogue dans le cadre du programme de travail sur la transition juste était de mener des discussions sur la manière d’intégrer les transitions justes dans les NDC, les plans nationaux d’adaptation et les stratégies bas-carbone 2050.

Un groupe de travail restreint (contact group), co-présidé par Marianne Karlsen (Norvège) et Kishan Kumarsingh (Trinité et Tobago), s’est réuni à plusieurs reprises au cours des deux semaines des sessions SB-60.

Les divergences de position sur le focus du JTWP observées lors des sessions SB-58 (juin 2023 à Bonn) et SB-59 (déc. 2023, Dubaï) sont revenues dans les négociations à Bonn lors des sessions SB-60, et notamment la reproche du groupe de négociation G77+Chine, selon laquelle elles sont trop axées sur l’atténuation. Ainsi, lors de l’ouverture du premier dialogue, le Président du SBI, Nabeer Munir (Pakistan), a recadré la vision : « la transition juste ne concerne pas uniquement la réduction des émissions de GES, elle concerne la construction d’un avenir où la justice sociale et la durabilité environnementale vont de pair… » (propos rapportés par Third World Network (TWN), TWN Bonn Climate News Update No. 3, 5 juin 2024).

Un projet de texte a été présenté aux Parties le 5 juin 2024 par la co-Présidente du groupe de travail restreint qui a invité les Parties à exprimer leurs points de vue sur ce document qu’elle a rédigé. Les discussions ont rapidement donné lieu à des divergences d’opinion : d’un côté le groupe G77+Chine, soutenu par le groupe des pays africains et le groupe LMDC, a proposé qu’en plus d’un projet de décision, un plan de travail pour le JTWP soit élaboré ; de l’autre côté, l’UE, le Royaume-Uni, les Etats-Unis, le Canada, l’Australie et le Japon se sont opposés à cette proposition, soutenant qu’il était trop tôt, sachant que le réexamen du JTWP interviendra en 2026.

Par ailleurs, les Parties ne sont parvenues à se mettre d’accord sur les modalités (plan global, calendrier, participants) du JTWP. Ces modalités doivent être concrétisées avant que les travaux techniques du JTWP ne puissent démarrer.

A plusieurs reprises à Bonn, les Parties ont rouvert des discussions sur des éléments qui avaient fait l’objet d’un consensus à Dubaï.

Le dernier jour des négociations, les Parties sont parvenues à un consensus sur un projet de conclusions et une note informelle. Celle-ci, rédigée sous la seule responsabilité des deux co-Présidents du groupe de travail restreint, comporte des éléments non consensuels et non exhaustifs qui visent à aider les Parties à faire avancer les discussions sur ce volet. Si le projet de conclusions ne fait aucune mention d’un plan de travail, la note informelle, elle, comporte un espace réservé (« placeholder ») pour le plan de travail.

Voir le projet de conclusions et la note informelle (les deux documents en date du 13 juin 2024).

 

Autres sujets de discussion

 

Des discussions ont également été menées sur :

Les océans

Voir programme et note d’information (du 24 mai 2024). Pour le programme, voir pp.13-14 du document.

Voir notre article sur le programme des SB-60, publié le 31 mai 2024.

Pour l’instant, aucune synthèse des discussions n’est disponible.

 

La transparence/MRV

Plusieurs évènements mandatés ont eu lieu à Bonn sur le sujet de la transparence/MRV.

Voir notre article sur le programme des SB-60, publié le 31 mai 2024.

 

Par ailleurs, des consultations informelles, coanimées par Daniela Romano (Italie) et Thiago Mendes (Brésil), ont été menées sur les outils de rapportage au titre du cadre de transparence renforcée (Enhanced Transparency Framework ou ETF). Les discussions se sont focalisées sur le document technique du Secrétariat du 6 mai 2024 retraçant l’expérience des Parties avec la version test des outils de rapportage du ETF (FCCC/TP/ 2024/2).

Voir projet de conclusions proposé par le Président du SBSTA (en date du 12 juin 2024).

 

 

Bilan

 

Malgré les négociations intenses, vives et tendues, force est de constater que Bonn 2024 a abouti à peu de progrès concrets sur des sujets clés. Le clivage Nord Sud a été évident, surtout sur le financement climat, la responsabilité historique des émissions de GES, l’atténuation et l’adaptation.

Cette année a vu un nombre record d’évènements mandatés (30 au lieu d’une vingtaine lors des sessions inter-COP de juin 2023), ce qui ajoute des contraintes en termes de temps à consacrer aux différents sujets de négociation. Ainsi, la capacité des Parties à suivre plusieurs axes de négociation simultanées et à répondre à la demande sans cesse croissante de soumissions et de participation aux ateliers inter-COP a été mise à rude épreuve. Cela est tout particulièrement le cas des petites délégations, telles que celles des pays les moins avancés (PMA).

Bonn a pu déboucher sur quelques avancées sur trois sujets clés : transition juste, indicateurs pour l’objectif mondial en matière d’adaptation, et article 6.2 et 6.4. En revanche, les discussions pour concrétiser le nouvel objectif collectif chiffré post-2025 en matière de financement climat ont débouché sur de maigres résultats, ce qui laisse beaucoup de chemin à parcourir d’ici Bakou (éléments structurels, modalités [dont les pays bénéficiaires, les pays donateurs, le calendrier et la période cible], montant) pour aboutir à un résultat concluant et à la hauteur des enjeux.

De même, sur les sujets du bilan mondial (Global Stocktake) et des plans nationaux d’adaptation, les négociations ont engendré des blocages et les Parties n’ont pas pu parvenir à un consensus sur des points clés. Par ailleurs, il faut constater l’absence de discussions sur la question primordiale de la transition vers la sortie des combustibles fossiles, telle qu’établie au paragraphe 28d de la décision 1.CMA.5 sur le premier GST, et surtout sur la mise en œuvre concrète de cet engagement des Parties pris à Dubaï.

Quant au sujet de l’atténuation (programme de travail MWP), les Parties n’ont même pas pu se mettre d’accord sur un projet de conclusions. Les discussions ont plutôt été caractérisées par une méfiance entre, d’une part, les pays développés et, d’autre part, les groupes de négociation LMDC et pays arabes.  En particulier, alors que les sujets du bilan mondial et de l’atténuation constituent les deux principaux volets de négociation où les Parties pourraient décider des actions de réduction des émissions nécessaires pour concrétiser leurs engagements pris au titre de la décision 1.CMA.5 sur le premier GST (et surtout la transition vers la sortie des combustibles fossiles), ces Parties se sont embourbées dans des disputes sur les mandats respectifs de ces deux volets de négociation. Ce sont justement ces deux volets de négociation qui devront éclairer les travaux d’élaboration de la prochaine série des NDC à ambition renforcée, sachant que les Parties devront soumettre leur prochaine NDC au moins neuf à 12 mois en amont de la CMA-7 (le 10 novembre 2025), soit entre le 10 novembre 2024 et le 10 février 2025 (cf. paragraphe 166 de la décision 1/CMA.5 et paragraphe 25 de la décision 1/CP.21). De ce fait, le programme de travail MWP devrait jouer un rôle central dans la réalisation de l’objectif +1,5°C.

Les sessions des SB-60 ont, une fois de plus, fait ressortir les profondes divergences de positions entre, d’une part, les pays industrialisés et, d’autre part, les pays en développement et notamment les grands pays émergents. C’est d’abord et avant tout la question épineuse du financement climat où le clivage entre ces deux catégories est le plus fort. Plusieurs délégués sont partis de Bonn déçus, frustrés, voire en colère, étant donné les maigres résultats obtenus, notamment sur le volet de l’atténuation (programme de travail MWP), fustigeant la tendance observée ces dernières années à repousser les problèmes à régler d’année en année et ce, malgré l’urgence de la crise climatique. Comme l’a souligné le Secrétaire exécutif de la CCNUCC, Simon Stiell, les progrès à Bonn ont été « modestes » et « trop de questions sont restées en suspens. Trop de points sont encore sur la table [de négociation] » (source : discours de clôture de Simon Stiell, 13 juin 2024).

Enfin, la nouvelle gouvernance des deux prochaines COP (COP-29 à Bakou et COP-30 à Belém, Brésil), pour la première fois sous forme de troïka (Présidences de la COP-28 [Emirats arabes unis], de la COP-29 [Azerbaïdjan] et de la COP-30 [Brésil]) s’est montrée très discrète jusque-là. Cependant, à l’approche de Bakou, elle devra donner une nouvelle impulsion aux négociations, en travaillant plus étroitement avec les chefs de délégation pour permettre de faire aboutir la COP-29 à un résultat tangible.

La COP-29 a d’ores et déjà été baptisée la « COP du financement climat » mais à en juger par les maigres résultats obtenus à Bonn 2024 sur le volet nouvel objectif collectif chiffré post-2025 en la matière, on peut légitimement se poser la question de savoir si les pays développés et les pays en développement (les grands pays émergents en tête) vont parvenir à se mettre d’accord à Bakou sur un montant (quantum) du futur objectif et ce, conformément au mandat de la décision 1.CP.21 (paragraphe 53).

Enfin, en amont de Bakou, les enjeux clés de la COP-29 sont nombreux, dont les plus importants :

  • définir, pour examen et adoption lors de la CMA-6 à Bakou, une proposition de montant (quantum) de l’objectif collectif chiffré post-2025 pour le financement climat ;
  • régler les questions en suspens concernant les modalités de mise en œuvre de cet objectif (qui contribuera ? qui bénéficiera ? quel volet de l’action climat financer ? quelle période cible ? quelle nature du soutien (dons, prêts,..) ?
  • concrétiser les suites à donner aux résultats de la phase politique du bilan mondial (Global Stocktake) et la mise en œuvre des nombreux engagements pris au titre de la décision 1/CMA.5 (au premier rang desquels « la transition vers la sortie des combustibles fossiles) ;
  • faire déboucher le programme MWP (relatif à l’ambition de l’atténuation et aux mesures de mise en œuvre) sur des résultats concrets de réduction des émissions ;
  • renforcer l’ambition, surtout en matière d’atténuation, dans la prochaine série des NDC alignées, dans leur ensemble, sur une trajectoire d’émissions de GES compatible avec l’objectif +1,5°C et s’appuyant sur les enseignements tirés du premier bilan mondial ;
  • créer une dynamique politique et diplomatique forte pour inciter les pays développés à accroître le financement climat pour les pays en développement vulnérables ;
  • concrétiser les modalités de mise en œuvre du programme de travail EAU-Belém sur les indicateurs dans le cadre de l’objectif mondial en matière d’adaptation (2024-2026).

 

 

En savoir plus

Page du site de la CCNUCC consacrée aux sessions SB-60

Communiqué de clôture de la CCNUCC en anglais et en français

Discours du Secrétaire exécutif de la CCNUCC à la clôture des sessions SB-60 en anglais et en français

Communiqué du négociateur en chef de l’Azerbaïdjan sur la vision et la stratégie de la Présidence de la COP-29 pour la Conférence des Nations Unies sur le Climat à Bakou (en date du 10 juin 2024)

Programme global des sessions SB-60 (overview schedule)

Programme complet des réunions lors des SB-60

Programme du jour en détail (le programme de la journée indiquée est mis en ligne la veille au soir, à partir du 3 juin 2024)

Ateliers et réunions parallèles (side events)

Page du site de la CCNUCC consacrée à la session SBSTA-60

Page du site de la CCNUCC consacrée à la session SBI-60

 

Couverture et analyse des résultats de Bonn par d’autres organismes de référence (centres de réflexion, instituts de recherche, etc.)

– page du site de l’Institut International du Développement Durable (IISD) consacrée aux sessions SB-60 en anglais et en français. Dans un bulletin quotidien, l’IISD revient en détail chaque jour sur les avancées de la veille

– Institut International du Développement Durable (IISD) : Earth Negotiations Bulletin Vol.12 n°853, 17 juin 2024 – Compte rendu détaillé des sessions SB-60 : en anglais et en français

– Carbon Brief (2024). « Bonn climate talks: key outcomes from the June 2024 UN climate conference”, 14 juin 2024. Consulter

 

[1] En français : « Opérer une transition juste, ordonnée et équitable vers une sortie des combustibles fossiles dans les systèmes énergétiques. » (source : CCNUCC).

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